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06/01/2015 | FRANCE | N°14LY00622

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 06 janvier 2015, 14LY00622


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2014, présentée pour M. D... C...et Mme A... B...épouseC..., domiciliés auprès de l'association Renaître, 3 rue Jean de la Fontaine à Saint-Etienne (42000) ;

M. et Mme C... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306118 et 1306195 du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés de la préfète de la Loire du 13 juin 2013 leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français et désignant un pays de destination

;

2°) d'annuler les arrêtés susmentionnés ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l...

Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2014, présentée pour M. D... C...et Mme A... B...épouseC..., domiciliés auprès de l'association Renaître, 3 rue Jean de la Fontaine à Saint-Etienne (42000) ;

M. et Mme C... demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306118 et 1306195 du 20 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés de la préfète de la Loire du 13 juin 2013 leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français et désignant un pays de destination ;

2°) d'annuler les arrêtés susmentionnés ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce conseil de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

ils soutiennent que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'état de santé de leur fille justifiant la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour sur ce fondement ;

- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tel qu'éclairé par la circulaire du 28 novembre 2012 et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur leur situation personnelle ;

- il a été pris en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2014, présenté par la préfète de la Loire, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu la décision du 23 janvier 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section cour administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...et M.C... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme B...épouseC..., ressortissante russe née le 20 mai 1974, est entrée en France avec ses deux enfants le 15 janvier 2010 et que son époux, de même nationalité, né le 1er mai 1972, les a rejoints le 5 février 2010 ; que leur demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 14 octobre 2011 et par la Cour nationale du droit d'asile le 3 septembre 2012 ; qu'ils ont sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions des 7° et 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêtés du 13 juin 2013, la préfète de la Loire a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français à destination du pays dont ils ont la nationalité ou de tout autre pays où ils seraient légalement admissibles ; que M. et Mme C...relèvent appel du jugement n° 1306118 et 1306195 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour peut être délivrée à l'un des parents étranger de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, sous réserve qu'il justifie résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. / L'autorisation provisoire de séjour mentionnée au premier alinéa, qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police, dans les conditions prévues au 11° de l'article L. 313-11. (...). " ;

3. Considérant que M. et Mme C...font valoir que leur fille, âgée de dix-sept ans à la date des arrêtés litigieux, est atteinte d'une épilepsie partielle continue qui affecte notamment ses capacités mnésiques et nécessite un traitement médicamenteux au long court ; que les certificats médicaux produits, indiquant que l'adolescente fait l'objet d'un traitement médicamenteux partiellement efficace et que des explorations neurologiques ont été engagées, qui " seront au mieux réalisées en France ", ne contredisent pas pertinemment l'avis du médecin de l'agence régionale de santé établi le 3 juillet 2012, aux termes duquel, si l'état de santé de la jeune fille nécessite une prise en charge médicale, le défaut de soin ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, alors qu'un traitement approprié existe dans le pays d'origine ; que le moyen tiré de ce que les refus de titre de séjour opposés aux requérants méconnaissent les dispositions précitées de l'article L. 311-2 doit, par suite, être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...). " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants, qui sont entrés en France récemment, ne pourraient poursuivre leur vie privée et familiale ailleurs qu'en France en raison de leurs origines respectives azérie et arménienne, ni qu'ils seraient dépourvus de liens familiaux en Russie ; qu'aucune pièce n'établit la réalité du syndrome post-traumatique dont souffrirait MmeC..., ni de ce qu'elle ferait l'objet d'un suivi régulier sur le territoire national qui ne pourrait être poursuivi en Russie ; que les requérants ne se prévalent d'aucune insertion personnelle ou professionnelle en France ; que la circonstance que leurs enfants, scolarisés en première et en sixième à la date des arrêtés contestés obtiennent des résultats satisfaisants, ne permet pas, en tant que telle, d'établir que leurs parents seraient insérés sur le territoire français, où ils résident depuis seulement trois ans ; que, par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que les refus de titre de séjour contestés portent à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, au sens du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...). " ;

7. Considérant que ni la durée et la qualité alléguées de la scolarité des enfants du couple C...sur le territoire français, ni aucun autre élément de leur situation personnelle ne sont constitutifs de circonstances humanitaires ou exceptionnelles justifiant leur admission au séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'à supposer que les requérants aient entendu se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012, ils ne précisent pas, en tout état de cause, quelle disposition de ce texte aurait été méconnue ; que, par suite, M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que les refus de titre de séjour qui leur ont été opposés procèderaient d'une erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ;

9. Considérant que, s'ils font valoir que leurs enfants sont scolarisés en France depuis plus de trois ans et se trouvent à des moments charnières de leur scolarité, M. et Mme C... n'allèguent ni ne démontrent que ceux-ci ne pourraient poursuivre leur scolarité en Russie, pays dont ils ont la nationalité ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du 13 juin 2013 en tant qu'ils leur refusent la délivrance d'un titre de séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant que les moyens tirés de ce que l'obligation qui leur a été faite de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés pour les mêmes motifs précédemment exposés s'agissant du refus de titre de séjour ; que M. et Mme C...ne sont, dès lors, pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du 13 juin 2013 en tant qu'ils les obligent à quitter le territoire français ;

En ce qui concerne le pays de destination :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants." ;

13. Considérant que M.C..., d'origine arménienne, et son épouse, d'origine azérie, se seraient installés en Géorgie à la fin de l'année 1994, après que leurs familles respectives, vivant en Arménie, se seraient opposées à leur mariage ; que leurs deux enfants y seraient nés en 1995 et 2001 ; qu'ils y auraient obtenu la nationalité russe et vécu sans difficulté jusqu'à ce qu'en 2008, M. C... refuse de travailler pour les services secrets géorgiens et subisse, à la suite de ce refus, des menaces et des violences ; qu'ayant trouvé un emploi de garagiste en Fédération de Russie, M. C...aurait été accusé d'avoir commis un acte terroriste pour le compte de la Géorgie en incendiant plusieurs véhicules pendant la nuit du 7 novembre 2009, acte pour lequel une compensation financière très élevée aurait été exigée de lui ; que la famille, après s'être réfugiée à Rostov, aurait décidé de fuir pour l'Europe ;

14. Considérant, toutefois, que les requérants n'assortissent leurs allégations d'aucun document, alors, au demeurant, que la Cour nationale du droit d'asile a estimé imprécis et peu convaincant leur récit relatif aux menaces auxquelles ils seraient exposés en cas de retour en Russie ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D...C...et Mme A...B..., épouse C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Dèche, premier conseiller,

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 janvier 2015.

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N° 14LY00622 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00622
Date de la décision : 06/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

35-03 Famille. Regroupement familial (voir : Etrangers).


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : VIBOUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-01-06;14ly00622 ?
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