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30/09/2014 | FRANCE | N°13LY02148

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 30 septembre 2014, 13LY02148


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2013, présentée pour la SCEA de Dompierre, dont le siège est 3272, route d'Attignat à Polliat (01310) ;

La SCEA de Dompierre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100107 du tribunal administratif de Lyon du 4 juin 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2010 par lequel le maire de la commune de Polliat (Ain) a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'extension d'un bâtiment existant et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annul

er cet arrêté et cette décision ;

3°) de condamner la commune de Polliat à lui vers...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2013, présentée pour la SCEA de Dompierre, dont le siège est 3272, route d'Attignat à Polliat (01310) ;

La SCEA de Dompierre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100107 du tribunal administratif de Lyon du 4 juin 2013 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2010 par lequel le maire de la commune de Polliat (Ain) a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'extension d'un bâtiment existant et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;

3°) de condamner la commune de Polliat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SCEA de Dompierre soutient que :

- dès lors que le délai d'instruction de la demande de permis de construire n'a pu être légalement majoré et, qu'en conséquence, s'applique le délai de droit commun de trois mois, elle s'est trouvée titulaire d'un permis de construire tacite à l'issue de ce délai, soit le 3 juin 2010, et, dès lors, l'arrêté litigieux a eu pour effet de retirer ce permis tacite, et ce sans qu'elle ait été préalablement mise en mesure, conformément à ce qu'impose l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, de faire valoir ses observations ;

- le projet, qui a pour objet d'édifier une construction destinée à stocker du fourrage, laquelle est directement liée et nécessaire à son activité agricole, est dès lors conforme aux dispositions applicables à la zone A du plan local d'urbanisme ;

- le maire a entaché sa décision d'inexactitude matérielle des faits et d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que le projet entraîne des risques pour la sécurité publique sur la voie communale n° 4 ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 octobre 2013, présenté pour la commune de Polliat, représentée par son maire, qui demande à la cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la SCEA de Dompierre à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Polliat soutient que :

- les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés ;

- le projet litigieux ne répond pas aux dispositions de l'article A 13-3 du règlement du plan local d'urbanisme, qui imposent des écrans de verdure ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 4 novembre 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 décembre 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2014 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Brocheton, avocat de la SCEA de Dompierre, et celles de Me Chevalier, avocat de la commune de Polliat ;

1. Considérant que, par un jugement du 4 juin 2013, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de la SCEA de Dompierre tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2010 par lequel le maire de la commune de Polliat a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'extension d'un bâtiment existant et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ; que cette société relève appel de ce jugement ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 423-19 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. " ; qu'aux termes de l'article R. 423-23 du même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : / (...) b) Deux mois pour les demandes (...) de permis de construire portant sur une maison individuelle (...) ; / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 423-25 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le délai d'instruction prévu (...) est majoré de deux mois (...) lorsqu'il y a lieu d'instruire une dérogation en application du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime. / " ; qu'aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction (...), le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : / (...) b) Permis de construire (...). " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes. " ; qu'aux termes du 4ème alinéa du même article : " Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, une distance d'éloignement inférieure peut être autorisée par l'autorité qui délivre le permis de construire, après avis de la chambre d'agriculture, pour tenir compte des spécificités locales. Une telle dérogation n'est pas possible dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application du deuxième alinéa. " ; qu'aux termes de l'article 157 du règlement sanitaire départemental de l'Ain, relatif aux silos destinés à la conservation par voie humide des aliments pour animaux : " Les prescriptions de cet article s'appliquent aux stockages de fourrage et autres aliments à l'exclusion de la conservation par voie sèche des foins et des luzernes et du stockage des aliments présentés sous forme de farines ou de granulés. / (...) " ;

4. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée

du 12 avril 2000 : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) " ;

5. Considérant qu'à la suite du dépôt le 23 janvier 2010 de sa demande de permis de construire, la SCEA de Dompierre a été informée par le service instructeur, par un courrier du 4 février 2010, que le projet ne respectant pas la distance d'implantation, le délai d'instruction de sa demande devait être prolongé de deux mois pour être porté de trois à cinq mois, en raison de la nécessité de consulter la chambre d'agriculture en application de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime ; qu'il est constant que la demande de permis, initialement incomplète, a été complétée le 3 mars 2010 et que le délai d'instruction a couru à compter de cette date ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la déclaration effectuée le 13 avril 2010 par la SCEA de Dompierre au ministère de l'agriculture en vue de l'obtention d'une indemnité pour abandon de production laitière, des constatations effectuées

le 3 juin 2010 par le garde-champêtre de la commune de Polliat et du dépôt par ladite société le 25 août 2010 auprès de la préfecture de l'Ain d'un dossier de déclaration pour la création d'une installation classée de stockage de grains, que le projet en litige, présenté dans la demande de permis de construire comme visant à étendre un bâtiment existant pour réaliser du " stockage - fourrage ", a plus précisément pour objet de stocker des grains livrés par camions, en vue de leur traitement et de leur commercialisation ultérieure ; qu'ainsi, contrairement à ce que le tribunal a estimé, l'article 157 du règlement sanitaire départemental de l'Ain, qui exclut de son champ d'application le stockage par voie sèche et celui des aliments présentés sous forme de granulés, n'est pas applicable en l'espèce ; que, par suite, les règles d'éloignement par rapport aux immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers imposées par cet article n'avaient pas à être respectées par le projet ; que, par ailleurs, la prolongation du délai d'instruction prévue par les dispositions précitées de l'article R. 423-25 du code de l'urbanisme dans l'hypothèse dans laquelle il y a lieu d'instruire une dérogation à une règle de distance, en application du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, n'est applicable, aux termes mêmes de ce dernier article, que dans l'hypothèse dans laquelle le projet porte lui-même sur une habitation ou un immeuble habituellement occupé par des tiers, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; que, dans ces conditions, la SCEA de Dompierre est fondée à soutenir que la prolongation susmentionnée du délai d'instruction étant illégale, elle s'est trouvée titulaire d'un permis de construire tacite à l'issue du délai d'instruction de droit commun de trois mois, soit le 3 juin 2010, et, qu'en conséquence, l'arrêté litigieux a eu pour effet de retirer implicitement ce permis tacite ; que, par suite, dès lors qu'il est constant qu'aucune procédure contradictoire n'a été mise en oeuvre avant l'intervention de cet arrêté, cette société est également fondée à soutenir que l'article 24 précité de la loi du 12 avril 2000 a été méconnu ; que ce vice de procédure est substantiel, dès lors qu'en l'absence de toute circonstance particulière, la société requérante a effectivement été privée de la garantie ainsi prévue par la loi ;

7. Considérant que les dispositions du 3) de l'article A 13 du règlement du plan local d'urbanisme, selon lesquelles : " des écrans de verdure (...) peuvent être imposés pour masquer certains bâtiments ou installations d'activités admises dans la zone ", autorisent seulement le maire à édicter une prescription spéciale ; que le maire ne pouvait dès lors légalement fonder le refus de permis de construire litigieux sur ces dispositions ;

8. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation des décisions attaquées ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCEA de Dompierre est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 30 juillet 2010 par lequel le maire de la commune de Polliat a refusé de lui délivrer un permis de construire et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SCEA de Dompierre, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Polliat la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme au bénéfice de cette société sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 juin 2013 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 30 juillet 2010 par lequel le maire de la commune de Polliat a refusé de délivrer un permis de construire à la SCEA de Dompierre et la décision implicite de rejet du recours gracieux de cette société sont annulés.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA de Dompierre et à la commune de Polliat.

Copie en sera transmise au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey , premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 septembre 2014.

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13LY02148

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02148
Date de la décision : 30/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BCV AVOCATS ASSOCIES - BROCHETON - COMBARET - VIAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-09-30;13ly02148 ?
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