La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2015 | FRANCE | N°14LY00617

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 03 février 2015, 14LY00617


Vu la requête, enregistrée le 25 février 2014, présentée pour M. A... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307611 du 29 janvier 2014 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 7 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;
>3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour tem...

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2014, présentée pour M. A... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307611 du 29 janvier 2014 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 7 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné un pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce conseil de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé, s'agissant de sa situation personnelle et familiale ;

- il est entaché d'une erreur de droit, le préfet s'étant cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, et d'une erreur d'appréciation, en ce qu'il produit des éléments nouveaux de nature à démontrer les risques qu'il encourt en cas de retour dans son pays d'origine ;

- l'obligation de quitter le territoire national est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- les premiers juges ont omis de statuer sur le lien entre ses pathologies et les évènements vécus dans son pays d'origine ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de l'illégalité de la décision faisant obligation au requérant de quitter le territoire national ;

- elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2014, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 500 euros soit mise à la charge de M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu la décision du 20 mars 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section cour administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant congolais né le 18 mars 1988, est entré irrégulièrement en France le 24 juillet 2012 ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 27 décembre 2012, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 4 septembre 2013 ; que, par les décisions contestées en date du 7 octobre 2013, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissible ; que M. B...relève appel du jugement du 29 janvier 2014 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que M. B...n'apporte pas au dossier d'éléments suffisants de nature à justifier qu'il ne pourrait pas recevoir des soins appropriés dans le pays dont il a la nationalité ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif n'aurait pas statué sur le lien entre ses pathologies et les évènements qu'il aurait vécus dans son pays d'origine ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée mentionne les conditions de son entrée et de son séjour en France, rappelle les éléments de la procédure d'examen de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile et constate, d'une part, que l'intéressé ne peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement du 8° de l'article L. 314-11 et de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, que cette décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'après refus par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile de reconnaître le statut de réfugié à M.B..., le préfet du Rhône était tenu de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner sa situation personnelle doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, si M. B...fait valoir qu'il serait en danger en cas de retour dans son pays d'origine et soutient que le préfet du Rhône a commis une erreur d'appréciation en ne prenant pas en compte cette circonstance, ce moyen est inopérant à l'encontre du refus de titre de séjour, lequel n'a pas pour objet de désigner un pays de destination ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que M.B..., n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...). " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces médicales versées aux débats par M. B... qu'il souffre d'un état de stress post-traumatique sévère, pour lequel il bénéficie d'un traitement composé d'un antidépresseur, d'un anxiolytique et d'un hypnotique ; qu'aucun des deux certificats médicaux produits ne précise que l'absence de soins entraînerait pour le requérant des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'en outre, il ressort de la liste nationale des médicaments essentiels que différents traitements existent en République démocratique du Congo contre la dépression, le désordre panique et les troubles de l'humeur, dont M. B...ne démontre ni n'allègue qu'ils ne permettraient pas une prise en charge adaptée de son état de santé ; que, si un praticien du centre hospitalier du Vinatier précise qu'une situation stable et sécure en France est indispensable pour que l'intéressé puisse éventuellement se remettre de sa pathologie et qu'un retour dans son pays d'origine risque d'avoir des conséquences délétères et d'une exceptionnelle gravité en plaçant M. B... face à ses agents persécuteurs, cette affirmation, essentiellement fondée sur le récit de l'intéressé, ne permet pas d'établir qu'un retour en République démocratique du Congo serait de nature à aggraver sa pathologie ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'en l'absence d'autre élément, le moyen tiré de ce que la décision contestée procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B...doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité des décisions du même jour lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant que M. B...soutient que son père, militaire accusé de soutenir le mouvement de libération du Congo, serait porté disparu après avoir été arrêté et maltraité en 2007 par des militaires de la garde républicaine, que sa mère et ses soeurs auraient été victimes de violences et qu'il aurait été arrêté et maltraité afin qu'il cesse de rechercher des renseignements sur son père ; qu'il aurait été libéré le 28 juin 2012 grâce à la complicité d'un officier qui connaissait son père et aurait fui vers la France ; que s'il se prévaut, à l'appui de son récit, d'un témoignage de la commission diocésaine Justice et Paix de Boma, dans le Bas-Congo, daté du 21 septembre 2013, selon lequel l'évasion sanglante, le 18 août 2013, du père de M. B...du lieu où il était détenu aurait relancé les recherches contre sa famille, dont la plupart des membres aurait quitté la République démocratique du Congo, et d'un avis de recherche du 26 septembre 2013 pour atteinte à la sûreté de l'Etat, ces pièces, produites immédiatement après le rejet de sa demande d'asile, se rapportent à des faits antérieurement relatés, examinés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, et ne sont pas de nature à démontrer que M. B...encourrait de nouvelles persécutions en République démocratique du Congo du fait de ses opinions politiques ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions aux fins d'annulation de la requête de M. B...doivent être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision attaquée, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le préfet du Rhône en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 février 2015.

''

''

''

''

2

N° 14LY00617


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00617
Date de la décision : 03/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-02-03;14ly00617 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award