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18/03/2014 | FRANCE | N°13LY01678

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 18 mars 2014, 13LY01678


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 juin 2013, présentée pour M. A... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207903 du 12 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 août 2012 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et l'a obligé, dans le délai de trente jours, à quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissib

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2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention "...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 28 juin 2013, présentée pour M. A... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207903 du 12 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 août 2012 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et l'a obligé, dans le délai de trente jours, à quitter le territoire français à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il serait légalement admissible ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " d'un an renouvelable dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Le requérant soutient :

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision préfectorale lui refusant un titre de séjour :

- qu'il séjourne en France avec son frère et ses parents dont les problèmes de santé nécessitent sa présence à leurs côtés ; qu'il justifie d'une forte volonté d'intégration et qu'il bénéficie de deux promesses d'embauche ; que pour l'ensemble de ces motifs, la décision a porté atteinte à ses droits garantis par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français :

- que la décision d'éloignement est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour, et pour les mêmes moyens, a porté atteinte à ses droits garantis par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision fixant le délai de départ :

- que cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi :

- que cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- qu'elle est entachée d'un défaut de motivation en fait ;

- qu'elle méconnaît les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard aux risques auxquels un retour dans son pays l'expose ;

- que, nonobstant le rejet de sa demande d'asile par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, le préfet, qui aurait dû procéder à un examen particulier de sa situation au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a entaché sa décision d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'il démontre la réalité des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2013 présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge du requérant une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet soutient :

- que la décision de refus de séjour n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

- qu'il ne peut être excipé de l'illégalité du refus de titre de séjour à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français ; que cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

- qu'il ne peut être excipé de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le délai de départ volontaire ;

- qu'il ne peut être excipé de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ; que cette décision n'est pas entachée d'un défaut de motivation en fait et n'a pas méconnu les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) en date du 26 avril 2013 admettant M. A... B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture d'instruction au 13 novembre 2013 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2014 :

- le rapport de Mme Terrade, premier conseiller ;

1. Considérant que M. A... B..., ressortissant russe d'origine arménienne né le 24 juin 1983, entré le 7 mars 2010 sur le territoire français sous couvert d'un visa de court séjour a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que, par décision du 28 novembre 2011, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté cette demande, rejet confirmé le 13 juillet 2012 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par la présente requête, M. B... demande l'annulation du jugement du 12 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 9 août 2012 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français vers le pays dont il a la nationalité, devant être exécutée dans le délai de trente jours ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que M. B..., entré en France à l'âge de 27 ans en compagnie de ses parents et de son frère aîné, fait valoir l'état de santé déficient de ses parents, âgés respectivement de 70 ans et 60 ans, dont il soutient qu'ils ne pourraient pas être pris en charge en Russie et se prévaut de la nécessité pour lui de demeurer à leurs côtés, pour leur venir en aide et leur prêter assistance ; qu'il résulte toutefois des pièces du dossier que, suite au rejet de leur demande d'asile, le préfet du Rhône, estimant qu'ils n'avaient pas vocation à demeurer en France, a refusé d'admettre au séjour chacun des membres de la famille et les a obligés à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ; que le requérant, célibataire et sans enfant à charge, se borne à soutenir qu'il est animé d'une réelle volonté d'intégration et qu'il dispose de deux promesses d'embauche, l'une en tant que cuisinier dans un restaurant arménien et l'autre comme nettoyeur automobile ; que toutefois, et nonobstant ces circonstances, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France et à la situation d'ensemble des membres de sa famille, le préfet a pu refuser de lui délivrer un titre de séjour sans porter une atteinte disproportionnée à ses droits garantis par les stipulations précitées ;

4. Considérant qu'à défaut de tout autre élément apporté par le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et le délai de départ volontaire :

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui a été opposé à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre et la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours pour exécuter la mesure d'éloignement ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine.(...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Rhône a, par arrêté du 9 août 2012 refusé de délivrer un titre de séjour à M.B... ; qu'ainsi, à la date de la décision d'éloignement contestée, du même jour, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

8. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être énoncés au point 3, le préfet du Rhône a pu, sans méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B..., assortir le refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

9. Considérant que les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégales, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence de l'illégalité de ces décisions, de la décision fixant le pays de destination ;

10. Considérant qu'il ressort de la lecture même de l'arrêté contesté du 9 août 2012 fixant le pays à destination duquel M. B... pourra être reconduit d'office à l'expiration du délai de départ volontaire de trente jours, qui vise notamment l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet du Rhône a relevé que l'intéressé n'établissait pas, en cas d'exécution de la décision d'éloignement prise à son encontre, que sa vie ou sa liberté seraient menacées ou qu'il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et doit être écarté ;

11. Considérant, qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) " ; que l'article 3 dispose quant à lui : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si le requérant soutient qu'il n'a aucune nationalité, il n'établit, ni même n'allègue avoir formulé une demande de reconnaissance du statut d'apatride ; qu'il ne démontre pas, par les pièces qu'il produit, ne pas être légalement admissible en Russie, ni qu'il y serait exposé actuellement et personnellement à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans ce pays ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait cru tenu par les refus d'asile opposés à l'intéressé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, et aurait omis de procéder à un examen particulier de la situation de M. B... ; que, par suite, l'autorité compétente a pu, sans méconnaître les stipulations précitées, ni entacher sa décision d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé, désigner la Russie ou tout autre pays dans lequel ce dernier établit être admissible, comme pays de renvoi ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

14. Considérant que l'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. B... sur ce fondement ne peuvent qu'être rejetées ;

15. Considérant, en outre qu'il résulte de ces dispositions que, si une personne publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat peut néanmoins demander au juge l'application de cet article au titre des frais spécifiques exposés par elle à l'occasion de l'instance, elle ne saurait se borner à faire état d'un surcroît de travail de ses services ; que si la charge imposée aux services de l'Etat spécialement dans le domaine du droit des étrangers, par un contentieux systématique et abondant, est réelle, notamment en termes de temps de travail des agents du service des étrangers qui s'y consacrent et, par voie de conséquence, pour les finances publiques, dans un contexte où l'Etat a lui-même de surcroît organisé un dispositif d'aide juridictionnelle que le requérant a d'ailleurs sollicité, cette circonstance ne suffit pas à justifier en l'espèce la condamnation de la partie perdante, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à verser une quelconque somme à l'Etat dès lors que la personne publique s'est abstenue de faire état précisément des frais qu'elle a exposés pour défendre à l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le préfet du Rhône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 18 février 2014, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

Mme Terrade, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 mars 2014.

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N° 13LY01678


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01678
Date de la décision : 18/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle TERRADE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : ROBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-03-18;13ly01678 ?
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