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10/06/2014 | FRANCE | N°13LY03194

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 10 juin 2014, 13LY03194


Vu I, sous le n° 13LY03194, la requête enregistrée à la cour par télécopie le 6 décembre 2013 et régularisée le 10 janvier 2014, présentée par le préfet du Rhône ;

Le préfet du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307405, rendu le 30 octobre 2013, par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a annulé sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise aux autorités hongroises de M. A...B..., lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de l'intéressé et a mis à la charge de l'

Etat la somme de 600 euros à verser au conseil de M.B..., en application des dispositio...

Vu I, sous le n° 13LY03194, la requête enregistrée à la cour par télécopie le 6 décembre 2013 et régularisée le 10 janvier 2014, présentée par le préfet du Rhône ;

Le préfet du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307405, rendu le 30 octobre 2013, par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a annulé sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise aux autorités hongroises de M. A...B..., lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de l'intéressé et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros à verser au conseil de M.B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

2°) de rejeter, dans cette mesure, la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ;

Il soutient que la Hongrie a transposé la directive 2013/33/UE du 26 juin 2013 et que tant la Cour européenne des droits de l'homme que le Conseil d'Etat se sont récemment prononcés sur la possibilité de réadmettre des demandeurs d'asile en Hongrie sans méconnaître le droit d'asile ; qu'en l'espèce, les déclarations de M. B...quant à son parcours depuis son départ du Kosovo se sont révélées discordantes et mensongères, notamment concernant les dates de sa présence sur le territoire hongrois, et qu'il n'apporte aucun justificatif à l'appui de ses affirmations selon lesquelles il a été enfermé quatre jours dans un camp pour demandeurs d'asile situé à Debrecen où il a été confronté à des conditions matérielles déplorables ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 mai 2014 par lequel M. B...conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient avoir été détenu dans le camp de Debrecen dans des conditions contraires aux garanties inhérentes au droit d'asile ; que le préfet n'établit pas que ses affirmations sont fausses ; que la loi hongroise du 26 juin 2013 n'a pas transposé correctement la directive ;

Vu II, sous le n° 13LY03502, la requête enregistrée à la cour le 31 décembre 2013, présentée par le préfet du Rhône ;

Le préfet du Rhône demande à la cour de prononcer, en application des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution des articles 2 et 3 du jugement n° 1307405, rendu le 30 octobre 2013, par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a annulé sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise aux autorités hongroises de M. A...B...et lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de l'intéressé ;

Il soutient, d'une part, que les moyens, énoncés ci-avant dans le cadre de la requête enregistrée sous le n° 13LY03194, présentent un caractère sérieux ; que, d'autre part, sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise de M. B...aux autorités hongroises n'est valable que jusqu'au 1er février 2014, date à laquelle expire le délai de six mois suivant l'accord de reprise en charge de l'intéressé, donné le 1er août 2013, par les autorités hongroises et que l'exécution du jugement attaqué risque donc d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

Vu le jugement dont est demandé le sursis à exécution ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 mai 2014 par lequel M. B...conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient avoir été détenu dans le camp de Debrecen dans des conditions contraires aux garanties inhérentes au droit d'asile ; que le préfet n'établit pas que ses affirmations sont fausses ; que la loi hongroise du 26 juin 2013 n'a pas transposé correctement la directive ; que le préjudice difficilement réparable n'est nullement établi ;

Vu les décisions du 6 mars 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (Section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...pour chacune des deux instances ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

Vu le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

Vu la directive n° 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005, relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2014 :

- le rapport de M. Riquin, président ;

1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête enregistrée à la cour sous le n° 13LY03194 :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...B..., ressortissant du Kosovo né le 22 mai 1990, est entré irrégulièrement en France le 16 juin 2013, selon ses déclarations ; que, le 20 juin 2013, il a sollicité auprès du préfet du Rhône son admission au séjour au titre de l'asile et ses empreintes digitales ont été relevées ; que le système " EURODAC " a révélé que ces dernières étaient identiques à celles relevées le 7 juin 2013 en Hongrie, Etat membre de l'Union européenne ; que, le 19 juillet 2013, une demande de reprise en charge a été adressée aux autorités hongroises, qui ont donné leur accord, le 1er août 2013, en application du c) du § 1 de l'article 16 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 susvisé ; que le préfet du Rhône a alors informé M. B...que la Hongrie était responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il lui refusait son admission provisoire au séjour en France en qualité de demandeur d'asile, sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 30 septembre 2013, le préfet du Rhône a décidé que M. B...serait remis aux autorités hongroises en application des dispositions combinées de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du premier paragraphe de l'article L. 531-2 du même code ; que, par arrêté du 28 octobre 2013, le préfet de l'Ain a placé M. B...en rétention administrative en vue de l'exécution de la décision susmentionnée du 30 septembre 2013 ; que, par jugement du 30 octobre 2013, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces deux décisions préfectorales ; que le préfet du Rhône interjette appel de ce jugement en tant qu'il a notamment annulé sa décision du 30 septembre 2013 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. / L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'Etat. / Cette décision peut être exécutée d'office par l'administration après que l'étranger a été mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. " ; qu'aux termes de l'article L. 531-2 du même code : " Les dispositions de l'article L. 531-1 sont applicables, sous la réserve mentionnée à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 741-4, à l'étranger qui demande l'asile, lorsqu'en application des dispositions des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne l'examen de cette demande relève de la responsabilité de l'un de ces Etats.(...) " ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 dudit code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : / 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres Etats ; (...) Les dispositions du présent article ne font pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne qui se trouverait néanmoins dans l'un des cas mentionnés aux 1° à 4° " et qu'aux termes de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 susvisé : " 1. Les Etats membres examinent toute demande d'asile présentée par un ressortissant d'un pays tiers à l'un quelconque d'entre eux, que ce soit à la frontière ou sur le territoire de l'État membre concerné. La demande d'asile est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncé s au chapitre III désignent comme responsable. / 2. Par dérogation au paragraphe 1, chaque État membre peut examiner une demande d'asile qui lui est présentée par un ressortissant d'un pays tiers, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. Dans ce cas, cet État devient l'État membre responsable au sens du présent règlement et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. Le cas échéant, il en informe l'État membre antérieurement responsable, celui qui conduit une procédure de détermination de l'État membre responsable ou celui qui a été requis aux fins de prise en charge ou de reprise en charge. (...) " ;

4. Considérant que, pour annuler l'arrêté du 30 septembre 2013, par lequel le préfet du Rhône a décidé de la remise de M. B...aux autorités hongroises sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du premier paragraphe de l'article L. 531-2 du même code, le premier juge a considéré qu'il ressortait des déclarations non contredites de l'intéressé que les conditions dans lesquelles il avait été détenu en Hongrie durant quatre jours faisaient apparaître un risque sérieux que sa demande d'asile ne soit pas traitée par les autorités hongroises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ;

5. Considérant que M. B...soutient avoir été interpellé en Hongrie au début du mois de juin 2013 et détenu durant quatre jours dans un centre pour demandeurs d'asile avant de parvenir à s'enfuir et que les conditions d'accueil, dans une pièce accueillant une quarantaine de personnes, ne lui ont notamment pas permis de rencontrer un médecin ou un avocat, ni d'être informé de ses droits et présenté à un juge, en étant soumis aux mauvais traitements des policiers ; que, toutefois, M. B...n'apporte aucun élément susceptible de corroborer ses affirmations qui sont au surplus contredites par les indications mentionnées sur l'imprimé de demande d'admission au séjour au titre de l'asile signé par M. B...le 18 juin 2013, selon lesquelles il est entré en Hongrie le 6 juin 2013 et a quitté le territoire hongrois le 7 juin 2013, soit dès le lendemain ; que ces dernières affirmations sont elles-mêmes en contradiction avec les informations figurant dans le fichier EURODAC qui fait apparaître que ses empreintes ont été relevées en Hongrie le 4 juin 2013 ; qu'il résulte de ce qui précède que ses allégations concernant les conditions d'accueil qui lui ont été réservées par les autorités hongroises en sa qualité de demandeur d'asile ne sauraient être regardées comme établies ; qu'enfin, le document d'ordre général qu'il produit concernant les modalités d'application des règles relatives à l'asile par les autorités hongroises ainsi que le rapport établi en 2011 par le comité Helsinki hongrois, relatif au traitement réservé aux demandeurs d'asile remis aux autorités de ce pays, complété par une note d'information de ce même comité, rédigée en 2013 mais non traduite en langue française, ne révèlent pas l'existence de défaillances systématiques de la procédure d'asile et des conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Hongrie qui constitueraient des motifs sérieux et avérés de croire que la demande d'asile de M. B...ne sera pas traitée par les autorités hongroises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile et que M. B... court un risque réel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas d'exécution de la décision de remise en date du 30 septembre 2013, alors, au demeurant, que la Hongrie, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que, pour transposer la directive 2013/33/UE du 26 juin 2013, ce pays a adopté, dès le 26 juin 2013, une loi qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2013 et que, dans une affaire n° 2283/12 jugée le 6 juin 2013, la Cour européenne des droits de l'Homme a relevé que si, dans des rapports établis en 2011 et 2012, le Haut commissariat aux réfugiés s'était déclaré préoccupé par la situation en Hongrie en matière d'asile, il n'avait jamais demandé aux Etats membres de l'Union européenne de s'abstenir de transférer des demandeurs d'asile en Hongrie au titre du règlement de Dublin et que, dans sa note datée du mois de décembre 2012, il avait salué des amendements législatifs adoptés par le Parlement hongrois, améliorant la situation des demandeurs d'asile ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise de l'intéressé aux autorités hongroises au motif qu'il existait un risque sérieux que la demande d'asile de M. B...ne soit pas traitée par les autorités hongroises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, justifiant que le préfet du Rhône fasse application des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du 18 février 2003 ;

7. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon ;

8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 19 du règlement (CE) n° 343/2003 susvisé : " 1. Lorsque l'État membre requis accepte la prise en charge d'un demandeur, l'État membre dans lequel la demande d'asile a été introduite notifie au demandeur la décision de ne pas examiner la demande, ainsi que l'obligation de le transférer vers l'État membre responsable. / 2. La décision visée au paragraphe 1 est motivée. Elle est assortie des indications de délai relatives à la mise en oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, les informations relatives au lieu et à la date auxquels le demandeur doit se présenter s'il se rend par ses propres moyens dans l'État membre responsable. Cette décision est susceptible d'un recours ou d'une révision. Ce recours ou cette révision n'a pas d'effet suspensif sur l'exécution du transfert, sauf lorsque les tribunaux ou les instances compétentes le décident, au cas par cas, si la législation nationale le permet. (...) " ;

9. Considérant que la décision du 30 septembre 2013 en litige, par laquelle le préfet du Rhône a décidé la remise de M. B...aux autorités hongroises en prévoyant que cette décision pourrait être exécutée d'office jusqu'au 1er février 2014, est régulièrement motivée en droit par le visa notamment des articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette décision est régulièrement motivée en fait par l'indication que M.B..., ressortissant du Kosovo, a présenté une demande d'asile auprès des services du préfet du Rhône, le 20 juin 2013, qu'un relevé de ses empreintes digitales a été effectué le même jour et que la comparaison de celles-ci au moyen du système " EURODAC " a révélé que l'intéressé avait déjà sollicité l'asile auprès des autorités hongroises, le 7 juin 2013, que, dès lors qu'il n'était pas établi que les autorités hongroises avaient pris une mesure d'éloignement à son encontre et l'avaient exécutée ni que M. B...avait quitté le territoire de l'Union européenne pendant une durée au moins égale à trois mois, la Hongrie devait être regardée comme l'Etat responsable de la demande d'asile de M. B...en application du c) du paragraphe 1 de l'article 16 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003, que les autorités de ce pays avaient donné leur accord, le 1er août 2013, pour la réadmission de M. B...en Hongrie et que, par courrier du 21 août 2013, notifié à l'intéressé le 23 du même mois, M. B... avait été informé qu'il ne serait pas admis provisoirement au séjour en France en qualité de demandeur d'asile et qu'il devait se rendre en Hongrie, Etat responsable de sa demande d'asile et avait été invité à présenter ses observations préalables sous quinze jours, qu'enfin qu'il n'avait pas paru opportun au préfet, au vu des éléments du dossier, de faire application des dispositions du 2 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ; qu'il résulte de ce qui précède que cette décision est régulièrement motivée au regard des dispositions précitées de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 2 de l'article 19 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte également de ce qui précède que le préfet du Rhône a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B... avant de décider sa remise aux autorités hongroises ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la procédure suivie pour l'adoption de la décision litigieuse aurait méconnu les dispositions du règlement du Conseil du 18 février 2003 et en particulier la procédure d'information prévue au 4 de l'article 3 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003, aux termes duquel : " Le demandeur d'asile est informé par écrit, dans une langue dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend, au sujet de l'application du présent règlement, des délais qu'il prévoit et de ses effets. ", alors, notamment que, par courrier du 21 août 2013, traduit dans la langue que l'intéressé utilise, M. B...avait été informé par le préfet du Rhône de l'accord donné par les autorités hongroises, le 1er août 2013, pour sa réadmission dans ce pays, responsable de l'examen de sa demande d'asile, qu'il ne serait pas fait application du 2 de l'article 3 ou de l'article 15 du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 et qu'il ne serait donc pas admis provisoirement au séjour en France ; que, par ce même courrier, le préfet du Rhône a ainsi indiqué à M. B...qu'il serait tenu de retourner en Hongrie avant le 1er février 2014, à une date fixée en commun, postérieurement à la notification d'un arrêté de réadmission, et que les services préfectoraux organiseraient son transfert dans ce pays en mettant à sa disposition un billet de voyage et un laissez-passer ; que, par ledit courrier, le préfet du Rhône a enfin demandé à M. B...de renvoyer dans le délai de quinze jours un formulaire mentionnant s'il acceptait la prise en charge par la préfecture du Rhône de son transfert en Hongrie et communiquant son lieu d'hébergement, en soulignant qu'en l'absence de réponse dans ce délai, sa remise aux autorités hongroises serait exécutée d'office, après un placement en rétention administrative, en l'invitant à présenter, sous quinze jours, ses observations sur l'éventuelle exécution d'office de ce transfert et en précisant enfin que s'il tentait de se soustraire à ce transfert, le délai d'exécution de cette mesure serait porté à dix-huit mois ;

12. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...ne saurait utilement invoquer à l'encontre de l'arrêté attaqué les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes desquelles la décision de remise à un Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile " peut être exécutée d'office par l'administration après que l'étranger a été mis en mesure de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix ", qui n'imposent pas de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations avant l'adoption de la décision de remise mais uniquement avant son exécution d'office ;

13. Considérant, en cinquième lieu, que M. B...ne peut pas utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision de remise en litige, de la directive 2005/85/CE susvisée, qui, en application de son 29ème considérant, ne s'applique pas aux procédures régies par le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2013 ;

14. Considérant, en sixième lieu, que, par les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger sa remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision de remise aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne ;

15. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 13 la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ;

16. Considérant qu'à supposer que M.B..., qui invoque l'absence de recours contentieux suspensif prévu par les dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, entende se prévaloir d'une violation des stipulations combinées des articles 3 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'arrêté par lequel l'administration décide qu'un demandeur d'asile, ressortissant d'un pays tiers à l'Union européenne, sera remis aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne, responsable de ladite demande d'asile, peut notamment faire l'objet d'un recours devant le juge des référés, qui répond aux exigences du droit au recours effectif garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne seraient pas compatibles avec le droit à un recours effectif, tel que garanti par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 30 septembre 2013 ordonnant la remise aux autorités hongroises de M. A...B..., lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de l'intéressé et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros à verser au conseil de M.B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Sur la requête enregistrée à la cour sous le n° 13LY03502 :

18. Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 1307405, rendu le 30 octobre 2013 par le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon, la requête n° 13LY03502 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement est devenue sans objet ; qu'il n'y a donc plus lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1307405, rendu le 30 octobre 2013, par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon, est annulé en tant qu'il a annulé la décision du 30 septembre 2013, par laquelle le préfet du Rhône a ordonné la remise aux autorités hongroises de M. A...B..., qu'il a enjoint au préfet du Rhône de réexaminer la situation administrative de l'intéressé et qu'il a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros à verser au conseil de M.B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif est rejetée, dans cette mesure.

Article 3 : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête du préfet du Rhône enregistrée à la cour sous le n° 13LY03502.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de la 1ère chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 juin 2014.

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Nos 13LY03194,...

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY03194
Date de la décision : 10/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Daniel RIQUIN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GUERAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-10;13ly03194 ?
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