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30/12/2014 | FRANCE | N°14LY01885

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 30 décembre 2014, 14LY01885


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2014, présentée pour Mme C...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308098 du 4 février 2014, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 4 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination ;

2°) d'annuler ces décisions du préfet du Rhône en date du 4 octobre

2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans le dé...

Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2014, présentée pour Mme C...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308098 du 4 février 2014, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 4 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination ;

2°) d'annuler ces décisions du préfet du Rhône en date du 4 octobre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français et du refus de titre de séjour pour illégalité externe, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer, dans les huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à nouvelle instruction de sa demande, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de fixer le délai de nouvelle instruction de son dossier à deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

6°) à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la seule décision fixant le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Rhône de l'assigner à résidence ;

7°) dans tous les cas, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à charge pour Me Hassid de renoncer à la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle ;

Mme B...soutient que :

- le tribunal administratif a statué infra petita dès lors qu'il n'a pas examiné les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'erreur de droit commise par le préfet quant à l'absence de moyens d'existence dans le pays d'origine ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une illégalité externe tirée du défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

- le refus de titre méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il est entaché d'erreur de droit dès lors que les pièces qu'elle a produites montrent qu'elle n'a pas de ressources propres ;

- le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions et méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire méconnaît les dispositions des articles 3 et 7 de la directive " retour ", de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 6 mars 2014 accordant à Mme B...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance du 20 octobre 2014 fixant la clôture d'instruction au 4 novembre 2014 ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 décembre 2014, présenté par le préfet du Rhône et non communiqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2014 :

- le rapport de Mme Gondouin, rapporteur,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- et les observations de Me Hassid, avocat de MmeB... ;

1. Considérant que MmeB..., de nationalité bosnienne, relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lyon du 4 février 2014 rejetant sa demande tendant à l'annulation des décisions du 4 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français en lui impartissant un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que Mme B...soutient que le Tribunal administratif de Lyon a omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a pas répondu à ce moyen qui n'était pas inopérant ; que, par suite, le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer sur ce point et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et de statuer par la voie de l'effet dévolutif sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

Sur la décision de refus de titre de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° À l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant est âgé de dix-huit à vingt-et-un ans (...) ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge, sous réserve qu'ils produisent un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; (...) " ; que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions est motivée d'une part par le fait que Mme B...ne produit pas de visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois, d'autre part par la circonstance qu'elle ne prouve pas être dépourvue de moyens d'existence dans son pays d'origine ; que Mme B...ne conteste pas ne pas avoir produit de visa de long séjour exigé par le 2° de l'article précité ; qu'elle ne satisfait donc pas à l'une des deux conditions, cumulatives, posées par cet article pour pouvoir bénéficier de plein droit d'une carte de résident ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le préfet aurait tout à la fois méconnu les dispositions du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis une erreur de droit ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que MmeB..., née en décembre 1952, est entrée en France en janvier 2013 et a sollicité quelques semaines après son arrivée un titre de séjour ; que si ses deux fils vivent en France avec leur famille, l'un ayant obtenu la nationalité française et l'autre le statut de réfugié, Mme B...n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 60 ans ; qu'elle n'établit pas être totalement dépourvue de ressources ni se trouver dans l'impossibilité de vivre sans sa famille la plus proche ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ses fils ne peuvent lui apporter un soutien financier en Bosnie ni qu'il lui serait impossible de revenir en France pour de courts séjours ; que, dès lors, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation de MmeB... ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions pour l'obtention d'un titre de séjour et non de tous les étrangers qui s'en prévalent ; que Mme B...ne remplissant pas les conditions pour la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet du Rhône n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant que les moyens tirés de ce que la décision obligeant le requérant à quitter le territoire serait illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention précitée et de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés, compte tenu de ce qui précède ;

Sur la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

8. Considérant, en premier lieu, que, d'une part, les dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE qui fixent à trente jours la limite supérieure du délai de départ volontaire et permettent aux États, si nécessaire, de prolonger ce délai d'une durée appropriée, ont été transposées par l'article 37 de la loi du 16 juin 2011 susvisée et figurent désormais dans l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'autre part, les dispositions de l'article 5 de la même directive se bornent à imposer aux États membres de tenir compte notamment, lors de la mise en oeuvre de celle-ci, de la vie familiale ; que MmeB..., qui ne soutient pas que les dispositions de l'article L. 511-1 du code précité sont incompatibles avec les dispositions de la directive, n'invoque aucune circonstance particulière de nature à faire regarder comme insuffisant le délai de départ de trente jours qui lui est accordé ;

9. Considérant, en second lieu, qu'en invoquant ses attaches familiales en France, son âge, son rôle auprès de ses petits-enfants, MmeB..., comme l'ont relevé les premiers juges, ne démontre pas que le départ de délai volontaire de trente jours serait manifestement insuffisant mais conteste le principe même de son éloignement ; qu'eu égard à la brève durée de son séjour en France, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

10. Considérant, en premier lieu, que doit être écarté, pour les motifs qui précèdent, le moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en second lieu, que, comme l'ont relevé les premiers juges, Mme B...n'apporte aucune précision à l'appui de ses moyens tirés de ce qu'il lui serait impossible de retourner dans son pays d'origine ; que si elle fait valoir que son dernier fils a obtenu le statut de réfugié alors qu'elle se trouvait en France, elle n'établit pas qu'elle encourrait personnellement des risques en cas de retour dans son pays ; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que doit être également écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la même convention ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du préfet du Rhône en date du 4 octobre 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour ; qu'elle n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté le surplus de ses conclusions ; que ses conclusions à fin d'injonction et de mise à la charge de l'État des frais exposés et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 4 février 2014 est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour.

Article 2 : La demande de Mme C...E...veuve B...devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme E...veuve B...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...E...veuve B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2014 où siégeaient :

- M. Mesmin d'Estienne, président assesseur,

- Mme Gondouin et Mme D...A..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2014.

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14LY01885


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01885
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : HASSID

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-30;14ly01885 ?
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