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06/01/2015 | FRANCE | N°13LY02750

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 06 janvier 2015, 13LY02750


Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303392 du 16 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 février 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°)

d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et famili...

Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1303392 du 16 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 6 février 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de réexaminer sa situation après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Il soutient qu'il justifie résider en France depuis plus de dix années ; que le préfet devait dans ces conditions saisir la commission du titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'au regard de la durée de son séjour, le préfet du Rhône a entaché sa décision de refus de régularisation, au regard des dispositions précitées, d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision de refus de séjour a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet du Rhône n'a pas tenu compte des quatre critères fixés par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prendre la décision d'interdiction de retour ; que cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale en France ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2014, présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'il s'en remet à ses écritures de première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 6 septembre 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B... ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2014 :

- le rapport de M. Besse, premier conseiller ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité géorgienne, né en 1979, est entré en France le 28 août 2002, muni d'un visa de court séjour ; qu'il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 20 février 2003 puis la commission de recours des réfugiés le 11 décembre 2003 ; que sa demande de réexamen a également été rejetée le 23 mars 2004 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le 6 juillet 2005 par la commission de recours des réfugiés ; que, le 8 février 2006, le préfet de l'Yonne a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière ; que M. B...a bénéficié d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " valable du 15 mai 2007 au 14 mai 2008, qui lui a été délivré au regard de son état de santé ; que, par décision du 9 janvier 2009, le préfet de l'Yonne a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois ; que, le 13 décembre 2012, M. B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 6 février 2013, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 16 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur le refus de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7./ L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que M. B...soutient résider de manière continue en France depuis son entrée en août 2002 ; qu'il justifie par les pièces du dossier d'un séjour continu d'août 2002 à juillet 2010, séjour qui n'est d'ailleurs pas contesté par le préfet du Rhône ; que, s'agissant de la période comprise entre juillet 2010, date à laquelle il a quitté le logement qu'il occupait à la communauté Emmaüs de Pontigny à septembre 2011, M.B..., qui indique avoir vécu sans domicile fixe à Lyon, ne produit que des attestations peu précises et un courrier daté de novembre 2010 d'une députée de l'Yonne sollicitant une mesure de régularisation auprès du préfet suite au refus de renouvellement de son titre de séjour, survenu près de deux ans auparavant, qui ne sont pas de nature à établir la présence continue de M. B...durant cette période ; que, dans ces conditions, M. B... ne justifiant pas résider en France depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse, le préfet du Rhône n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour ; que, par ailleurs, compte tenu des conditions du séjour en France de l'intéressé, qui est célibataire et sans attaches familiales, et alors même qu'il a travaillé pendant la période lors de laquelle il a bénéficié d'un titre de séjour et qu'il a présenté à l'appui de sa demande une promesse d'embauche comme mécanicien, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B...sur le fondement des dispositions précitées ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...est célibataire et sans enfant ; qu'il ne justifie pas disposer d'attaches familiales en France ; que, s'il fait valoir qu'il a quitté son pays, où résident ses parents et ses deux frères, à l'âge de 23 ans, il ne justifie pas d'un séjour continu en France depuis 2002, ainsi qu'il a été dit ; que, dans ces conditions, et compte tenu des conditions de son séjour en France, le préfet du Rhône n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision et n'a pas méconnu les stipulations précitées ; qu'il n'a pas, non plus, entaché son refus d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

5. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. " ;

6. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que, si la motivation de l'interdiction de retour doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;

7. Considérant qu'il ressort des termes de l'arrêté litigieux que le préfet du Rhône, pour prendre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français, a examiné les quatre critères énoncés par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, alors même qu'il n'a pas considéré que M. B...représentait une menace pour l'ordre public ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a fait l'objet de deux mesures d'éloignement, en 2006 et 2009, qu'il n'a exécuté cette dernière qu'en 2010, qu'il est dépourvu d'attaches familiales en France et qu'il ne justifiait, à la date de la décision litigieuse, que d'un séjour en France inférieur à deux années ; que, dans ces conditions, le préfet du Rhône a pu légalement, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, décider d'assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour d'une durée d'une année ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 janvier 2015.

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N° 13LY02750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02750
Date de la décision : 06/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : MATARI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-01-06;13ly02750 ?
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