Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 2013 au greffe de la Cour, présentée pour M. B... A..., domicilié ...;
M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300477 du 25 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 décembre 2012 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) de faire injonction au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa demande, dans le même délai et sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de a loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient qu'il est fondé à exciper de l'illégalité du refus d'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été opposé le 28 juillet 2011, lequel est entaché d'erreur de droit ; que les décisions litigieuses ont méconnu l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ainsi que les articles 41, 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, ainsi que les principes généraux de l'Union européenne de bonne administration et des droits de la défense ; que le préfet de l'Isère devait statuer sur sa demande de titre de séjour du 7 décembre 2011 avant de l'obliger à quitter le territoire français ; qu'il s'en remet pour le surplus à ses écritures de première instance ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du 6 juin 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) près le Tribunal de grande instance de Lyon a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. A...;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la directive 2005/85/CE du 1er décembre 2005 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2014:
- le rapport de M. Besse, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;
1. Considérant que M.A..., de nationalité kosovare, né en 1987, est entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 18 juillet 2011 ; qu'il a demandé son admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile, demande qui a été rejetée le 28 juillet 2011 par le préfet de l'Isère ; que, le 8 septembre 2011, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, le 7 décembre 2011, il a présenté par courrier une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, demande à laquelle il a été opposé une décision implicite de rejet ; que, par décisions du 27 décembre 2012, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ; que M. A...relève appel du jugement du 25 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;
Sur le refus de titre :
2. Considérant qu'un justiciable ne peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des stipulations inconditionnelles d'une directive que lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; qu'il suit de là que M. A...ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions du paragraphe 1 de l'article 10 de la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005, laquelle a été transposée dans le droit national par le décret n° 2011-1031 du 29 août 2011, qui a modifié l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, antérieurement à l'arrêté litigieux ; que, si M. A...soutient également qu'en méconnaissance des dispositions de cet article, il ne s'est pas vu remettre, dans une langue qu'il comprend, les informations relatives aux garanties accordées aux étrangers sollicitant leur admission au séjour en vue du dépôt d'une demande d'asile, ce moyen est inopérant à l'encontre de la décision de refus de séjour, prise après rejet définitif de sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
3. Considérant que l'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale ; que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et l'oblige à quitter le territoire français ne sont pas prises pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, M. A...ne peut exciper, au soutien de ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, de l'illégalité de la décision du 28 juillet 2011 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4. Considérant que la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A...a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par l'intéressé ; que, dès lors que par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 septembre 2011, devenue définitive, le statut de réfugié avait été refusé à M. A..., le préfet de l'Isère était tenu de refuser à ce dernier la délivrance du titre de séjour prévu au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le préfet de l'Isère se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de cette décision de refus, de la méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, des articles 41, 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que des principes généraux de l'Union européenne de bonne administration et des droits de la défense ne sont pas opérants ; que, dès lors, ils doivent être écartés ;
5. Considérant, il est vrai, que la décision litigieuse, emporte, subsidiairement, absence de régularisation de la situation de M.A... ;
6. Considérant que la décision a été signée par M. Charlot, secrétaire général adjoint de la préfecture de l'Isère, titulaire d'une délégation de signature à cet effet, en cas d'empêchement de M. Périssat, secrétaire général, par arrêté du 27 août 2012 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ;
7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le préfet de l'Isère n'aurait pas procédé à un réel examen de la situation de M.A..., alors même qu'il n'a pas repris les éléments de fait énoncés par celui-ci dans la demande de titre de séjour qu'il avait présentée, par télécopie, le 7 décembre 2011 ;
8. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...résidait en France depuis moins d'un an et demi, à la date de la décision attaquée ; que s'il fait état d'une vie maritale avec une compatriote avec laquelle il aurait eu un enfant, cette dernière avait fait l'objet, le 15 novembre 2012, de décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français devenues définitives ; que, dans ces conditions, et alors même que l'intéressé serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, circonstance au demeurant non établie, la décision de refus de séjour litigieuse n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas, non plus, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant que, pour les motifs exposés au paragraphe 3. ci-dessus, M. A...ne peut utilement exciper de l'illégalité de la décision lui refusant l'admission provisoire au séjour au soutien de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ;
11. Considérant que M. A...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, par décision du 27 décembre 2012 ; qu'ainsi, à cette date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ; que la circonstance que le préfet avait opposé un refus implicite à la demande de titre de séjour qu'il avait présentée le 7 décembre 2011 est sans incidence sur la décision d'obligation de quitter le territoire français, qui est fondée sur le refus de titre du 27 décembre 2012 ;
12. Considérant que M. A...ne peut se prévaloir des dispositions des articles 7 et 12 de la directive 2008/115 CE qui ont été transposées par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ; qu'en outre, en application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne sont pas incompatibles avec les articles 7 et 12 de la directive, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A... n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision de refus de délivrance du titre de séjour opposée, le même jour, à l'intéressé, dont elle découle, et qui vise notamment le 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne que la demande d'asile de l'intéressé a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 8 septembre 2011, dans le cadre de la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et qu'il ne peut dès lors pas prétendre à un titre de séjour entrant dans les prévisions du 8° de l'article L. 314-11 ou de l'article L. 313-13 dudit code ; que, par suite, la décision obligeant M. A...à quitter le territoire français est suffisamment motivée ;
13. Considérant qu'il ressort de l'ensemble des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, en prévoyant que ces décisions " n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ", ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ;
14. Considérant que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il sera en revanche susceptible de faire l'objet d'une telle décision ; qu'en principe il se trouve ainsi en mesure de présenter à l'administration, à tout moment de la procédure, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement ; qu'enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir ;
15. Considérant que M. A...fait valoir qu'il avait présenté le 7 décembre 2011 une demande d'admission exceptionnelle au séjour à laquelle le préfet de l'Isère n'a pas répondu et que ce dernier ne pouvait l'obliger à quitter le territoire français sans l'inviter à présenter ses observations, alors qu'il avait sollicité un entretien en préfecture ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'il disposait d'éléments pertinents tenant à sa situation personnelle susceptibles d'influer sur le sens de la décision ; que le moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;
Sur la décision fixant le délai de départ :
16. Considérant que la décision fixant le délai de départ volontaire est régulièrement motivée, en droit, par le visa des dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, en fait, par l'indication que la situation personnelle de M.A..., qui avait été rappelée, ne justifiait pas qu'un délai supérieur à un mois lui soit accordé, à titre exceptionnel ;
Sur le pays de destination :
17. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; que M. A...soutient qu'il est exposé à des risques en cas de retour dans son pays du fait de son appartenance à la communauté Rom, que son père a été enlevé par des Albanais et que sa mère a disparu ; que, toutefois, l'intéressé, dont la demande d'asile a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ne produit aucun élément probant à l'appui de ses allégations, au demeurant peu précises ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté ;
18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2014 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Samson, président-assesseur,
M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 avril 2014.
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N° 13LY01774
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