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09/01/2014 | FRANCE | N°13LY01370

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2014, 13LY01370


Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2013, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

Le préfet demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1302179 du 29 avril 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il annulé ses décisions de refus de délai de départ et d'assignation à résidence de M.B..., prises le 23 avril 2012 ;

Il soutient que la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français, en date du 12 décembre 2011 lui a été régulièrement notifiée, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal ;

Vu le jugement attaqué ;

V

u la décision en date du 6 septembre 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle accorde...

Vu la requête, enregistrée le 30 mai 2013, présentée par le préfet de la Haute-Savoie ;

Le préfet demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1302179 du 29 avril 2013 du Tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il annulé ses décisions de refus de délai de départ et d'assignation à résidence de M.B..., prises le 23 avril 2012 ;

Il soutient que la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français, en date du 12 décembre 2011 lui a été régulièrement notifiée, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision en date du 6 septembre 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle accorde l'aide totale à M.B... ;

Vu l'ordonnance du 11 septembre 2013 fixant au 7 octobre 2013 la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2013 :

- le rapport de M. Gazagnes, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A...B..., de nationalité kosovare, a demandé au Tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 avril 2012 du Préfet de la Haute Savoie l'obligeant à quitter le territoire français, lui refusant un délai de départ et l'assignant à résidence ; que le Tribunal, par le jugement attaqué, a rejeté la demande concernant l'obligation de quitter le territoire français et a annulé les décisions de refus de délai de départ et d'assignation à résidence ; que le Préfet de la Haute Savoie relève appel de ce jugement en tant qu'il a annulé ses deux dernières décisions ;

Sur le bien fondé du jugement :

2. Considérant que le Préfet fait valoir que le Tribunal a estimé à tort que la notification de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français du 11 décembre 2011 était irrégulière, pour absence de preuve de remise de l'avis d'instance informant M.B... et que, dès lors, ce dernier ne pouvant être regardé comme s'étant soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement au sens du point d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France, la décision portant refus de lui accorder un délai de départ contenue dans l'arrêté du 23 avril 2013 et par voie de conséquence, l'arrêté d'assignation à résidence du même jour devaient être annulés ;

3. Considérant qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance du pli recommandé contenant une décision, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse du destinataire, dès lors du moins qu'il résulte, soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

4. Considérant qu'il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'instruction postale du 6 septembre 1990, qu'en cas d'absence du destinataire d'une lettre remise contre signature, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de vaine présentation sur le volet " preuve de distribution " de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres volets, en deuxième lieu, détacher de la liasse l'avis de passage et y mentionner le motif de non distribution, la date et l'heure à partir desquelles le pli peut être retiré au bureau d'instance et le nom et l'adresse de ce bureau, cette dernière indication pouvant résulter de l'apposition d'une étiquette adhésive, en troisième lieu, déposer l'avis ainsi complété dans la boîte aux lettres du destinataire et, enfin, reporter sur le pli le motif de non distribution et le nom du bureau d'instance ;

5. Considérant que, compte tenu de ces modalités, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière, le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée par voie de duplication, la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ;

6. Considérant que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, il ressort des pièces du dossier que le pli contenant la décision portant notification de la décision préfectorale du 12 décembre 2011 faisant obligation à M. B...de quitter le territoire français, a été présenté le 24 décembre 2011 à l'adresse fournie par l'intéressé à l'administration ; que la mention " avisé le 24/12/2011 " a été portée sur l'avis de réception, lequel a été retourné à l'administration avec la mention " non réclamé " ; qu'ainsi, la décision du 12 décembre 2011 doit être regardée comme ayant été régulièrement notifiée le 24 décembre 2011 à M. B...et pouvait servir de fondement aux décisions du 23 avril 2012 portant refus de lui accorder un délai de départ et l'assignant à résidence ; que le préfet de la Haute-Savoie est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a retenu ce moyen pour annuler ses décisions du 23 avril 2012 ;

7. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens soulevés par M. B...contre ces deux décisions ;

Sur la légalité de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L 511-1.I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...); 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement " ; qu'il résulte de ce qui précède que M. B...ne peut utilement soutenir que le préfet ne lui aurait pas régulièrement notifié la décision du 12 décembre 2011 lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire ou qu'il aurait du prendre une nouvelle décision de refus de titre de séjour ;

Sur la légalité de l'assignation à résidence :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, par dérogation à l'article L. 551-1, dans les cas suivants : 1° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai ou si le délai de départ volontaire qui lui a été accordé est expiré ; 2° Si l'étranger doit être remis aux autorités d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 ; 3° Si l'étranger doit être reconduit à la frontière en application de l'article L. 531-3 ; 4° Si l'étranger doit être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction de retour ; 5° Si l'étranger doit être reconduit à la frontière en exécution d'une interdiction du territoire prévue au deuxième alinéa de l'article 131-30 du code pénal. La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, et renouvelée une fois ou plus dans la même limite de durée, par une décision également motivée. Par exception, cette durée ne s'applique ni aux cas mentionnés au 5° du présent article ni à ceux mentionnés aux articles L. 523-3 à L. 523-5 du présent code. L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. L'autorité administrative peut prescrire à l'étranger la remise de son passeport ou de tout document justificatif de son identité dans les conditions prévues à l'article L. 611-2. Si l'étranger présente une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public, l'autorité administrative peut le faire conduire par les services de police ou de gendarmerie jusqu'aux lieux d'assignation. Le non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence est sanctionné dans les conditions prévues à l'article L. 624-4. " ; et qu'aux termes de l'article L. 561-3 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ;

10. Considérant que l'application des dispositions précitées de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile suppose une démarche de l'étranger auprès de l'administration, dans la mesure où il doit justifier être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne pouvoir regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays jusqu'à ce que son départ soit possible ; qu'en revanche, l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorise l'administration, de sa propre initiative, à prendre une mesure d'assignation à résidence à l'égard d'un étranger pour lequel l'obligation de quitter le territoire français demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de fuite ;

11. Considérant que l'arrêté portant assignation à résidence de M. B...comporte la mention des circonstances de fait et de droit qui en sont le fondement ; qu'il est dès lors suffisamment motivé ;

12. Considérant que, pour assigner M. B...à résidence, le préfet de la Haute Savoie a retenu que celui-ci était en mesure de justifier de son identité et possédait une adresse chez sa soeur et que l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeurait une perspective raisonnable ; qu'il a imposé au requérant de se présenter tous les jours aux services de la gendarmerie de Seynod, hors dimanche et jours fériés et lui a interdit de quitter l'arrondissement d'Annecy sans autorisation ; que le préfet, qui a bien pris en compte sa situation familiale, n'avait pas à mentionner plus précisément le délai dans lequel M. B...serait éloigné dès lors que ce dernier pouvait toujours quitter spontanément la France ainsi qu'il en avait l'obligation ; qu'enfin, la circonstance, à la supposée établie, que M. B...aurait disposé d'une promesse d'embauche, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté l'assignant à résidence ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède d'une part, que le Préfet de Haute Savoie est fondé à obtenir la réforme du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2013 en tant qu'il a annulé son arrêté du 23 avril 2013 en tant qu'il refusait d'accorder à M. B...un délai de départ volontaire et son arrêté du même jour assignant M. B...à résidence et d'autre part, que la demande présentée devant le même Tribunal par M. B...doit être rejetée dans cette même mesure ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 1302179 du 29 avril 2013 du Tribunal administratif de Grenoble sont annulés.

Article 2 : Le surplus de la demande de M. A...B...présentée devant le Tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B.... Copie en sera adressée au Préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Wyss, président de chambre,

M. Gazagnes, président-assesseur,

M. Mesmin d'Etienne, président assesseur

Lu en audience publique, le 9 janvier 2014.

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N° 13LY01370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01370
Date de la décision : 09/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Philippe GAZAGNES
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-09;13ly01370 ?
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