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30/01/2014 | FRANCE | N°13LY00707

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2014, 13LY00707


Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2013, présentée pour l'association Dignité animale, dont le siège est 6 place Saint Jean à Lyon (69005), représentée par sa présidente en exercice ;

L'association Dignité Animale demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005925 du 23 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de la décision du 1er avril 2010 par laquelle le préfet du Rh

ne lui a imposé de déplacer la manifestation prévue le 3 avril 2010 ;

2°) de cond...

Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2013, présentée pour l'association Dignité animale, dont le siège est 6 place Saint Jean à Lyon (69005), représentée par sa présidente en exercice ;

L'association Dignité Animale demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005925 du 23 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de la décision du 1er avril 2010 par laquelle le préfet du Rhône lui a imposé de déplacer la manifestation prévue le 3 avril 2010 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de la décision du 1er avril 2010 par laquelle le préfet du Rhône lui a imposé de déplacer la manifestation prévue le 3 avril 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'Etat a commis une faute en lui interdisant de manifester à l'angle du quai Perrache et de la rue Nivière-Chol, à Lyon, face au cirque, car la motivation de la décision tenant à ce que la proximité de la manifestation avec le cirque Pinder est de nature à générer des troubles à l'ordre public par l'organisation d'éventuelles contre-manifestations est discriminatoire et non-fondée, dès lors qu'elle est une association pacifique, respectueuse des lois et règlements, que le motif tenant à l'insécurité éventuelle d'une contre-manifestation est purement subjectif et permettrait toujours de porter atteinte à la liberté d'expression ; que le motif tenant à ce que le lieu prévu n'est ni un lieu de passage, ni un site d'affluence traditionnel du public lyonnais procède d'une analyse arbitraire et subjective, dès lors que l'information du public ne peut s'effectuer que sur un lieu de passage et non dans un lieu éloigné, interdisant toute action d'information et faisant obstacle à la liberté d'information sans que ne soit causée une gêne à la circulation du public ; qu'il appartenait au préfet de déployer les services de police pour encadrer le personnel du cirque ; qu'elle entendait informer le public de la condamnation dont avait fait l'objet le cirque Pinder pour délit d'exploitation irrégulière d'établissement détenant des animaux non domestiques ; que la faute commise par l'Etat lui a occasionné un préjudice grave et spécial et a porté des atteintes graves à sa liberté d'expression, à son fonctionnement et, par voie de conséquence, à sa réputation, sa dignité et celle de ses membres ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 26 août 2013 fixant la clôture de l'instruction au 28 octobre 2013 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2013, présenté pour le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- à titre principal, l'appel est irrecevable dès lors que la présidente de l'association n'a pas le pouvoir d'ester en justice au nom de l'association ;

- à titre subsidiaire, la requête n'est pas fondée ; les moyens tirés de l'atteinte à la liberté d'expression, de ce que la décision litigieuse instaure une différence de traitement entre l'association et les organisateurs du cirque, de ce que ce sont ces derniers qui génèrent un risque pour l'ordre public et contestant le motif tiré du risque de contre-manifestation, peuvent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; la décision du 1er avril 2010, qui n'interdisait pas une manifestation mais ordonnait son déplacement à quelques centaines de mètres, n'est pas motivée de manière discriminatoire, dès lors que les manifestations de l'association ont suscité l'animosité de certains acteurs du monde du cirque et que de tels troubles aux abord immédiats du cirque se seraient déroulés en présence du public, et notamment de nombreux enfants ; le lieu de manifestation envisagé par l'association n'était pas un lieu unique pour exprimer ses idées de manière efficace ; d'autant qu'il ne s'agit pas d'un lieu de passage ni d'un site traditionnel d'affluence pour le public lyonnais ; le moyen tiré de la différence de traitement est inopérant dès lors que les protagonistes sont dans des situations différentes ; l'Etat n'a commis aucune faute et l'association ne justifie d'aucun préjudice susceptible d'avoir un lien direct avec la décision préfectorale du 1er avril 2010 ;

Vu l'ordonnance du 25 octobre 2013 reportant la clôture de l'instruction au 13 novembre 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le décret-loi du 23 octobre 1935 portant réglementation des mesures relatives au renforcement du maintien de l'ordre public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 :

- le rapport de M. Wyss, président,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de MeA..., représentant l'association Dignité animale ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par décision du 1er avril 2010, le préfet du Rhône a demandé à l'association Dignité animale de modifier le lieu de la manifestation qu'elle entendait tenir le 3 avril 2010, initialement prévue à l'angle du quai Perrache et de la rue Nivière Chol à Lyon, en le transférant à l'angle de ce même quai et de la rue Emile Duployé ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de cette association tendant à ce que le préfet soit condamné à lui verser une somme de 50 000 euros en raison du préjudice causé du fait de cette décision ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par l'Etat à la requête d'appel et à la demande de première instance ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 3 du décret-loi du 23 octobre 1935 alors en vigueur, repris à l'article L. 211-4 du code de la sécurité intérieure : " Si l'autorité investie des pouvoirs de police estime que la manifestation projetée est de nature à troubler l'ordre public, elle l'interdit par un arrêté qu'elle notifie immédiatement aux signataires de la déclaration au domicile élu " ; que, s'il appartient à l'autorité investie du pouvoir de police de prendre les dispositions qu'exige le maintien de l'ordre public, il lui incombe, dans l'exercice de ses pouvoirs, de concilier son action avec le respect de la liberté de réunion et de manifestation ; que le respect de la liberté de manifestation ne fait toutefois pas obstacle à ce que cette autorité interdise une manifestation ou en modifie les conclusions, si une telle mesure est seule de nature à prévenir un trouble à l'ordre public ;

3. Considérant que la décision du 1er avril 2010 a été motivée principalement par le fait que la proximité de l'emplacement envisagé par l'association Dignité animale, devant l'entrée du cirque Pinder, était de nature à générer des troubles à l'ordre public par l'organisation d'éventuelles contre-manifestations ; qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport de la direction centrale de la sécurité publique du 30 mars 2010 produit par le préfet du Rhône en première instance, que la présence de militants de la défense des animaux à proximité immédiate de l'entrée de l'établissement était susceptible de générer des tensions avec le personnel du cirque, à l'instar de celles qui avaient été constatées en 2009 lors de précédentes actions ; que, compte tenu de ce risque et de la nécessité d'éviter des débordements à l'entrée du cirque, où se trouve un public composé notamment d'enfants, l'interdiction de manifester devant l'entrée du cirque et le déplacement ordonné du lieu du rassemblement, n'a pas excédé ce qui était nécessaire au maintien de l'ordre public ; que, si l'association requérante allègue qu'elle ne pouvait utilement se rassembler à l'endroit proposé par le préfet, qui n'est pas un lieu de passage du public qu'elle entend sensibiliser, cette allégation n'est pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors au demeurant que le lieu où la manifestement a été déplacée se situe dans une rue immédiatement parallèle à celle dans laquelle l'association souhaitait se réunir ; que l'association Dignité animale ne peut utilement, pour contester la nécessité et la proportionnalité de la mesure ordonnée, faire état des condamnations pénales dont a fait l'objet le cirque Pinder, soutenir que les membres de ce cirque sont seuls responsables du risque en cause ou invoquer une différence injustifiée de traitement entre les organisateurs du cirque et elle-même ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la décision du 1er avril 2010 procèderait d'un détournement de pouvoir ou d'une volonté d'interdire de manière générale et systématique l'ensemble des manifestations qu'elle entend organiser ; qu'ainsi, l'interdiction de manifester au lieu initialement prévu n'est pas illégale et ne saurait constituer une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Dignité animale n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Dignité animale est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Dignité animale et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2014, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- MM. C...et B...D..., présidents-assesseurs,

Lu en audience publique, le 30 janvier 2014.

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N° 13LY00707

N° 13LY00707


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-04-02 Police. Police générale. Tranquillité publique.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Jean Paul WYSS
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP BAULIEUX BOHE MANDY et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 30/01/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 13LY00707
Numéro NOR : CETATEXT000028543916 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-30;13ly00707 ?
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