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30/01/2014 | FRANCE | N°13LY00803

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2014, 13LY00803


Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2013 au greffe de la Cour, présentée par le préfet de l'Ain, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1301550-1301551 du 7 mars 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés en date du 24 octobre 2012, en tant qu'ils obligeaient M. B...A...et Mme C...épouseA..., à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixaient leurs pays de destination, ainsi que ses arrêtés en date du 1er mars 2013 assignant à résidence M. et Mme A... ;
>2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme A...devant le Tribunal adm...

Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2013 au greffe de la Cour, présentée par le préfet de l'Ain, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1301550-1301551 du 7 mars 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés en date du 24 octobre 2012, en tant qu'ils obligeaient M. B...A...et Mme C...épouseA..., à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixaient leurs pays de destination, ainsi que ses arrêtés en date du 1er mars 2013 assignant à résidence M. et Mme A... ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme A...devant le Tribunal administratif ;

Il soutient que le jugement attaqué est " irrégulier " dans la mesure où la procédure d'édiction de ses arrêtés du 24 octobre 2012 n'a pas méconnu le droit de M. et Mme A...d'être entendus avant l'édiction d'une mesure individuelle défavorable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2013, présenté pour M. B... A... et MmeC..., épouse A...;

M. et Mme A...concluent :

- à titre principal, au non-lieu à statuer,

- à titre subsidiaire, au rejet de la requête,

- en tout état de cause, à la mise à la charge de l'Etat du versement à leur conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Ils soutiennent :

- que, du fait de la délivrance en mai 2013 d'autorisations provisoires de séjour à M. et MmeA..., les arrêtés d'obligation de quitter le territoire français du 24 octobre 2012, qui n'ont pas été exécutés, ont été implicitement mais nécessairement abrogés et ont disparu de l'ordonnancement juridique ; qu'il n'y a donc plus lieu de statuer sur leur légalité ;

- qu'ayant de lui-même implicitement abrogé les arrêtés d'obligation de quitter le territoire français, le préfet ne justifie pas d'un intérêt à agir contre le jugement prononçant l'annulation de ces arrêtés ;

- qu'en tout état de cause, les arrêtés d'obligation de quitter le territoire français sont illégaux au regard de leur statut de demandeurs d'asile, et notamment des stipulations des articles 3 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en effet, les décisions du 18 septembre 2012 refusant d'admettre provisoirement au séjour M. et Mme A...en qualité de demandeurs d'asile ont été annulées, avec effet rétroactif, par jugements du 2 mai 2013 du Tribunal administratif de Lyon, devenus définitifs ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 septembre 2013, présenté par le préfet de l'Ain, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Le préfet de l'Ain fait valoir en outre qu'en délivrant à M. et MmeA..., d'une part, des autorisations provisoires de séjour valables du 8 mars au 7 mai 2013 et, d'autre part, des récépissés constatant le dépôt de demandes d'asile, valables du 23 mai au 22 août 2013, il s'est borné à prendre les mesures qu'impliquaient l'exécution des jugements des 7 mars et 2 mai 2013 et n'a pas, de lui-même, abrogé les arrêtés portant obligation de quitter le territoire français pris le 24 octobre 2012, lesquels ont d'ailleurs reçu un commencement d'exécution, dans la mesure où les intéressés ont été assignés à résidence par arrêtés du 1er mars 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les décisions du 4 juillet 2013, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a, d'une part, admis M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et, d'autre part, refusé d'admettre Mme A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014, le rapport de M. Meillier, conseiller ;

1. Considérant que M. B...A...et MmeC..., son épouse, ressortissants kosovars nés en 1956 et 1962, sont entrés en France, respectivement, les 14 mars et 4 décembre 2011 ; qu'ils ont sollicité leur admission au séjour au titre de l'asile ; que leurs demandes d'asile respectives ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides les 27 septembre 2011 et 16 janvier 2012, puis le 10 juillet 2012 par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'ils ont sollicité le 5 septembre 2012 le réexamen de leurs demandes d'asile ; que, par décisions en date du 18 septembre 2012, le préfet de l'Ain a refusé de les admettre, une nouvelle fois, provisoirement au séjour en qualité de demandeurs d'asile, aux fins de ce réexamen ; que, par décisions du 5 octobre 2012, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté les nouvelles demandes d'asile des intéressés ; que M. et Mme A...ont déposé le 7 novembre 2012 devant la Cour nationale du droit d'asile un recours contre ces décisions ; qu'entre temps, M. A...a également sollicité, par demande du 31 juillet 2012, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le médecin de l'agence régionale de santé a rendu le 27 août 2012 son avis sur l'état de santé de M. A...; que, par arrêtés en date du 24 octobre 2012, le préfet de l'Ain a refusé de délivrer à M. et Mme A...un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé leurs pays de destination ; que, par arrêtés en date du 1er mars 2013, le même préfet a assigné à résidence M. et Mme A...; que, par deux jugements en date du 2 mai 2013, le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé les décisions du 18 septembre 2012 refusant d'admettre provisoirement au séjour M. et Mme A...et, d'autre part, enjoint au préfet de délivrer à ces derniers, dans un délai de deux mois, des autorisations provisoires de séjour jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur leurs recours ; que, par deux autres jugements du même jour, le même Tribunal a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation des décisions de refus de titre de séjour dont ils ont fait l'objet ; qu'entre temps, par un jugement unique en date du 7 mars 2013, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé les arrêtés du 24 octobre 2012, en tant qu'ils obligeaient M. et Mme A...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixaient leurs pays de destination, ainsi que les arrêtés du 1er mars 2013 les assignant à résidence et, d'autre part, enjoint au préfet de délivrer sans délai aux intéressés des autorisations provisoires de séjour et de réexaminer leur situation dans un délai de deux mois ; que le préfet de l'Ain relève appel de ce dernier jugement ;

Sur l'exception de non-lieu opposée par M. et Mme A...:

2. Considérant qu'en délivrant à M. et MmeA..., au demeurant antérieurement à l'introduction de sa requête, des autorisations provisoires de séjour valables du 8 mars au 7 mai 2013, le préfet de l'Ain s'est borné à exécuter l'article 2 du jugement attaqué lui prescrivant, en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de délivrer aux intéressés des autorisations provisoires de séjour jusqu'à ce qu'il ait à nouveau statué sur leur situation ; qu'ainsi, la délivrance de ces autorisations provisoires de séjour ne prive pas d'objet le recours du préfet tendant à l'annulation des jugements par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses arrêtés du 24 octobre 2012 et 1er mars 2013 ; que, toutefois, le préfet a également délivré aux intéressés, postérieurement à l'introduction de sa requête, des récépissés constatant le dépôt d'une demande d'asile, valables du 23 mai au 22 août 2013 ; que l'exécution du jugement attaqué n'impliquait pas la délivrance de ces documents provisoires de séjour, prévus par les articles L. 742-1, R. 742-2 et R. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et réservés aux étrangers dont la demande d'asile est en cours d'examen devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile ; que si l'exécution des jugements du 2 mai 2013 du Tribunal administratif de Lyon annulant les décisions de refus d'admission provisoire au séjour opposées aux intéressés le 18 septembre 2012 impliquait en revanche qu'il soit délivré à ces derniers des récépissés constatant le dépôt d'une demande d'asile, lesdits jugements, régulièrement notifiés le 23 mai 2013, sont devenus définitifs, en l'absence d'appel du préfet de l'Ain, lequel a par conséquent renoncé à contester le droit des intéressés à bénéficier de documents provisoires de séjour jusqu'à ce que le Cour nationale du droit d'asile ait statué sur leur recours ; qu'indépendamment de la délivrance, le 8 mars 2013, de précédentes autorisations provisoires de séjour, le préfet, en délivrant à M. et Mme A...de tels récépissés, a implicitement mais nécessairement abrogé ses arrêtés du 24 octobre 2012 obligeant les intéressés à quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant leur pays de destination en cas de reconduite d'office ; que la délivrance de ces récépissés aurait également abrogé les arrêtés du 1er mars 2013 assignant à résidence les intéressés si ces arrêtés avaient été renouvelés, ainsi que le permet l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs et en tout état de cause, la seule édiction d'arrêtés d'assignation à résidence, même pris sur le fondement des obligations de quitter le territoire français en date du 24 octobre 2012, ne constitue pas une mise à exécution de ces mesures d'éloignement, dès lors que les intéressés sont demeurés sur le territoire français ; que, dans ces conditions, il n'y a plus lieu à statuer sur la requête du préfet de l'Ain et l'exception de non-lieu opposée par M. et Mme A...doit être accueillie ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

3. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme quelconque à verser à M. et Mme A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du préfet de l'Ain.

Article 2 : Les conclusions de M. et Mme A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Mme C...épouse A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.

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N° 13LY00803

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00803
Date de la décision : 30/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Restrictions apportées au séjour - Assignation à résidence.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Procédure - Incidents - Non-lieu - Existence.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-30;13ly00803 ?
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