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30/09/2014 | FRANCE | N°13LY01574

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 30 septembre 2014, 13LY01574


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2013, présentée pour M. et Mme A...B..., domiciliés 173, rue de la Fontaine à Lumblin (38660) ;

M. et Mme B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902432 du 11 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y af

férentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'a...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2013, présentée pour M. et Mme A...B..., domiciliés 173, rue de la Fontaine à Lumblin (38660) ;

M. et Mme B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902432 du 11 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme B...soutiennent que :

- aucun des travaux cités par le Tribunal ne permet de qualifier les travaux en cause de travaux de reconstruction et n'a entraîné une modification notable du gros-oeuvre ;

- les travaux réalisés constituent des travaux de réparation et d'amélioration au sens des dispositions de l'article 31 du code général des impôts ;

- c'est à tort et par une méconnaissance des dispositions du 1er alinéa du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts et des paragraphes 2, 27, 28, 29 et 30 de la doctrine administrative 5 D-2224 du 10 mars 1999 et de la doctrine administrative 5 D-2225 du 10 mars 1999 que l'administration et les premiers juges ont refusé de prendre en considération les dépenses de travaux d'un immeuble inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques qu'ils ont rénové à Saint-Arnoult-en-Yvelines ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'économie et des finances soutient que :

- il ressort de l'état des lieux dressé selon le procès-verbal d'huissier du 2 novembre 2004 que l'immeuble constitué d'une succession de pièces inhabitables était en réalité dans un état de délabrement avancé ;

- il résulte de la déclaration modèle H1 déposée en 1984 par l'ancien propriétaire que la surface habitable n'était alors que de 85 m² alors qu'après réalisation de l'opération d'ensemble de réhabilitation, les locaux sont composés de six logements occupant une superficie totale de 431 m² ;

- les travaux effectués sur l'immeuble dont M. et Mme B...sont copropriétaires ont eu pour effet, dans le cadre d'une réhabilitation globale du bâtiment A, vétuste et inhabité, de rendre habitables, dans des conditions de confort moderne, des locaux qui ne l'étaient pas auparavant et ont eu, nécessairement, pour objet d'importants aménagements internes qui équivalent de par leur nature et leur importance à une reconstruction ;

- les travaux de réparation et d'amélioration réalisés à l'occasion des travaux de reconstruction et d'agrandissement procédant d'une opération d'ensemble indivisible demeurent indissociables et sont donc assimilés à ces derniers;

- aucune facture mentionnant le détail de la nature des travaux réellement supportés par les requérants n'a été produite ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 février 2014, présenté pour M. et Mme B...tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et, à titre subsidiaire, à l'instar de ce qui a été admis pour d'autres copropriétaires, à ce que soit admis, a minima, la déductibilité des dépenses de travaux réalisés sur les parties privatives, à hauteur de 84 292 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 avril 2014, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui maintient ses écritures précédentes ;

Le ministre de l'économie et des finances soutient que :

- la position prise à l'égard du lot appartenant au copropriétaire M. C...ne saurait être transposable aux lots acquis par M. et Mme B...dans le corps de bâtiment Sud ;

- si le pôle de contrôle et d'expertise de Grenoble a accepté de déduire certaines charges des revenus fonciers de MmeD..., il n'en a pas pour autant admis que les locaux étaient affectés à l'habitation avant l'engagement des travaux ;

- les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de l'erreur commise en faveur de Mme D... au stade contentieux pour revendiquer à leur profit la déduction de charges qui ne sont pas déductibles dès lors qu'elles ont été engagées dans des locaux qui n'étaient pas antérieurement affectés à l'habitation ;

- M. et Mme B...n'ayant pas été destinataires de la réponse aux observations du contribuable adressée à Mme D...ne sauraient l'opposer à l'administration pour se prévaloir d'une prise de position formelle au regard de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

- l'état descriptif de division du 29 novembre 2004 et l'acte du même jour par lequel M. et Mme B...ont acquis le lot n° 5 décrivent les lots à acquérir comme des " espaces à aménager en appartements " de sorte qu'ils ne peuvent être considérés comme déjà affectés à l'habitation ;

- les travaux financés par les requérants ont consisté à créer un logement de 95 m² à partir d'une surface non habitable ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 juillet 2014, présenté pour M. et Mme B...qui maintiennent leurs conclusions précédentes par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Samson, président-assesseur,

- les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public,

- et connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 12 septembre 2014, présentée pour M. et MmeB... ;

1. Considérant que le 17 mai 2005, Mme E...G...épouse séparée de biens de M. B...a acquis, au prix de 71 200 euros, le lot n° 5 correspondant à " un espace à aménager en appartement, situé au rez-de-chaussée et aux 1er et 2ème étages du bâtiment A " d'un ensemble immobilier dénommé " La Maison de la Grande Teinturerie " inscrit partiellement à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques par arrêté du 19 août 1975, situé 2 rue Basse à Saint-Arnoult en Yvelines ; que les acquéreurs des divers lots ont créé l'Association syndicale libre " Maison de la Grande Teinturerie ", afin de réaliser d'importants travaux de restructuration dans l'ensemble du bâtiment aboutissant à la création de six appartements indépendants et trois dépendances ; que M. et Mme B...ont déduit de leurs revenus fonciers au titre de l'année 2005 la somme de 275 942 euros correspondant aux dépenses de travaux engagés pour 270 115 euros, des intérêts d'emprunt pour 5 694 euros et de taxe foncière pour 133 euros ; que, dans le cadre d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal, le service a remis en cause les déficits fonciers générés par ces travaux à hauteur de 270 115 euros que M. et Mme B...ont déclarés et imputés sur leur revenu global au titre des années 2005 et 2006 au motif que les travaux entrepris ne constituaient pas des travaux de réparation, d'entretien ou d'amélioration mais des travaux de construction, de reconstruction et d'agrandissement non déductibles ; qu'il en est résulté des suppléments d'impôt sur le revenu représentant en droits et pénalités les sommes respectives de 11 916 euros et 8 364 euros ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 11 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...), sous déduction : (...) I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : (...) 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ; cette disposition n'est pas applicable aux propriétaires de monuments classés monuments historiques, inscrits à l'inventaire supplémentaire ou ayant fait l'objet d'un agrément ministériel (indissociables et sont donc assimilés à ces derniers) " ; et qu'aux termes de l'article 31 du même code : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement " ; que doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, au sens des dispositions précitées, les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction ; que doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, au sens de ces dispositions, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'acte de vente intervenu le 17 janvier 2004 entre M. et Mme F...et la SARL La Chesnaie que l'ensemble immobilier acquis par cette société avait eu, en dernier lieu, un usage d'habitation alors même que dans le passé il avait été affecté à un usage agricole et artisanal ; que les travaux litigieux ont ainsi porté sur des locaux qui étaient déjà collectivement ou individuellement affectés à l'habitation, y compris la partie de l'immeuble dans laquelle a été aménagé le lot acquis par les requérants ; que, dès lors, ces travaux n'ont pas eu pour effet d'affecter à l'habitation des locaux qui ne l'auraient pas été auparavant ;

4. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le bâtiment A de " La Grande Teinturerie " a fait l'objet d'une importante opération de rénovation comportant la reprise de la charpente et de la toiture, la démolition et la reconstruction de certaines parties du gros oeuvre entrainant une modification de celui-ci et la réalisation de plusieurs chiens assis ; que, par suite, les travaux entrepris sur cet immeuble, qui ont eu pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre, constituent des travaux de reconstruction au sens de l'article 31 précité du code général des impôts ; que M. et Mme B...ne sont dès lors pas fondés à soutenir que les dépenses qu'ils ont engagées pour procéder aux travaux en litige étaient déductibles de leurs revenus fonciers ;

Sur l'application de la doctrine administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal " ;

6. Considérant que M. et Mme B...ne peuvent se prévaloir utilement, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes n° 2, 27, 28 et 29 de la documentation de base 5 D 2224 et 5 D 2225 du 10 mars 1999 qui ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle appliquée ci-dessus ;

7. Considérant que les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A ou de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations ou des appréciations antérieures à l'imposition primitive ; que par suite, les opinions émises par les agents des services fiscaux lors d'une procédure d'imposition conduisant à l'établissement d'impositions supplémentaires ne peuvent, en tout état de cause, être invoquées dès lors que ces opinions ne sont pas antérieures aux impositions primitives ; que, par suite, les requérants ne peuvent utilement invoquer la circonstance, au demeurant regrettable au regard du principe d'égalité des citoyens devant l'impôt et du sort fait aux réclamations des autres copropriétaires, que l'administration a admis la déductibilité des dépenses de travaux engagées sur des parties privatives ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 septembre 2014.

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N° 13LY01574

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01574
Date de la décision : 30/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Dominique BOUISSAC
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : RIVIERE MORLON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-09-30;13ly01574 ?
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