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03/04/2014 | FRANCE | N°13LY01563

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 03 avril 2014, 13LY01563


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 19 juin 2013, présentée par le préfet de l'Isère ;

Le préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301054, du 4 juin 2013, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 17 janvier 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C...B..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'issue de ce délai et lui a enjoint de délivrer à M. C...B...un certificat de r

sidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mo...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 19 juin 2013, présentée par le préfet de l'Isère ;

Le préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301054, du 4 juin 2013, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 17 janvier 2013 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. C...B..., l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office à l'issue de ce délai et lui a enjoint de délivrer à M. C...B...un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...B...devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Il soutient que M. B...ne démontre pas, par des attestations établies postérieurement, son ancienneté de séjour en France ; qu'aucun enfant n'est né de son union avec une Française qu'il pourra rejoindre après avoir obtenu un visa pour revenir régulièrement sur le territoire français et qu'il n'établit pas ne pas disposer d'attaches en Algérie, où il a passé la majeure partie de sa vie ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il avait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant l'arrêté en litige ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2013, présenté pour M. C... B..., domicilié..., qui conclut au rejet de la requête du préfet de l'Isère et à la mise à la charge de l'Etat de la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient, à titre principal, que la requête du préfet de l'Isère est irrecevable en raison de l'incompétence de son signataire ; à titre subsidiaire, que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'incompétence, d'un vice de procédure en l'absence de consultation de la commission du titre du séjour, d'une erreur de droit au regard du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît enfin les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et désignation du pays de renvoi sont illégales du fait de l'illégalité du refus de séjour susmentionné, méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont enfin entachées d'un erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 15 octobre 2013, présenté par le préfet de l'Isère, qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête d'appel, par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, que Mme A...était bien compétente pour signer le mémoire introductif d'appel ;

Vu la décision du 3 octobre 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2014 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien, s'est marié avec une ressortissante de nationalité française le 22 janvier 2011 ; que le 18 mars 2011 il a formé une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de français ; que, par arrêté du 17 janvier 2013, le préfet de l'Isère a refusé de délivrer un certificat de résidence à M. B...en sa qualité de conjoint de Française, a fait obligation à ce dernier de quitter le territoire français sous un mois et a désigné l'Algérie comme pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'issue de ce délai ; que, par jugement du 4 juin 2013, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions pour violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet de l'Isère interjette appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., ressortissant algérien né le 12 juin 1973, est entré régulièrement en Espagne, le 30 août 2007, muni d'un visa Schengen valable pour des séjours de 7 jours entre le 10 août et le 24 septembre 2007 sans pouvoir établir être entré en France le 31 août 2007 ou au plus tard avant l'expiration de ce visa ; que la décision de refus de séjour qui lui a été opposée est fondée d'une part sur l'absence de preuve d'une entrée régulière en France et, d'autre part, sur l'absence de preuve d'une vie commune des époux antérieurement au 22 janvier 2011, date de son mariage avec une Française ; que toutefois, à la date de la décision attaquée du 17 janvier 2013, le mariage de M. B... avait été célébré depuis près de deux ans ; que le préfet ne conteste pas l'existence d'une communauté de vie depuis cette date ni ne soutient que le mariage aurait été contracté dans le but exclusif d'obtenir un titre de séjour ; que, contrairement à ce que semble soutenir le préfet, M. B... ne relève d'aucune catégorie d'étrangers susceptible d'obtenir une autre autorisation que le titre de séjour demandé ; que, notamment, étant marié à une Française il ne relève pas de la procédure de regroupement familial ; qu'il ne relève pas davantage de celle du visa de long séjour ; que, dans ces conditions, alors même que M. B...n'a pas d'enfant et ne peut établir sa date d'entrée sur le territoire français, c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Grenoble a jugé que les décisions attaquées portaient au droit de M. B...à sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elles ont été prises et a annulé ces décisions ;

4. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, la somme de 1 000 euros à verser à Me Deschamps, avocat de M. B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Deschamps une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2014.

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N° 13LY01563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01563
Date de la décision : 03/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : BRESSY-RÄNSCH DESCHAMPS VILLEMAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-04-03;13ly01563 ?
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