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05/06/2014 | FRANCE | N°12LY21464

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 05 juin 2014, 12LY21464


Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué le jugement de la requête n° 12LY21464 de M. A...B...à la Cour administrative d'appel de Lyon ;

Vu I, la requête transmise par télécopie le 16 avril 2012, et confirmée par un original enregistré le 2 mai 2012 sous le n° 12LY21464, présentée pour M. A...B..., domicilié..., par Me Gonand, avocat ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribun

al administratif de Nîmes, n° 1103846 du 15 mars 2012, qui a rejeté sa demande tend...

Vu l'ordonnance n° 373441 du 4 décembre 2013 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué le jugement de la requête n° 12LY21464 de M. A...B...à la Cour administrative d'appel de Lyon ;

Vu I, la requête transmise par télécopie le 16 avril 2012, et confirmée par un original enregistré le 2 mai 2012 sous le n° 12LY21464, présentée pour M. A...B..., domicilié..., par Me Gonand, avocat ;

M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes, n° 1103846 du 15 mars 2012, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 15 novembre 2011 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à défaut pour lui d'obtempérer ;

2°) de prononcer l'annulation de l'arrêté en litige ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que le jugement se borne à reprendre l'argumentaire du représentant de l'Etat et les termes de l'arrêté en litige ; qu'au regard des conditions de son séjour, de ses attaches familiales en France, et des garanties d'insertion qu'il présente, l'arrêté en litige a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ni l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni aucune règle de droit ne subordonnent la délivrance d'un titre de séjour à la présence de l'ensemble de la famille du demandeur sur le sol français ; que le jugement et l'arrêté sont donc entachés d'erreur de droit ; qu'il a produit, à l'appui de sa demande d'admission au séjour une demande d'autorisation de travail pour un contrat à durée indéterminée ; que, dès lors qu'il présentait de solides attaches familiales et des garanties d'insertion professionnelles indiscutables sous la forme d'une promesse d'embauche, il remplissait les conditions justifiant son admission exceptionnelle au séjour en application de l'article L. 313-14 du même code ; que l'arrêté en litige est sur ce point entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu l'arrêté attaqué ;

Vu le mémoire en production des pièces enregistré le 14 mai 2012, présenté pour M. A... B... ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 7 mai 2014, présenté pour M. B...qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête d'appel, sauf à porter à 2 400 euros la somme à mettre à la charge de l'Etat sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille (section administrative appel) en date du 5 juin 2012, admettant M. A...B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu, II, la requête enregistrée le 20 février 2014 au greffe de la cour sous le n° 14LY00475, présentée pour M. A...B...élisant domicile..., par Me Gonand, qui demande à la cour :

1°) d'ordonner, en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1103846 du tribunal administratif de Nîmes en date du 15 mars 2012 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 15 novembre 2011 par lequel le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à défaut pour lui d'obtempérer ;

2°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros au profit de son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que, par ses articles 2 et 3, l'arrêté en litige lui fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et rend possible une exécution d'office qui n'exclut pas des sanctions pénales ; qu'en compromettant par ailleurs ses chances de donner suite à une promesse d'embauche, l'exécution du jugement risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ; qu'en outre, pour les motifs exposés dans son mémoire enregistré sous le n° 12LY21464, ses moyens d'annulation présentent un caractère sérieux ;

Vu le jugement attaqué ;

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, par une ordonnance du 27 février 2014, la requête a été dispensée d'instruction ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative appel) en date du 6 mars 2014, admettant M. A...B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la décision en date du 9 mai 2014 du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2014 :

- le rapport de M. Riquin, président de chambre ;

1. Considérant que les requêtes susvisées n°s 12LY21464 et 14LY00475 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur le recours n° 12LY21464 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l' accord (...). " ; que l'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7(...)." ;

3. Considérant que, portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée ; que, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord ; que, toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3, que M.B..., ressortissant marocain, ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision de refus d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ; qu'il est constant qu'il ne remplissait pas les conditions pour obtenir la délivrance d'un tel titre sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 susvisé ;

5. Considérant toutefois que ce qui précède ne fait pas obstacle à ce que M. B... invoque l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose, en appréciant, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il ressort du dossier que M.B..., âgé de 36 ans à la date de l'arrêté en litige, est célibataire et sans enfants, et dispose d'attaches familiales au Maroc où il réside plusieurs mois par an et où il a passé la plus grande partie de sa vie ; que, par suite, nonobstant la présence de ses parents et de plusieurs frères et soeurs sur le territoire national, ainsi que la promesse d'embauche dont l'intéressé se prévaut, le préfet de Vaucluse n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en rejetant sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). " ;

7. Considérant que, comme il a été dit au point 5, il ressort du dossier que M. B..., âgé de 36 ans à la date de l'arrêté en litige, est célibataire et sans enfant, et dispose d'attaches familiales au Maroc où il réside plusieurs mois par an et où il a passé la plus grande partie de sa vie ; que le préfet n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8, précité, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête, n'implique aucune mesure d'exécution ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter les conclusions présentées à cette fin par M.B... ;

Sur la requête n° 14LY00475 :

10. Considérant que, dès lors qu'il est statué au fond par le présent arrêt sur l'appel interjeté par M. A...B..., les conclusions de l'intéressé tendant à ce que la cour prononce le sursis à exécution du jugement attaqué sont devenues sans objet ; qu'il en est de même des conclusions aux fins d'injonction présentées dans le cadre de cette même requête ; qu'enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées devant la cour par M.B... ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 12LY21464 de M. A...B...est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 14LY00475.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 13 mai 2014, à laquelle siégeaient :

M. Riquin, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juin 2014.

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N° 12LY21464,...

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY21464
Date de la décision : 05/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. RIQUIN
Rapporteur ?: M. Daniel RIQUIN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-05;12ly21464 ?
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