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27/11/2014 | FRANCE | N°14LY02647

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2014, 14LY02647


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 août 2014, présentée pour Mme A... B...épouseD..., domiciliée ...;

Elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400543 et 1400597 du 22 mai 2014, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision en date du 20 décembre 2013 par laquelle le préfet de la Nièvre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et des décisions en date du 22 janvier 2014 par lesquelles ledit préfet lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obliga

tion de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le p...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 août 2014, présentée pour Mme A... B...épouseD..., domiciliée ...;

Elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1400543 et 1400597 du 22 mai 2014, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision en date du 20 décembre 2013 par laquelle le préfet de la Nièvre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et des décisions en date du 22 janvier 2014 par lesquelles ledit préfet lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de faire injonction au préfet de la Nièvre de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étranger malade et à titre subsidiaire, de lui délivrer une carte de séjour mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour elle de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

- les décisions de refus de titre ont été prises par une autorité incompétente ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'une prise en charge de ses problèmes psychiatriques ne peut sérieusement être effectuée dans son pays d'origine ;

- elle craint d'être, avec ses enfants, persécutés dans son pays en raison de ses opinions politiques et de celles de son père et de son mari ;

- les mêmes difficultés psychologiques affectent ses enfants ;

- son état de grossesse fait obstacle à une mesure d'éloignement à destination de son pays ;

- ces refus de titre méconnaissent les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 30 septembre 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme D... ;

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative l'affaire a été dispensée d'instruction ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique, et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour son application ;

Vu le code de justice administrative ;

Mme D... a été régulièrement avertie du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2014 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme D..., ressortissante de la République démocratique du Congo née en 1982, est entrée irrégulièrement en France le 1er février 2012 selon ses déclarations ; qu'elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 décembre 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2013 ; qu'elle a obtenu le 7 août 2013 une autorisation provisoire de séjour d'une durée de six mois en raison de son état de santé ; qu'elle a sollicité le 4 décembre 2013 la délivrance d'un nouveau titre de séjour compte tenu de son état de santé ; que, par une décision du 20 décembre 2013, le préfet de la Nièvre a refusé de lui délivrer un titre de séjour et, par des décisions du 22 janvier 2014, ledit préfet lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, Mme D... relève appel du jugement du 22 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions ;

2. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de ce que les décisions lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ont été signées par une autorité incompétente ne diffère pas de celui soulevé en première instance ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par adoption des motifs des premiers juges, il doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...). " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 17 décembre 2013 que si l'état de santé de Mme D... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que les éléments produits par la requérante, notamment une attestation faisant état d'un suivi au centre hospitalier de Nevers au sein d'un " groupe de parole victimes ", ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le préfet, au vu de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, quant à la circonstance qu'un défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;

5. Considérant, par ailleurs, que, si Mme D... soutient que son fils Benaja, né le 26 octobre 2003, est inscrit depuis le 15 novembre 2013 au centre médico-psycho-pédagogique de Nevers et se prévaut de l'attestation du médecin directeur de cet organisme produit devant les premiers juges et en appel mentionnant que " des éléments

post-traumatiques et une angoisse d'abandon, réactionnels à son vécu familial passé et aux événements dont l'enfant a pu être témoin dans son pays ", cette même attestation précise également que l'enfant est " médicalement en bon état général " et il ne ressort d'aucune pièce du dossier que son état de santé implique sa présence et celle de la requérante sur le territoire français ;

6. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de grossesse de Mme D...ferait obstacle à une mesure d'éloignement ni qu'une telle mesure serait susceptible de compromettre la santé de la requérante ;

7. Considérant qu'il s'ensuit que le préfet n'a ni méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur la situation personnelle de la requérante et celle de ses enfants au regard de leur état de santé ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...)7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant que Mme D... fait valoir qu'elle est mère de cinq enfants qui sont tous, à l'exception du plus jeune, scolarisés, qu'elle était enceinte depuis le 18 novembre 2013 et que le père de l'enfant qu'elle attendait réside en France ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que Mme D... ne pourrait reconstituer avec ses enfants leur cellule familiale hors de France et notamment dans leur pays ni que ces derniers ne pourraient y poursuivre leur scolarité ; que la requérante ne produit en outre aucun élément d'information concernant le père de l'enfant qu'elle attendait, notamment sa situation, sa résidence en France et ses liens entretenus avec la requérante ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de la requérante sur le territoire français est indispensable en raison de son état de santé ; que dans ces conditions, et eu égard aux conditions de son séjour en France et à la durée de sa présence sur le territoire français, le préfet n'a pas, par les décisions contestées portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée de mener une vie privée et familiale normale par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises ; que ces décisions n'ont ainsi méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que ce texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

11. Considérant que Mme D... soutient qu'elle est persécutée dans son pays en raison de ses opinions politiques et de celles de son père et de son mari au sein de l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social, que son père a été tué en 1999 par des opposants politiques, que son mari a été agressé en 2011, que quelques jours plus tard ils ont été agressés à leur domicile et qu'elle est sans nouvelle de son mari depuis le 28 novembre 2011 ; que toutefois la requérante ne produit aucun élément établissant qu'elle encourt des risques pour sa vie et sa liberté en cas de retour dans son pays ; que, par suite, en fixant la République démocratique du Congo comme pays de renvoi, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouseD..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. Segado et MmeC..., premiers conseillers,

Lu en audience publique, le 27 novembre 2014.

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N° 14LY02647


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02647
Date de la décision : 27/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SCP BON - DE SAULCE LATOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-11-27;14ly02647 ?
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