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08/07/2014 | FRANCE | N°11LY24797

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 08 juillet 2014, 11LY24797


Vu l'ordonnance n° 372825, du 18 novembre 2013, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête de la SCI Cocody à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la Société Civile Immobilière (SCI) Cocody, dont le siège est au Mas Audibal à Vézénobres (30360), représentée par son gérant ;

La SCI Cocody demande à la

Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°0900374 du 25 novembre 2011 par ...

Vu l'ordonnance n° 372825, du 18 novembre 2013, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué le jugement de la requête de la SCI Cocody à la Cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative ;

Vu la requête, enregistrée le 28 décembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la Société Civile Immobilière (SCI) Cocody, dont le siège est au Mas Audibal à Vézénobres (30360), représentée par son gérant ;

La SCI Cocody demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°0900374 du 25 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a fait l'objet au titre des années 2005 et 2006, au remboursement d'une somme de 4 950 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible admise par le service et à la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

2°) de prononcer le dégrèvement des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat au remboursement d'une somme de 4 950 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible admise par le service et de condamner l'Etat au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

4) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SCI Cocody soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité, la procédure devant la juridiction administrative n'ayant pas respecté le principe du contradictoire et de l'égalité des armes en méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de le convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'il est également entaché d'irrégularité du fait de l'absence de communication de deux mémoires en défense qui n'ont pas été visés et n'ont pas été déclarés irrecevables, du fait de l'absence du compte rendu détaillé des modalités de contrôle mentionné dans le jugement attaqué, du fait de l'absence de notification de l'ordonnance de clôture d'instruction en date du 15 février 2011 fixant la clôture de l'instruction au 15 mars 2011, du fait de l'absence de visa de son mémoire récapitulatif du 1er février 2011 (pourtant présenté avant clôture de l'instruction) et de l'omission d'examen des moyens figurant dans ce mémoire récapitulatif ainsi que dans sa note en délibéré, pourtant visée dans le jugement attaqué ;

- que la procédure juridictionnelle est entachée d'une violation du délai raisonnable de jugement eu égard aux nombreux renvois d'audience injustifiés ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité :

- en l'absence de notification à chacun de ses associés, des actes et formalités de vérification de comptabilité ainsi que de la décision de rectification en résultant, alors qu'il n'est pas contesté qu'ils sont tenus solidairement ;

- pour non respect du principe du contradictoire en l'absence de débat oral contradictoire au cours des opérations de vérification de comptabilité menée par l'administration dès lors que l'absence du gérant relevait d'un cas de force majeur, que le mandat accordé à Mme A... était impératif et non représentatif conformément aux dispositions de l'article 1984 du code civil, se limitant à un rôle de " facteur " ; que Mme A...n'étant nullement mandatée pour conduire le débat oral et contradictoire avec la vérificatrice, ce qui imposait à l'administration de rendre compte par courriel au gérant empêché ; que la représentation de la contribuable ne pouvait valablement être faite que par un avocat ; qu'en l'absence d'au moins deux visites sur place, l'existence du débat oral et contradictoire n'est pas établie ; qu'ainsi la procédure a été conduite en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales et en portant atteinte à une garantie essentielle des droits de la défense ; qu'il n'a jamais eu communication du compte rendu détaillé mentionné dans le jugement attaqué ;

- que la méconnaissance des dispositions de l'article L 13 du livre des procédures fiscales, relatif au contrôle des catégories de revenus pour lesquels les contribuables ne sont pas astreint à la tenue d'une comptabilité, à l'instar des revenus fonciers, et de l'article 4 de la sixième directive du 17 mai 1977 justifie l'annulation de la vérification ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- qu'elle ne pouvait être regardée comme assujettie au sens de l'article 4 de la directive, qui qualifie les activités économiques accomplies par les assujettis qui doivent avoir un caractère de permanence, dès lors qu'à compter du 1er janvier 2005 elle était dans l'impossibilité de faire exploiter le parc à des fins commerciales, n'ayant pu faire procéder à l'expulsion d'un occupant sans titre ; qu'en procédant à deux reprises à des dégrèvements, l'administration fiscale avait reconnu qu'elle n'était pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et que ses revenus entraient dans la catégorie des revenus fonciers ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2012, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet des conclusions indemnitaires de la requérante ainsi que de ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le ministre expose que la demande préalable d'indemnisation du préjudice subi à raison de redressements abusifs présentée par la requérante le 16 août 2008 était limitée à la somme de 3 000 euros ; que si dans sa requête introductive d'instance devant le Tribunal administratif de Nîmes elle a étendu ses prétentions à la somme de 10 000 euros, conclusions qu'elle reprend en appel, en vertu du principe de cristallisation du montant évalué dans la demande préalable, il est demandé à la Cour de plafonner en tout état de cause la demande d'indemnité à la somme de 3 000 euros ; le ministre soutient également à titre principal que le jugement est régulier, et que les conclusions indemnitaires étaient bien irrecevables en première instance faute d'être présentées par le ministère d'un avocat ;

- à titre subsidiaire, qu'en l'absence de dégrèvement de l'imposition litigieuse par la juridiction saisie du litige fiscal, l'établissement de l'imposition en cause ne peut être constitutif d'aucune faute ; qu'à supposer que le juge prononce le " dégrèvement " cela n'ouvrirait droit à aucune indemnisation en vertu de l'article L. 207 du livre des procédures fiscales confirmé par la jurisprudence CE 1er avril 1984, n°50291 et 60420 ; que la requérante ne démontre pas l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que les rectifications en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée sont fondées sur le caractère commercial de l'activité de location de la SCI et ne relèvent donc aucunement d'une volonté de nuire de la part de l'administration fiscale ; que le refus de répondre à un courrier exposant sa situation fiscale ne saurait être regardé comme ayant engagé l'administration fiscale au sens des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales par une prise de position formelle, ni comme constitutif d'une faute ; qu'en l'espèce, la requérante ne justifie pas de la réalité, ni même de la nature du préjudice dont elle demande réparation ; que sa demande n'est donc pas fondée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre expose, en outre :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- que le défaut de motivation du jugement attaqué doit être écarté ; que le Tribunal n'avait pas à viser le mémoire récapitulatif de la requérante dès lors que les moyens exposés avaient déjà été portés à la connaissance du juge dans la requête et les trois précédents mémoires ; que les mémoires en défense non communiqués des 13 août et 25 octobre 2011 présentés en réponse aux conclusions indemnitaires sont sans objet en ce qui concerne le litige fiscal ; que la requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que les premiers juges auraient porté atteinte au principe d'égalité des armes et de respect du contradictoire de l'instruction, les parties ayant été mises à même de discuter l'argumentation et les prétentions de l'autre partie ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- que la procédure de vérification suivie conformément aux dispositions de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales et de la jurisprudence n'est pas entachée d'irrégularité ; que la requérante n'a pas été privée de la garantie d'un débat oral et contradictoire ;

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

- que l'activité de la requérante consistant en la location de terrains aménagés revêt une nature commerciale au sens de l'article 35 du code général des impôts qui la rend passible de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la circonstance que l'administration n'a formulé aucune observation lors de l'établissement des impositions d'un contribuable, au vu de ses déclarations, ne constitue pas une prise de position formelle au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; qu'elle ne peut se prévaloir des garanties accordées par les articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales en excipant des dégrèvements prononcés sur des années antérieures à la période vérifiée ; que les loyers encaissés ainsi que les cessions de biens mobiliers étaient imposables à la taxe sur la valeur ajoutée, la requérante n'étant pas, pour sa part, au titre des années 2005 et 2006 assujettie à la taxe foncière sur les chalets cédés ;

- que les redressements litigieux n'ont pas méconnu la réglementation communautaire et notamment l'article 13 de la 6ème directive ;

Sur la demande de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée déductible :

- que le service a déjà admis la somme de 4 950 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, en déduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux ; qu'aucune déduction ni restitution ne peut donc être accordée à ce titre ;

Sur les pénalités :

- que la majoration pour manquement délibéré appliquée aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée ayant été dégrevée le 6 décembre 2011, en exécution du jugement attaqué rendu par le Tribunal administratif de Nîmes, les conclusions aux fins de décharge sont devenues sans objet ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2013, présenté pour la SCI Cocody qui persiste dans ses écritures ;

Elle soutient, en outre :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- qu'en qualité de société civile immobilière, elle n'était pas astreinte à la tenue d'une comptabilité et que l'administration ne saurait justifier l'engagement d'une procédure de vérification de comptabilité au moyen d'éléments recueillis a posteriori au cours de cette procédure ;

- que l'avis de contrôle sur place notifié au contribuable en application de l'article 172 bis du code général des impôts n'est pas assimilable à un avis de vérification de comptabilité ; qu'ainsi la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;

- que la vérification ayant excédé trois mois, la procédure est irrégulière ;

- que la charge de la preuve de l'existence d'un débat oral et contradictoire n'incombe pas au requérant lorsque le contrôle s'est déroulé dans les locaux de l'administration ; que les échanges écrits ne peuvent tenir lieu de débat oral et contradictoire ; que la notification de la proposition de rectification est irrégulière dès lors qu'elle a été adressée au siège de la SCI à l'attention de son gérant ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- que la location d'emplacements viabilisés à des particuliers sans fourniture de prestations annexes n'est pas visée par l'article 35 I 5° du code général des impôts ; qu'en l'espèce, l'accès aux services collectifs n'est pas garanti par les contrats de location passés avec les particuliers ; que ces services étaient gérés par l'association Euro Cévennes qui en répercute le coût sur les résidents ; qu'elle n'est par conséquent pas imposable à l'impôt sur les sociétés ;

- qu'en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée, elle doit bénéficier de l'exonération prévue par l'article 261 D 2° du code général des impôts relative aux locations de terrains non aménagés ; que l'administration ne démontre pas que le terrain lui appartenant répondrait aux caractéristiques générales d'un terrain de camping ; que le ministre de l'équipement reconnaît dans une convention d'indemnisation en date du 17 juin 1996 que le site est un parc résidentiel de loisirs et non un camping ; qu'il y a lieu de relever l'absence d'arrêté préfectoral autorisant l'exploitation d'un camping en application des dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 11 janvier 1993 dans sa version en vigueur au cours des exercices litigieux ; que dans son mémoire du 23 juillet 2012, l'administration renonce à la qualification de terrain de camping ; que les aménagements susceptibles d'entrainer l'assujettissement des loyers à la taxe sur la valeur ajoutée s'entendent de ceux qui sont nécessaires en vue d'une exploitation commerciale ; qu'au cas d'espèce, le site ne faisait plus l'objet d'une exploitation commerciale au cours des exercices litigieux ; que l'assujettissement des loyers à la taxe sur la valeur ajoutée est donc injustifié ; qu'il en est de même pour les cessions des habitations légères de loisirs, qualifiées de " constructions " par le Tribunal administratif de Nîmes dans un jugement du 14 février 2012, dès lors que leur acquisition n'a pas ouvert droit à déduction de cette taxe ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 mars 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui persiste dans ses écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 novembre 2013 à la Cour administrative d'appel de Marseille et le 19 décembre suivant au greffe de la Cour de céans, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin de décharge à hauteur du dégrèvement prononcé, au rejet du surplus des conclusions de la requête, et demande à la Cour d'apprécier souverainement la demande de frais irrépétibles de la requérante ;

Il expose, en outre :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- que les SCI qui donnent en location leurs immeubles ou en confèrent la jouissance à leurs associés peuvent faire l'objet d'une vérification de leurs documents comptables bien qu'elles n'aient pas à tenir de comptabilité commerciale (CE 7 décembre 1987 n°73303) ; que l'administration était tenue de lui adresser un avis de contrôle sur place compte tenu de son activité ; que l'avis adressé contient toute les prescriptions auxquelles est tenue l'administration notamment les années soumises à contrôle et la faculté de la contribuable de se faire assister par un conseil ; que la durée du contrôle n'a pas excédé trois mois, l'envoi d'un courriel émanant des locaux du service étant sans incidence sur la date d'achèvement de la vérification de comptabilité ; qu'il ne résulte pas du mandat donné à Mme A...pour représenter la requérante lors du contrôle que la mandataire ait été désignée pour recevoir personnellement, en lieu et place de la société, les pièces de procédure destinées à cette dernière ; que la proposition de rectification a donc été régulièrement notifiée au siège de la SCI et à la jurisprudence qui n'impose l'envoi d'un second courrier au mandataire qu'en l'absence de réception effective du premier pli ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- que les cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée des opérations de locations d'emplacements aménagés caractérisant une activité commerciale sont maintenues ; qu'en revanche les rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs aux cessions des habitations ne sont pas maintenues dès lors qu'il ressort des explications données par la requérante que ces biens n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe à l'occasion de leur acquisition effectuée par jugement du Tribunal de grande instance d'Alès du 15 mars 1995, ne mentionnant pas ladite taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 février 2014 présenté par le ministre chargé du budget qui persiste dans ses écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2013, présenté pour la SCI Cocody qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens, tout en portant à 15 000 euros sa demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 27 mars 2014 fixant la date de clôture de l'instruction au 17 avril 2014 à 16 h 30 ;

Vu le mémoire enregistré le 8 avril 2014, non communiqué, présenté par le ministre de l'économie et des finances qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2014 :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite d'une procédure de vérification de comptabilité, diligentée du 11 juin 2007 au 7 septembre 2007, l'administration fiscale a notifié à la société civile immobilière (SCI) Cocody des redressements en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 2005 et 2006 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 au motif que son activité de location constituait une activité commerciale au sens du 5° du I de l'article 35 et de l'article 206-2 du code général des impôts et qu'elle ne pouvait prétendre à l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 2° du D de l'article 261 du code général des impôts ; que, par jugement du 25 novembre 2011, le Tribunal administratif de Nîmes a déchargé la SCI Cocody des pénalités pour manquement délibéré appliquées au rappel de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a fait l'objet et rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, au remboursement d'une somme de 4 950 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et à la condamnation de l'Etat au versement d'une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que, par la présente requête, la SCI Cocody relève appel de l'article 2 de ce jugement rejetant le surplus de ses conclusions à fin de décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge et de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par décision en date du 12 décembre 2013 postérieure à l'introduction de la requête, l'administrateur général des finances publiques du Gard a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 60 013 euros, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs à la cession d'habitations dont a fait l'objet la SCI Cocody pour la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ; que les conclusions de la requête de la SCI Cocody relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close (...) Les lettres remises contre signature portant notification de cette ordonnance ou tous autres dispositifs permettant d'attester la date de réception de ladite ordonnance sont envoyés à toutes les parties en cause quinze jours au moins avant la date de clôture fixée par l'ordonnance. (...) " qu'aux termes de l'article R. 613-2 de ce code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée sur l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 741-2 de ce code : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et des mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) Mention est également faite de la production d'une note en délibéré. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'instruction écrite est normalement close dans les conditions fixées par l'article R. 613-1 ou bien, à défaut d'ordonnance de clôture dans les conditions fixées par l'article R. 613-2 ; que toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant de l'une des parties à l'instance, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé et, cette fois, analysé - il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; que, dans tous les cas où il est amené à tenir compte de ce mémoire, il doit - à l'exception de l'hypothèse particulière dans laquelle il se fonde sur un moyen qu'il devait relever d'office - le soumettre au débat contradictoire, soit en suspendant l'audience pour permettre à l'autre partie d'en prendre connaissance et de préparer ses observations, soit en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI Cocody a adressé au Tribunal administratif de Nîmes des observations écrites dans un mémoire qualifié d'ampliatif avant la clôture de l'instruction fixée par une ordonnance du président de la formation de jugement au 15 mars 2011 ; que ce mémoire a été enregistré au greffe du Tribunal le 1er février 2011 et communiqué à la direction départementale des finances publiques du Gard ainsi qu'à la direction générale des finances publiques par courriers en date du 15 février 2011 ; que le défendeur a adressé au Tribunal administratif de Nîmes des observations écrites, après la clôture de l'instruction susmentionnée, par deux mémoires enregistrés au greffe du Tribunal respectivement les 13 août 2011 et 25 octobre 2011, avant l'audience publique du 10 novembre 2011 ; que le jugement attaqué dont les visas ne font pas mention de ces mémoires, est ainsi entaché d'irrégularité ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la SCI Cocody est fondée à demander l'annulation de l'article 2 du jugement n° 090374 du 25 novembre 2011 du Tribunal administratif de Nîmes ;

5. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour de se prononcer immédiatement sur le surplus des conclusions de la demande présentée par la SCI Cocody devant le Tribunal par la voie de l'évocation ;

Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 772-1 du code de justice administrative : " Les requêtes en matière d'impôts directs et de taxe sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées dont l'assiette ou le recouvrement est confié à la direction départementale des impôts sont présentées, instruites et jugées dans les formes prévues dans le livre des procédures fiscales " ; que ces dispositions s'opposent à ce que des demandes de dommages et intérêts puissent être jointes aux demandes de décharge ou réduction d'impôts, du fait qu'elles sont jugées selon des règles de procédure différentes ; que les conclusions de la SCI Cocody ne sont, par suite, pas recevables ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la procédure de vérification :

7. Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article 172 bis du code général des impôts, ainsi que des dispositions réglementaires des articles 46 B à D de l'annexe III à ce code prises pour leur application, qu'afin d'examiner les documents comptables et pièces justificatives que ces dernières dispositions imposent de tenir aux sociétés civiles immobilières qui donnent leurs immeubles en location ou en confèrent la jouissance à leurs associés, l'administration peut légalement procéder à un contrôle sur place de ces documents et procéder à la vérification des documents susmentionnés alors même que ces sociétés ne sont pas tenues de tenir une comptabilité commerciale, dans le respect des garanties bénéficiant à l'ensemble des contribuables vérifiés ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément sous peine de nullité de la procédure que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. (...) " ; que, nonobstant la circonstance que la société requérante revendiquait exercer une activité civile immobilière, et contrairement à ce quelle soutient, dans les circonstances de l'espèce, s'agissant d'une SCI soumise à l'obligation de tenir et de présenter des documents comptables, le vérificateur, avant d'engager un contrôle sur place puis une vérification de comptabilité, n'était pas tenu de justifier de l'existence d'indices préalables susceptibles de la faire regardée comme exerçant une activité commerciale la faisant entrer dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés et justifiant son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée conformément aux dispositions de l'article 4 de la 6ème directive susvisée ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a notifié à la SCI Cocody, le 30 mai 2007, un avis de contrôle sur place daté du 22 mai 2007, l'informant qu'il serait procédé au contrôle de l'ensemble de ses " déclarations fiscales ou opérations susceptibles d'être examinées et portant sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 " et l'invitant à tenir à sa disposition les documents comptables et pièces justificatives dont la présentation est obligatoire en application des articles 17 bis du code général des impôts et 46 D de l'annexe III audit code ainsi que de l'article 74-0 I de l'annexe II du code général des impôts ; que cet avis précisait, en outre, que " dans l'hypothèse où la société serait reconnue passible de l'impôt sur les sociétés au taux normal et de la taxe sur la valeur ajoutée de droit commun, le présent avis vaudrait avis de vérification de comptabilité conformément aux dispositions de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales " ; que cet avis indiquait, en outre, que la contribuable avait la faculté de se faire assister par un conseil de son choix ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de notification d'un avis, préalablement à l'engagement des opérations de contrôle, manque en fait et doit être écarté ;

10. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales ont pour conséquence que la vérification de comptabilité doit en principe se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, en présence de personnes habilitées à la représenter, sans qu'y fasse obstacle l'empêchement du gérant en exercice dès lors que ce dernier a désigné une personne pour représenter la société et produire les documents comptables de la société ; qu'en outre, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration fiscale de poursuivre les opérations de contrôle avec les associés d'une société, quand bien même ils seraient solidairement responsables ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à réception de l'avis de contrôle sur place du 22 mai 2007, le gérant de la SCI Cocody a contacté la vérificatrice par téléphone, le 31 mai 2007, pour l'informer qu'il résidait en Thaïlande et qu'il ne pouvait pas être présent pendant le déroulement des opérations de contrôle ; que, par courriel du 1er juin 2007, l'administration fiscale l'a invité à désigner un représentant de la société chargé de participer aux opérations de contrôle ; que, par courrier du 30 mai 2007, le gérant de la SCI a désigné Mme A... pour représenter la SCI dans le cadre du contrôle et a sollicité que celui-ci se déroule dans les locaux de l'administration ; que la vérificatrice a reçu Mme A...le 11 juin 2007 et lui a fait part des modalités de déroulement du contrôle en lui communiquant la liste des documents à fournir et a, par ailleurs, informé le gérant de la SCI par courriel du même jour ; qu'un accusé réception des pièces comptables, établi le 9 juillet 2007 par la vérificatrice, a été adressé au gérant par voie postale ; que le 19 juillet 2007, après en avoir informé le gérant par courriel du 10 juillet 2007, la vérificatrice s'est rendue au siège de la SCI Cocody à Vézénobres en présence de Mme A... ; que le 7 septembre 2007 la vérificatrice a reçu Mme A...et lui a restitué les pièces comptables de la SCI ; que, par courriel du 21 septembre 2007, la vérificatrice a communiqué au gérant les conclusions du contrôle de la SCI et l'a informé de l'envoi d'une proposition de rectification ; que, par courriel du 22 septembre 2007, le gérant a répondu qu'il ne partageait pas le point de vue de l'administration fiscale, sans plus de précision ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'absence du gérant au cours des opérations de contrôle serait de nature à entacher la procédure de vérification d'irrégularité doit être écarté ;

12. Considérant que lorsque, comme en l'espèce, la vérificatrice, à la demande de la contribuable, procède à cette vérification dans les locaux de l'administration, la requérante au représentant de laquelle la vérificatrice a remis un reçu détaillé des pièces emportées, n'établit pas qu'elle aurait été privée de la possibilité de bénéficier, sur place, d'un débat oral et contradictoire, dès lors que des entretiens avec son représentant ont eu lieu à trois reprises et que celui-ci a rencontré sur le lieu même de l'exploitation la vérificatrice, à laquelle il a pu au demeurant donner des informations précises concernant les activités de la SCI ; que, le moyen, doit, par suite, être écarté ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux faits de la cause : " Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles ou commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...)°Toutefois, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration pour l'instruction des observations ou des requêtes présentées par le contribuable, après l'achèvement des opérations de vérification. / (...) Les dispositions du premier alinéa sont valables dans les cas où un même vérificateur contrôle à la fois l'assiette de plusieurs catégories différentes d'impôts ou de taxes " ; que, pour l'application de ces dispositions, la date d'achèvement de la vérification de comptabilité correspond à celle de la dernière intervention sur place du vérificateur ;

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité dont la SCI a fait l'objet s'est déroulée du 11 juin 2007 au 7 septembre 2007 ; que le détail de la procédure est indiqué dans la proposition de rectification du 28 septembre 2007 qui précise la durée du contrôle ; que si la vérificatrice a adressé, le 21 septembre 2007, un courriel au gérant résidant à l'étranger, afin de le tenir informé des conclusions du contrôle, cette circonstance, alors qu'il n'a été procédé à cette date à aucune nouvelle intervention à l'égard de la SCI Cocody, ne peut être regardée comme ayant repoussé la fin des opérations de contrôle au-delà du 7 septembre 2007, date à laquelle les documents comptables ont été restitués à la mandataire désignée par le gérant de la SCI ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du délai maximal de trois mois prévu par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales manque en fait et doit être écarté ;

S'agissant de la procédure de rectification :

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) " ; que si l'administration peut régulièrement notifier aux porteurs de parts d'une SCI le redressement correspondant à la fraction lui revenant du profit réalisé par la société, sans être tenue d'engager préalablement une procédure de redressement à l'encontre de la société, elle n'est nullement tenue d'adresser aux associés de la SCI la proposition de rectification résultant de la vérification de comptabilité conduite à l'encontre de celle-ci ;

16. Considérant qu'il résulte de la lecture même du courrier en date du 30 mai 2007, dont l'authenticité n'est pas contestée, que le gérant en exercice de la SCI Cocody, agissant en cette qualité, a donné tous pouvoirs à Mme A...pour représenter la SCI dans le cadre du contrôle fiscal diligenté par le service par l'avis de contrôle susmentionné du 22 mai 2007 ; que si la société requérante soutient que la personne ainsi désignée avait pour seule mission de communiquer les documents demandés par la vérificatrice, elle ne l'établit pas de manière probante par la seule production d'un courrier en date du 9 juin 2007 que son gérant aurait envoyé de Thaïlande dont elle n'établit ni même n'allègue qu'il aurait été effectivement reçu par l'administration fiscale au cours des opérations de contrôle ; qu'ainsi, en l'absence d'habilitation expresse du représentant désigné de la SCI à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, le mandat de représentation confié à Mme A...n'emportait pas élection de domicile auprès de cette dernière ; que, dans ces conditions, l'administration, qui n'était pas tenue d'adresser l'ensemble des actes de la procédure à la représentante désignée de la SCI, ni à l'ensemble de ses associés, ni même au domicile du gérant a régulièrement notifié la proposition de rectification au siège déclaré de la SCI ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 28 septembre 2007 et la lettre de réponse aux observations du contribuable du 5 décembre 2007 notifiées au siège social de la SCI ont été réceptionnées par la personne désignée par le gérant de la société et ont permis à ce dernier de présenter, sous sa propre signature et de manière circonstanciée, des observations les 11 octobre et 16 décembre 2007, et de solliciter la saisine de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires du Gard ; que la société requérante n'a ainsi été privée d'aucune garantie, ni d'aucun droit auquel elle pouvait prétendre dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la procédure d'imposition n'est pas entachée d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les redressements notifiés à l'impôt sur les sociétés :

19. Considérant qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts, les sociétés civiles sont passibles de l'impôt sur les sociétés " si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées (...) aux articles 34 et 35 " ; qu'aux termes de l'article 35 du même code : " 1. Présentent (...) le caractère de bénéfices industriels et commerciaux (...) les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après (...) 5° personnes qui donnent en location un établissement commercial ou industriel muni du mobilier ou du matériel nécessaires à son exploitation " ; que doit être regardée comme une location de terrains aménagés celle qui porte sur des terrains qui sont pourvus des aménagement nécessaires, c'est-à-dire de ceux sans lesquels l'exploitation commerciale à laquelle ils sont destinés n'est pas possible ;

20. Considérant que la SCI Cocody conteste le caractère commercial de son activité en soutenant qu'elle louait, au cours des exercices litigieux, des terrains nus à usage civil et que les infrastructures mises à disposition des locataires étaient gérées par un prestataire indépendant ;

21. Considérant qu'il est constant que la SCI Cocody, créée le 25 février 1989, a acquis le 17 avril 1990 un ensemble immobilier originairement en partie aménagé en terrain de camping avec bâtiments d'habitation, qu'elle a exploité, après des travaux de viabilisation effectués en 1992 afin d'y installer des mobil-homes, comme un parc de loisirs comprenant des équipements collectifs dont un restaurant, un tennis, un mini-golf, une piscine chauffée et un sauna, et des habitations légères de loisirs pour l'hébergement des usagers du parc, raccordées aux réseaux d'eau, de gaz et d'électricité et d'assainissement, chaque emplacement étant équipé d'un système d'éclairage extérieur ; que si la requérante fait valoir qu'elle n'a pas directement exploité ce site, qu'elle louait jusqu'en 2004 à divers exploitants, il résulte de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté qu'au cours des exercices litigieux, après avoir cédé les habitations légères, elle a loué les emplacements de ces habitations aux différents acquéreurs selon des contrats intitulés " contrat de location de terrain nu " ou " contrat de vente de chalet et de location de terrain ", et, en vertu d'un bail commercial signé le 15 avril 2001, a confié la gestion du parc à l'association Euro Cévennes chargée d'encaisser les loyers pour son compte ; qu'elle n'a pas soumis les produits de ses locations à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée mais les a déclarés comme imposables dans la catégorie des revenus fonciers ; que la requérante persiste à soutenir qu'il s'agit de revenus fonciers résultant de la location de terrains nus à usage civil, en faisant valoir que les parcelles qu'elle loue ne sont pas aménagées et ne doivent pas être comparées à des emplacements de camping en l'absence de blocs sanitaires, que les réseaux, qui n'ont pas été implantés par ses soins, arrivent en limite de parcelle et que la portion qui dessert les locataires, eux-mêmes propriétaires de leur mobil-home, appartient à ces derniers, la facturation de l'eau et de l'électricité se faisant sans passer par son entremise ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que les contrats de location des emplacements loués aux propriétaires de chalets prévoyaient, nonobstant leur intitulé, qu'ils seraient raccordés aux différents réseaux, que les accès à chaque emplacement étaient aménagés et comportaient un système d'éclairage et que les différents occupants bénéficiaient des équipements collectifs susmentionnés indispensables à l'exploitation commerciale du parc résidentiel ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que la SCI n'assurait pas directement la gestion de son parc, elle doit être regardée comme louant des terrains aménagés relevant d'une activité commerciale dont le produit était, au titre des exercices litigieux, imposable à l'impôt sur les sociétés ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les redressements en matière d'impôt sur les sociétés seraient infondés ;

22. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal. " ; que, toutefois, lorsque l'administration ne remet pas en cause, au titre d'une période, une situation fiscale non conforme à la législation applicable, le contribuable n'a aucun droit acquis au maintien de cette situation au titre d'une période postérieure ;

23. Considérant que la SCI Cocody soutient que l'administration aurait clairement pris position, depuis plus de 15 ans, après plusieurs redressements, dans le sens d'une classification de ses revenus dans la catégorie des revenus fonciers ; que toutefois, la double circonstance qu'en 1999 la SCI Cocody aurait obtenu du service un dégrèvement non motivé en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés, suite à des redressements notifiés en 1997, et que l'administration aurait demandé à la SCI de produire des déclarations de revenus fonciers, ne peut être regardée comme révélant une prise de position formelle du service au sens des articles précités ; que, par suite, le moyen ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

24. Considérant, d'une part, qu'en application de l'article 256 du code général des impôts, les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économique mentionnées au cinquième alinéa, quelque soit le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. (....) les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataires de services (...). Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l'exploitation d'un bien meuble corporel (...) en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence. " ;

25. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...)° 2° Les locations de terrains non aménagés et de locaux nus à l'exception des emplacements pour le stationnement des véhicules ; toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables lorsque les locations constituent pour le bailleur une moyen de poursuivre, sous une autre forme, l'exploitation d'un actif commercial ou d'accroître ses débouchés ou lorsque le bailleur participe aux résultats de l'entreprise locataires ; (...) " ; qu'en revanche, les locations d'immeubles aménagés constituent des prestations de services soumises à la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions susmentionnées de l'article 256 du code général des impôts ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la nature des installations décrites plus haut que les emplacements loués par la SCI doivent être regardés, nonobstant l'absence de sanitaires communs, comme pourvus des aménagements nécessaires en vue d'une exploitation commerciale, c'est-à-dire de ceux sans lesquels l'exploitation commerciale à laquelle ils sont destinés n'est pas possible ; qu'en conséquence, les loyers encaissés par la SCI, dont l'activité commerciale entrait dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, étaient, au titre de la période litigieuse, assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en application de la loi interne et ne pouvaient être exonérés de cette taxe en application des dispositions précitées du 2° de l'article 261 D du code général des impôts ; que, par suite, la SCI Cocody n'est pas fondée à soutenir que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période vérifiée ne seraient pas fondés en droit ;

26. Considérant qu'aux termes du B de l'article 13 de la 6ème directive susvisée : " sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent (...) : (...) b) l'affermage et la location de biens immeubles, à l'exception : 1. des opérations d'hébergement telles qu'elles sont définies dans la législation des Etats membres, qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou des secteurs ayant une fonction similaire, y compris les locations de camps de vacances ou de terrains aménagés pour camper (...). Les Etats membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d'application de cette exonération (...) " ; que pour les motifs énumérés au point précédant, les emplacements en litige doivent être regardés comme des terrains aménagés au bénéfice des usagers du camping, dont la location n'est pas exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la SCI Cocody ne peut utilement se prévaloir des dispositions de la 6ème directive susvisée transposées en droit interne par les dispositions précitées ; que par suite, le moyen tiré de ce que la règlementation communautaire aurait été directement méconnue par l'administration doit être écarté ;

27. Considérant qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'administration aurait, au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, pris une position formelle sur le principe de l'exonération des locations en litige, laquelle ne saurait résulter du refus de réponse qu'aurait opposé l'administration aux demandes d'information de la requérante à ce sujet ;

28. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI Cocody n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie ;

Sur les conclusions à fin de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée :

29. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la lecture même de la proposition de rectification du 28 septembre 2007, que l'administration fiscale a admis un montant de 4 950 euros de taxe sur la valeur ajoutée déductible afférente aux charges supportées par la SCI Cocody au titre de l'année 2005 en déduction du montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés au titre de l'année 2005 sur les ventes des chalets ; que, compte tenu du dégrèvement prononcé correspondant à ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur les cessions opérées en 2005, la SCI est fondée à réclamer le remboursement de la différence entre le rappel de taxe sur la valeur ajoutée sur loyers encaissés au titre de l'année 2005, d'un montant de 4 033 euros et de la taxe déductible à hauteur de la somme de 4 950 euros ; que, toutefois, il est constant que la période vérifiée qui s'étendait également sur l'année 2006 a conduit l'administration à notifier à la SCI Cocody un rappel de taxe sur la valeur ajoutée sur loyers encaissés au titre de l'année 2006 d'un montant de 6 506 euros ; que, dans ces conditions, il y a lieu de ramener le montant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée restant dû au titre de l'année 2006 à la somme de 5 589 euros après déduction du reliquat du crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 2005 ; que, par suite, les conclusions à fin de remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

30. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

31. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la SCI Cocody tendant à la mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 60 013 euros en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SCI Cocody a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SCI Cocody.

Article 2 : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Nîmes n°090374 en date du 25 novembre 2011 est annulé.

Article 3 : Les conclusions de la demande de la SCI Cocody devant le Tribunal administratif de Nimes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a fait l'objet au titre des années 2005 et 2006, au remboursement d'une somme de 4 950 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible admise par le service et à la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SCI Cocody est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Cocody et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 juillet 2014.

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N° 11LY24797

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