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21/10/2014 | FRANCE | N°13LY01449

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 21 octobre 2014, 13LY01449


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour M. B...A...domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003059 en date du 10 avril 2013 du tribunal administratif de Grenoble ayant rejeté sa demande tendant à la condamnation de La Poste à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il a subi en raison du blocage de sa carrière ;

2°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 75 000 euros en réparation du préjudice matériel et moral subi à raison de la perte de chance d'avoir été promu ;
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Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2013, présentée pour M. B...A...domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003059 en date du 10 avril 2013 du tribunal administratif de Grenoble ayant rejeté sa demande tendant à la condamnation de La Poste à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il a subi en raison du blocage de sa carrière ;

2°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 75 000 euros en réparation du préjudice matériel et moral subi à raison de la perte de chance d'avoir été promu ;

3°) de condamner La Poste à lui verser une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- il était inscrit en 1992 au tableau principal d'avancement au grade de conducteur chef du transbordement, en 5ème position sur 6, mais non promu, et pouvait, dès lors, et dans la mesure où il n'avait donné aucune réponse sur sa reclassification dans le délai d'un mois prévu par le décret n° 93-517 du 25 mars 1993, se voir proposer des nominations à ce grade jusqu'en 1995, en application du décret n° 90-751 du 22 août 1990 ;

- l'absence volontaire de tableaux d'avancement au cours des années 1993, 1994 et 1995 lui a causé un préjudice à raison de ses chances sérieuses d'avancement dans le corps de conducteur chef du transbordement au cours de ces années ;

- le tribunal administratif de Grenoble, en mettant l'accent uniquement sur le tableau d'avancement de 1992 sans faire état de ses chances sérieuses d'avancement en 1993, 1994 et 1995, a commis une erreur ;

- en l'intégrant dans un corps de reclassification alors qu'il n'avait pas donné son accord, La Poste a commis une illégalité susceptible d'engager sa responsabilité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2013, présenté pour la société anonyme (SA) La Poste, représentée par son président directeur général en exercice, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A...à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- M. A...a accepté son intégration dans un corps de reclassification ;

- elle n'a commis aucune faute dans la gestion de la carrière de M.A..., dès lors qu'il ne pouvait plus être promu dans un corps de reclassement à compter de la date de son intégration définitive dans un corps de reclassification, laquelle s'est d'ailleurs accompagnée d'une promotion avec effets pécuniaires, et où il a poursuivi normalement sa carrière ;

- l'intéressé ne démontre pas que sa valeur professionnelle justifiait qu'il soit promu ;

- les conclusions indemnitaires du requérant sont irrecevables, comme présentées après l'expiration du délai de deux mois suivant l'introduction de sa demande de première instance ; en tout état de cause, elles sont infondées pour les motifs indiqués précédemment ; le fait d'avoir été intégré dans un corps de reclassification ne lui a pas porté préjudice, en ce qu'il a pu poursuivre normalement sa carrière en bénéficiant, le cas échéant, de promotions, alors que tel ne fut pas le cas de ses collègues reclassés ;

Vu l'ordonnance en date du 2 décembre 2013 fixant la clôture d'instruction au 20 décembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

Vu le décret n° 57-1319 du 21 décembre 1957 ;

Vu le décret n° 90-751 du 22 août 1990 ;

Vu le décret n° 93-517 du 25 mars 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 21 du décret du 25 mars 1993 susvisé : " Pendant une période de cinq ans à compter de la date d'effet du présent décret, les fonctionnaires de La Poste et de France Télécom qui exercent l'une des fonctions correspondant à l'un des grades des corps régis par le présent décret, telle que cette correspondance est établie comme il est dit à l'article 4 ci-dessus, ont vocation à être intégrés dans ce grade. (...) Chaque exploitant public, après avis de la commission paritaire spéciale d'intégration, notifie aux fonctionnaires remplissant les conditions fixées au premier alinéa ci-dessus une proposition d'intégration. Un délai d'option d'une durée d'un mois à compter de la date à laquelle ils reçoivent notification de cette proposition est ouvert aux intéressés pour accepter cette intégration. L'intégration est prononcée par décision du président du conseil d'administration de l'exploitant public concerné. " ; que selon l'article 22 du même texte : " Les décisions d'intégration prennent effet à la date du présent décret, en ce qui concerne les fonctionnaires exerçant à cette même date les fonctions définies au premier alinéa de l'article 21 ci-dessus, et à la date d'attribution de ces mêmes fonctions pour les autres fonctionnaires. / Les fonctionnaires intégrés dans les corps créés par le présent décret sont classés dans leur nouveau grade en application des tableaux de conversion figurant en annexe au présent décret. / Les services effectifs accomplis dans le grade d'origine sont assimilés à des services accomplis dans le grade d'intégration. (...). " ; que son article 24 dispose : " Le ministre d'Etat, ministre de la fonction publique et des réformes administratives, le ministre du budget et le ministre des postes et télécommunications sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, sera publié au Journal officiel de la République française et qui prend effet au 1er juillet 1993 en ce qui concerne le corps des agents de maîtrise, techniques et de gestion de La Poste et au 31 décembre 1993 en ce qui concerne le corps des collaborateurs et agents de maîtrise de France Télécom. " ;

2. Considérant que les fonctionnaires en service au ministère chargé de la poste et des télécommunications antérieurement à la réforme effectuée par la loi du 2 juillet 1990 ont été intégrés d'office dans de nouveaux corps, dits de " reclassement ", créés au sein de La Poste et de France Télécom, par l'effet de décrets statutaires pris pour l'application de la loi du 2 juillet 1990 ; que ces décrets ont modifié ou remplacé et abrogé les décrets statutaires qui régissaient auparavant les corps des fonctionnaires de l'ancienne administration des postes et télécommunications ; que des décrets ultérieurs ont fixé les statuts particuliers de nouveaux corps dits de " reclassification " ; que les fonctionnaires appartenant aux corps de " reclassement " ont eu le choix d'opter pour l'intégration, selon une procédure spécifique, dans les nouveaux corps de " reclassification " ou de demeurer dans les corps et grades de " reclassement " ; qu'ainsi, les anciens corps de fonctionnaires du ministère chargé de la poste et des télécommunications ont été supprimés après l'entrée en vigueur de la loi du 2 juillet 1990, et les fonctionnaires issus de l'ancienne administration des postes et télécommunications ont été intégrés dans un corps de " reclassement ", puis, le cas échéant sur leur demande, dans un corps de " reclassification " ;

3. Considérant qu'il ressort de la " notification de situation administrative à reclassification " adressée le 17 mars 1994 par le directeur de La Poste à M.A..., conducteur de travaux de la distribution, que ce dernier a, en application des dispositions précitées du décret du 25 mars 1993, fait l'objet d'une reclassification dans le grade d'agent de maîtrise de La Poste, qui a pris effet le 1er juillet 1993 ; que M.A..., qui n'a pas contesté cette décision d'intégration, laquelle se réfère expressément à son " acceptation en date du 15 mars 1994 ", n'établit pas que sa reclassification est intervenue sans son consentement ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (...). " ; qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion de postes susceptibles d'être proposés au personnel appartenant déjà à l'administration (...), non seulement par voie de concours (...) mais aussi par la nomination de fonctionnaires (...) suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Examen professionnel ; / 2° Liste d'aptitude établie après avis de la commission paritaire du corps d'accueil (...). " ; qu'aux termes de l'article 21 du décret du 21 décembre 1957 susvisé : " Les conducteurs chefs du transbordement sont recrutés : 1° Par concours (...) ; 2° Au choix, par voie d'inscription sur une liste d'aptitude et dans la limite du sixième des titularisations prononcées en application du 1° ci-dessus, parmi les conducteurs de travaux de la distribution et de l'acheminement âgés de quarante-cinq ans au moins et ayant atteint au moins le 7e échelon de leur grade ; ces candidats doivent, en outre, compter au moins deux ans de services effectifs à la distribution ou à l'acheminement. " ; que selon l'article 4 du décret du 22 août 1990 susvisé : " Pendant une période de cinq ans à compter de la date de publication du présent décret et par dérogation aux dispositions de l'article 21 du décret du 21 décembre 1957 susvisé, les conducteurs chefs du transbordement pourront être recrutés au choix, par voie d'inscription sur une liste d'aptitude, dans la limite de 60 p. 100 du nombre d'emplois à pourvoir, parmi les conducteurs de travaux de la distribution et de l'acheminement remplissant les conditions prévues au 2° dudit article 21. " ;

5. Considérant que M. A...soutient qu'il a subi un préjudice de carrière en ne bénéficiant pas, avant sa reclassification, d'une promotion au choix au grade de conducteur chef du transbordement et de l'acheminement, ce qui lui aurait permis d'être " reclassifié " en application du tableau de conversion n° 25 et non du tableau n° 27 et de terminer sa carrière non au 11ème mais au 12ème échelon et de bénéficier, par conséquent, d'un niveau de rémunération correspondant à l'indice brut 612, et non 588 ;

6. Considérant que, si la possibilité offerte aux fonctionnaires qui sont demeurés dans les corps dits de " reclassement " de La Poste de bénéficier, au même titre que les fonctionnaires ayant choisi d'intégrer les nouveaux corps dits de " reclassification " créés en 1993, de mesures de promotion organisées en vue de pourvoir des emplois vacants proposés dans ces corps de " reclassification ", ne dispensait pas le président de La Poste de faire application des dispositions de la loi du 11 janvier 1984 relatives au droit à la promotion interne dans le cadre des corps de " reclassement ", il est constant que M. A...a cessé de faire partie du corps des conducteurs de travaux de la distribution, dont seuls les membres peuvent faire l'objet d'une promotion au choix au grade de conducteurs chefs du transbordement et de l'acheminement sous réserve qu'ils remplissent les conditions fixées par le décret statutaire du 21 décembre 1957, à compter de son intégration dans le corps de reclassification des agents de maîtrise, le 1er juillet 1993, où il a poursuivi normalement sa carrière ; que, dès lors, M.A..., qui ne conteste pas la décision de son employeur de ne pas l'inscrire au tableau d'avancement en 1992 et ne produit aucun élément de nature à démontrer une perte de chance d'être inscrit au tableau d'avancement pour 1993, ne saurait utilement faire valoir qu'il n'a pu bénéficier d'un avancement au choix au grade de conducteur chef du transbordement et de l'acheminement entre 1993 et 1995, faute pour La Poste d'avoir mis en place un dispositif de promotion interne à ces dates, alors qu'il en remplissait les conditions ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, si l'un des collègues de M. A...a été promu conducteur chef de transbordement avant sa reclassification dans le corps des agents de maîtrise et a terminé sa carrière à un échelon et un indice plus élevés que M.A..., cette circonstance est sans influence sur le droit à indemnisation de ce dernier ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subi ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel par La Poste, que M. A...n'est pas fondé soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à M. A...une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions pour mettre à la charge de M. A...une somme de 200 euros au profit de La Poste ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la Poste.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2014 à laquelle siégeaient :

M. Martin, président de chambre,

Mme Courret, président-assesseur,

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 octobre 2014.

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N° 13LY01449


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01449
Date de la décision : 21/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTIN
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : THIANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-10-21;13ly01449 ?
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