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30/12/2014 | FRANCE | N°14LY01840

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 30 décembre 2014, 14LY01840


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2014 et les pièces complémentaires enregistrées le 26 juin 2014, présentées pour M. A... B..., demeurant... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308543 du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 15 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il sera reconduit ;
>2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2014 et les pièces complémentaires enregistrées le 26 juin 2014, présentées pour M. A... B..., demeurant... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308543 du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 15 juillet 2013 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an, portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé avec droit au travail dans un délai de huit jours suivant notification de l'arrêt, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

M. B...soutient que ;

S'agissant de la décision lui refusant le droit au séjour :

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, dès lors que, présent en France depuis 7 ans, il établit avoir eu l'autorité parentale conjointe sur sa fille, née en France en 2007 d'un premier mariage avec une ressortissante en situation de séjour régulier, et s'en être occupé ; que la personne dont il avait divorcé et avec laquelle il a repris une vie commune, puis avec laquelle il s'est remarié le 31 mai 2014, réside régulièrement en France depuis 2002, aujourd'hui sous couvert d'une carte de résident et ne saurait retourner en Algérie compte tenu de son état de santé ; qu'il établit s'occuper de sa fille, régulièrement scolarisée depuis le 1er septembre 2009 et à l'entretien de laquelle il pourvoit financièrement ;

- la décision contestée méconnaît les termes de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 dont il peut se prévaloir dès lors qu'il répond aux conditions édictées par celle-ci pour pouvoir bénéficier d'une régularisation ;

- la décision contestée méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que son départ l'éloignerait de sa fille qui a vocation à demeurer en France ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle fixant le pays de destination :

- elles sont illégales en ce qu'elles sont fondées sur des décisions illégales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 14 août 2014 fixant la clôture d'instruction au 15 septembre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative;

Vu le mémoire, enregistré le 2 décembre 2014, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 500 euros soit mise à la charge de M. B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu l'ordonnance en date du 2 décembre 2014 rouvrant l'instruction jusqu'au 7 décembre 2014 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 décembre 2014, présenté pour M. B...qui conclut aux mêmes fins que par sa requête par la reprise des mêmes moyens ; M. B...conclut, en outre, au rejet des conclusions du préfet du Rhône présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. B...soutient que le préfet du Rhône n'est pas fondé à demander qu'une somme de 500 euros soit mise à sa charge en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la décision du 12 mai 2014, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2014 le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur ;

1. Considérant que M. A... B..., né le 4 avril 1971 à Guelma (Algérie), de nationalité algérienne, est entré en France le 16 avril 2006, sous couvert d'un visa de court séjour ; que la décision du 7 décembre 2010 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour a été annulée le 31 mars 2011 par le Tribunal administratif de Grenoble ; que M. B...a à nouveau sollicité, le 29 avril 2013, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de sa vie privée et familiale ainsi que sur le fondement de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ; que, par décisions en date du 15 juillet 2013, le préfet du Rhône qui a instruit cette demande, a néanmoins rejeté sa demande de carte de résident algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ; que M. B...demande l'annulation du jugement n° 1308543, du 18 février 2014, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 15 juillet 2013 ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. /Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;/ (...)/ " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant, d'une part, que le requérant fait valoir comme devant le tribunal qu'il est établi en France depuis sept ans et est père d'une fille scolarisée, née en France le 10 mai 2007 et sur laquelle il exerce l'autorité parentale conjointe ; qu'ainsi, la décision attaquée porte atteinte au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tire des stipulations de l'articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; que, cependant, si M. B... soutient avoir contribué effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille et avoir exercé son droit de visite, les pièces qu'il produit pour établir ces faits, telles que des billets de train pour Vesoul ou diverses factures d'achats, datent pour l'essentiel de l'année 2010 ; que les seules pièces portant sur une période proche de celle durant laquelle la décision attaquée a été prise sont une attestation insuffisamment probante de Mme C...dont il a divorcé le 5 juillet 2011 ainsi que la copie de 8 mandats cash dont trois seulement sont antérieurs au 15 juillet 2013, date de la décision attaquée ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que M. B... n'est entré en France qu'à l'âge de 35 ans et qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère et des frères et soeurs ;

4. Considérant, d'autre part, que si M. B...fait valoir à présent qu'une communauté de vie a été une nouvelle fois constituée entre Mme C...et lui-même, qu'il produit dans ses dernières écritures la copie de l'acte du nouveau mariage qu'il a contracté avec celle-ci le 31 mai 2014, et qu'il soutient qu'il contribue désormais pleinement à l'éducation de l'enfant né de leur union, cette reprise de la vie commune est, en tout état de cause, postérieure à la décision attaquée ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par M. B... de ce que le refus de titre de séjour attaqué porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale et aux droits de l'enfant une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les dispositions précitées doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

6. Considérant toutefois que la décision attaquée n'a pas pour objet de séparer la jeune D...B...de ses parents, tous deux ressortissants algériens, et dont elle a, elle-même, la nationalité ; que le moyen tiré de la violation des stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit, par suite, être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que si, en se référant aux situations administratives décrites dans un texte non réglementaire émanant de l'administration, le demandeur peut être regardé comme invoquant le principe d'égalité, il résulte du caractère gracieux et exceptionnel d'une mesure de régularisation que le préfet ne saurait être tenu de faire droit à une demande de régularisation ou de régulariser la situation administrative d'un étranger ; que, pour contester l'appréciation faite par l'administration de sa situation particulière, l'étranger ne peut donc utilement faire valoir ni qu'il est placé dans une situation administrative semblable à celle d'un autre étranger ni que sa situation entrerait dans les prévisions d'une circulaire ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour au requérant n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen soulevé à l'encontre de la décision d'éloignement et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la précédente décision, doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;

11 Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par M. B...doivent, par suite, être rejetées ;

14. Considérant, en second lieu, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. B...à verser à l'Etat la somme qu'il demande au titre des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 décembre 2014.

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N° 14LY01840


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01840
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : BERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-12-30;14ly01840 ?
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