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18/09/2014 | FRANCE | N°13LY01725

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 18 septembre 2014, 13LY01725


Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2013, présentée pour la société Nailler, dont le siège est 1 rue du Bournantel, ZI la Croix Jolie à Murat (15 300), représentée par son représentant légal en exercice ;

La société Nailler demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100535 du 13 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Aurillac à lui verser la somme de 8 142,32 euros, outre les intérêts, au titre de pénalités de retard appliquées à tort ;

2°) de condam

ner la commune d'Aurillac à lui verser la somme de 8 142,32 euros, outre intérêts à compter ...

Vu la requête, enregistrée le 28 juin 2013, présentée pour la société Nailler, dont le siège est 1 rue du Bournantel, ZI la Croix Jolie à Murat (15 300), représentée par son représentant légal en exercice ;

La société Nailler demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100535 du 13 mai 2013 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune d'Aurillac à lui verser la somme de 8 142,32 euros, outre les intérêts, au titre de pénalités de retard appliquées à tort ;

2°) de condamner la commune d'Aurillac à lui verser la somme de 8 142,32 euros, outre intérêts à compter du 23 mars 2009 au taux d'intérêt fixé par l'article 96 du code des marchés publics et le décret du 21 février 2002 ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Aurillac une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la masse des travaux de réfection de la couverture de l'église Notre-Dame-aux-Neiges à Aurillac a été modifiée, nécessitant un approvisionnement supplémentaire en lauzes et la réfection de la couverture de la cage d'escalier, sans qu'aucune prolongation des délais d'exécution n'ait été formalisée, alors que ces travaux retardaient nécessairement la date d'achèvement des ouvrages ; la restauration de l'édifice a nécessité un approvisionnement plus conséquent de lauzes de récupération, denrée extrêmement rare, impossible à anticiper, pour laquelle il n'existe pas de stock ;

- elle justifie de 37 jours d'intempéries sur la période du 15 juillet au 11 décembre 2008, qui l'ont empêchée d'exécuter sa mission, impliquant un travail en hauteur sur un toit très pentu, impossible par temps de pluie ou lorsque la toiture est mouillée ; l'inspection du travail, dont les bureaux étaient situés à proximité directe du chantier, a particulièrement veillé à la sécurité des ouvriers ; c'est à tort que la commune n'a retenu que 12 jours d'intempérie, sans justification ;

- la commune n'a subi aucun préjudice compte tenu de la qualité des prestations réalisées, du fait que la messe de Noël a pu être célébrée et que les travaux intérieurs ont pu commencer début janvier ; le juge administratif doit faire application de la jurisprudence du juge judiciaire selon laquelle les pénalités de retard constituent une clause pénale pouvant être appréciée en fonction de la réalité des préjudices subis ;

- le retard n'a pas été constaté par le maître d'oeuvre, qui n'a ni validé ni constaté les pénalités de retard unilatéralement appliquées par la commune, en méconnaissance de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives générales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 août 2013, présenté pour la commune d'Aurillac, représentée par son maire, qui demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la société Nailler une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le processus normal de mise en oeuvre des pénalités a été appliqué ;

- le Tribunal a expliqué que l'absence de préjudice subi par la commune était sans incidence sur le calcul des pénalités et indiqué que la société n'avait jamais sollicité la prolongation des délais d'exécution ;

- il n'y a eu aucun ordre de service d'ajournement et de reprise de travaux ;

- l'avenant signé le 8 octobre 2008 se rapportait à une situation existante, aucune demande de travaux supplémentaire n'avait été présentée ; cet avenant était relatif à un approvisionnement supplémentaire en lauzes ; le document du 10 juillet 2008 n'est pas un avenant mais un ordre de services prolongeant la durée des travaux de 13 semaines en raison du problème de lauzes ; rien ne justifie un retard au-delà du 15 octobre 2008 ; la société requérante ne disposait pas du matériau adapté, contrairement à ce qu'elle avait indiqué dans le contrat, relatif à la rénovation de la couverture d'un monument historique classé, et était informée de cette contrainte ;

- la société Nailler ne peut être surprise d'avoir dû intervenir en hauteur et sur forte pente ; c'était à elle qu'il appartenait, à l'époque, de justifier des intempéries, et non à l'inspection du travail ;

- les pénalités de retard ne sont pas assimilées à une clause pénale par le juge administratif ;

Vu l'ordonnance en date du 15 mai 2014 fixant la clôture de l'instruction au 16 juin 2014 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des marchés publics ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 août 2014 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de MeB..., représentant la société Nailler, et de MeA..., représentant la commune d'Aurillac ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 3 septembre 2014 pour la société Nailler ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par acte d'engagement signé le 10 juillet 2007, le maire d'Aurillac a confié les travaux du lot n° 2 toiture-zinguerie de l'opération de rénovation de la couverture de l'église Notre-Dame-aux-Neiges à la société Nailler ; que cette entreprise a saisi le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 8 142,32 euros au titre du solde du marché ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 13-41 du cahier des clauses administratives générales relatif aux marchés de travaux, dont il est constant qu'il est applicable au marché en cause : " Le maître de l'ouvrage établit le décompte général... " et qu'aux termes de l'article 13-42 : " Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service... " ; que l'article 2.51 de ce cahier précise que " Les ordres de service sont écrits ; ils sont signés par le maître d'oeuvre, datés et numérotés. Ils sont adressés en deux exemplaires à l'entrepreneur ; celui-ci renvoie immédiatement au maître d'oeuvre l'un des deux exemplaires après l'avoir signé et y avoir porté la date à laquelle il l'a reçu. " ; qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché en cause : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer (...) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 (....) " ; qu'aux termes de l'article 50-22 : " Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage " ; qu'aux termes de l'article 50-23 : " La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage " ; qu'aux termes de l'article 50-32 : " Si, dans un délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. Toutefois, le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement amiable dans les conditions du 4 du présent article " ;

3. Considérant que, lorsque la personne responsable du marché s'abstient de faire notifier, dans les conditions prévues par l'article 13.42 précité, le décompte général à l'entrepreneur, celui-ci ne peut être regardé comme étant devenu définitif ; que, toutefois, lorsque l'entrepreneur adresse au maître d'ouvrage une réclamation pour contester ledit décompte, il ne peut plus ensuite se prévaloir utilement de ces irrégularités affectant la notification du décompte et doit, lorsque sa réclamation fait l'objet d'une décision expresse de rejet, saisir le tribunal administratif compétent dans le délai de six mois suivant notification de cette décision, sauf à avoir saisi le comité consultatif de règlement amiable ;

4. Considérant qu'après mise en demeure de la société Nailler, la commune d'Aurillac lui a adressé un document composé de plusieurs feuilles, faisant état du montant du marché et de l'avenant, des paiements effectués, de l'application de pénalités de retard et dégageant le solde du marché, par courrier recommandé avec accusé de réception reçu le 12 août 2009 ; que l'irrégularité des conditions de notification de ce document et l'absence de signature, si elles peuvent avoir une incidence sur la possibilité qu'il acquière un caractère définitif, sont en revanche sans incidence sur le fait qu'il s'agit d'un véritable décompte ; que la société Nailler a adressé à la commune, par courrier reçu le 13 août 2009, sa réclamation contre ce décompte ; que, par courrier du 8 septembre 2009, reçu par l'entrepreneur le 12 septembre 2009, le maire d'Aurillac a expressément rejeté cette réclamation préalable ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que le comité consultatif de règlement amiable aurait été saisi ; que c'est seulement le 15 mars 2011, après l'expiration du délai de six mois suivant notification de la décision du 8 septembre 2009, que la société Nailler a saisi le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande contestant ce décompte ; que sa demande était, ainsi qu'il était soutenu en première instance, irrecevable ;

5. Considérant que le document intitulé " décompte définitif des travaux ", daté du 21 février 2012, faisant application des mêmes pénalités de retard et communiqué par ordre de service, est purement confirmatif du décompte général précédemment notifié, auquel il ne se substitue pas et, ne manifeste pas la volonté de la commune de faire courir un nouveau délai de recours ; que ce nouveau document est, dès lors, sans incidence sur l'irrecevabilité de la demande ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Nailler n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées à ce titre par la société Nailler doivent, dès lors, être rejetées ;

8. Considérant, en second lieu, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune d'Aurillac ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Nailler est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Aurillac tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Nailler, à la commune d'Aurillac et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 28 août 2014, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Gazagnes, président-assesseur,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 septembre 2014.

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N° 13LY01725

N° 13LY01725


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01725
Date de la décision : 18/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés. Décompte général et définitif.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : POLE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-09-18;13ly01725 ?
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