Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2013, présentée pour Mme C...D..., veuve B...domiciliée ...;
Mme B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300930 du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère en date du 15 novembre 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa demande de titre de séjour et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
elle soutient que :
- le préfet devait statuer sur sa demande au titre de son état de santé ; la décision de refus de titre est donc une décision implicite de rejet de sa demande de titre sur le fondement de son état de santé ;
- le préfet n'a pas examiné sa situation personnelle et ne devait pas se limiter au constat du refus d'asile ;
- son droit d'être entendue a été violé dès lors qu'elle n'a pas pu présenter ses observations avant l'édiction de la mesure d'éloignement ;
- le préfet devait demander l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; la situation sanitaire au Kosovo interdit qu'elle puisse faire l'objet d'une reconduite dans ce pays ; il lui a été refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour sur le fondement de son état de santé ;
- les décisions violent son droit à une vie privée et familiale étant en France depuis le 9 septembre 2010 avec sa famille et s'y trouvant bien intégrée ; le préfet a entaché sa décision de refus de titre d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa vie privée et familiale ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du 4 juillet 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section cour administrative d'appel) a constaté la caducité de la demande de bénéfice de l'aide juridictionnelle de Mme C...B...;
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2014 :
- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
1. Considérant que MmeB..., ressortissante kosovare née en 1944, est entrée en France le 9 septembre 2010 et a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 11 janvier 2011 et par la Cour nationale du droit d'asile le 16 septembre 2011 ; qu'elle soutient qu'elle a tenté de présenter une demande de titre de séjour santé les 12 et 16 décembre 2011 que les services de la préfecture de l'Isère ont toutefois refusé d'enregistrer ; que par l'arrêté attaqué en date du 15 novembre 2012, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois ; qu'elle relève appel du jugement du 16 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère ;
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant que la décision attaquée comporte l'énoncé des considérations de droit et les éléments de fait propres à la situation de l'intéressée qui en constituent le fondement ; qu'elle porte uniquement sur la demande présentée par Mme B...le 10 septembre 2010, dans le cadre des dispositions des articles L. 741-1, L. 314-11 8° et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si la requérante soutient que la préfecture a refusé d'enregistrer sa demande de titre de séjour fondée sur son état de santé, l'attestation fournie à l'appui de cette affirmation mentionne seulement qu'elle s'est présentée le 16 décembre 2011 à la préfecture de l'Isère et qu'il ne lui a pas été délivré de dossier de demande de titre de séjour ; qu'une demande de titre de séjour sur le fondement de l'état de santé de la requérante n'a pas été adressée au préfet de l'Isère ; que par suite, la requérante n'est, en tout état de cause, fondée à soutenir ni que la décision est insuffisamment motivée comme ne faisant pas mention de son état de santé et ne visant pas l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni que celle-ci aurait été prise sans examen réel et sérieux de sa situation ;
3. Considérant que Mme B...soutient qu'elle vit en France depuis le 9 septembre 2010, qu'elle a dû fuir son pays d'origine après la mort de son mari et que son fils, sa belle-fille et ses petits-enfants résident en France, qu'elle est intégrée socialement par son investissement dans la vie associative et que son état de santé nécessite le soutien de ses proches ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les affections dont elle souffre ne peuvent faire l'objet dans son pays d'origine de traitements appropriés ; que les membres de sa famille résidant en France font l'objet de la même mesure d'éloignement ; qu'eu égard à la durée de son séjour et à l'absence d'autres liens personnels ou familiaux suffisamment durables et intenses sur le territoire national, l'arrêté attaqué ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de Mme B... à mener une vie privée et familiale normale par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
4. Considérant que lorsqu'il oblige un étranger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont les dispositions sont issues de la transposition en droit national de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, le préfet doit appliquer les principes généraux du droit de l'Union européenne, dont celui du droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle défavorable ne soit prise à son encontre, tel qu'il est énoncé notamment au 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que ce droit n'implique pas systématiquement l'obligation, pour l'administration, d'organiser, de sa propre initiative, un entretien avec l'intéressé, ni même d'inviter ce dernier à produire ses observations, mais suppose seulement que, informé de ce qu'une décision lui faisant grief est susceptible d'être prise à son encontre, il soit en mesure de présenter spontanément des observations écrites ou de solliciter un entretien pour faire valoir ses observations orales ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, y compris au titre de l'asile, l'étranger, du fait même de l'accomplissement de cette démarche qui vise à ce qu'il soit autorisé à se maintenir en France et ne puisse donc pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement forcé, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il sera en revanche susceptible de faire l'objet d'une telle décision ; qu'en principe, il se trouve ainsi en mesure de présenter à l'administration, à tout moment de la procédure, des observations et éléments de nature à faire obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement ; qu'enfin, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la décision faisant grief que si la procédure administrative en cause aurait pu, en fonction des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, aboutir à un résultat différent du fait des observations et éléments que l'étranger a été privé de faire valoir ;
5. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle n'a pas été informée par le préfet de ce qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et n'a, de ce fait, pas été mise en mesure, en violation de son droit à être entendue, de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette mesure ; qu'en tout état de cause, si elle fait état de démarches effectuées auprès de la préfecture en décembre 2011, elle ne démontre pas pour autant devant le juge qu'elle dispose d'éléments pertinents tenant à sa situation personnelle ou à son état de santé qui auraient été de nature à influer sur le sens de la décision ; que le moyen ne peut dès lors qu'être écarté ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; / (...). " ; que, comme il est dit au point 2 ci-dessus, Mme B...ne justifie pas avoir demandé un titre de séjour en raison de son état de santé ; qu'elle ne saurait dès lors sérieusement reprocher au préfet de ne pas avoir examiné particulièrement sa situation à cet égard ; qu'il ne ressort pas du certificat médical produit que le défaut de prise en charge médicale de l'intéressée pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'un traitement approprié serait absent dans le pays de renvoi ; que si Mme B...fait également valoir que ses troubles sont en rapport avec ce qu'elle a vécu dans son pays, elle ne verse aucune pièce susceptible de corroborer cette allégation ; que l'obligation de quitter le territoire français la concernant n'a dès lors pas méconnu les dispositions précitées ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions attaquées ; que par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et ses conclusions tendant à mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2014 à laquelle siégeaient :
M. Martin, président de chambre,
M. Clément et MmeA..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 18 février 2014.
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N° 13LY01955
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