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09/01/2014 | FRANCE | N°13LY01030

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2014, 13LY01030


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2013, présentée pour M. C... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300029 du 8 janvier 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de des décisions du 4 janvier 2013 par lesquelles le préfet de la Savoie l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention administrative ;
>2°) de surseoir à statuer sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire franç...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 avril 2013, présentée pour M. C... B..., domicilié... ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300029 du 8 janvier 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de des décisions du 4 janvier 2013 par lesquelles le préfet de la Savoie l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention administrative ;

2°) de surseoir à statuer sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français jusqu'à ce que la juridiction judiciaire se soit prononcée sur la filiation de l'enfant Ezer conçu dans le cadre de son union libre avec Mme A...et d'annuler l'obligation de quitter le territoire sans délai à destination de la Tunisie ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

M. B... soutient que :

- la procédure judiciaire de reconnaissance de paternité engagée pour l'enfant Ezer et l'expertise génétique qui sera pratiquée nécessiteront sa présence en France ce qui fait obstacle à l'obligation de quitter le territoire laquelle a dans ces conditions des conséquences d'une extrême gravité sur sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu la règle de l'examen particulier de sa situation ainsi que l'étendue de ses pouvoirs, ce qui entache les décisions en litige d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation des faits et de violation des stipulations des articles 3-1 de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- c'est à tort que le premier juge a exercé un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation sur l'atteinte à sa vie privée et familiale ;

- il n'a pas exercé ses compétences et a dénaturé les pièces qui lui étaient soumises ;

- en estimant ne pas devoir surseoir à statuer le premier juge a dénaturé ses écritures et partant a entaché son jugement d'erreur de droit ;

- le jugement est entaché d'une erreur matérielle quant à la date de naissance de l'enfant Ezer ;

- il a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus d'un délai de départ volontaire n'est pas motivée ;

- le préfet s'est cru en situation de compétence liée pour refuser un tel délai alors que sa situation le justifiait, et a méconnu les dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE relatif au départ volontaire, porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les articles 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

- l'arrêté le plaçant en rétention administrative ne pouvait être justifié seulement par l'absence de moyen de transport immédiat ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 12 juin 2013 fixant la clôture d'instruction au 1er juillet 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2013 présenté le préfet de la Savoie qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu la décision du 26 février 2013 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation du jugement a, sur le fondement de l'article L. 732-1 du code de justice administrative, décidé, sur proposition du rapporteur public, de dispenser celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 décembre 2013 le rapport de M. Gazagnes ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation des décisions du 4 janvier 2013 par lesquelles le préfet de la Savoie l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a placé en rétention administrative ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant d'une part que la circonstance que le jugement comporte une erreur purement matérielle sur la date de naissance de l'enfant Ezer est sans incidence sur sa régularité ;

3. Considérant d'autre part qu'aucune disposition applicable ni aucun principe n'imposait au juge de surseoir à statuer sur la requête de M. B...dans l'attente de l'issue de la procédure de reconnaissance de paternité qu'il a engagée, au demeurant postérieurement à la date des décisions attaquées ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / (...) " ; que M. B...ne justifie pas, à la date de la décision attaquée, être le père de l'enfant Ezer de nationalité française né le 30 janvier 2012, ni d'ailleurs contribuer effectivement, depuis la naissance de celui-ci, à son entretien et à son éducation, dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Savoie n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. B...ou aurait méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si, avant l'édiction de la décision en litige, M. B... a indiqué aux services de police son intention de faire pratiquer un test de paternité, cette éventualité, pas plus d'ailleurs que l'engagement postérieur d'une procédure judiciaire en reconnaissance de paternité, ne sont de nature à elles seules à établir que l'obligation de quitter le territoire français emporterait des conséquences d'une extrême gravité sur sa situation personnelle dès lors que cette décision ne fait pas par elle-même obstacle à son retour en France selon une procédure régulière pour les besoins de la procédure ;

7. Considérant que, comme il est dit au point 2 ci-dessus, M. B...ne justifie pas être le père de l'enfant Ezer ni contribuer à son entretien ; qu'ainsi la décision en litige n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le premier juge, qui ne s'est pas mépris sur l'intensité de son contrôle, d'écarter le moyen soulevé en première instance et repris en appel par M.B..., tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

9. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes duquel : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) / / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce ... qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ... . / (...). " ;

10. Considérant, en premier lieu, que la décision en litige qui vise l'article L. 511-1 II 3° et énonce que M. B...ne justifie ni d'une entrée régulière en France, ni de la possession d'un titre de séjour, ni d'un domicile fixe, et qu'il existe un risque qu'il se soustraie à la décision, est suffisamment motivée ;

11. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE relatif au départ volontaire ont été transposées par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité au II de l'article L. 511-1 précité ; que par suite M. B...ne peut utilement se borner à invoquer directement la méconnaissance des dispositions de l'article 7 de la directive ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...ne justifie d'aucun domicile en France ; que sa situation entrait ainsi dans les prévisions des dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

13. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort ni de la décision en litige qui est motivée comme il est dit ci-dessus, ni des autres pièces du dossier, que le préfet de la Savoie se serait cru en situation de compétence liée pour refuser à M. B...un délai de départ volontaire ;

14. Considérant, en cinquième lieu, que M.B..., qui ne peut utilement invoquer la procédure judiciaire de reconnaissance de paternité engagée postérieurement à la décision en litige, et dont la présence en France est très récente, ne démontre pas qu'en ne lui accordant pas de délai de départ volontaire, le préfet de la Savoie aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ou aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

15. Considérant que pour les même raisons qu'exposées aux points précédents M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision méconnaîtrait l'article 3 de la convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que s'il évoque également l'article 6 de cette convention, son moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes ;

Sur la légalité de la décision de placement en rétention administrative :

16. Considérant que la décision plaçant M. B... en rétention administrative comporte les considérations de fait et de droit qui en sont le fondement ; qu'elle est par suite suffisamment motivée ;

17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête n° 13LY01030 de M. C... B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2013, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Gazagnes, président assesseur,

- M. Mesmin d'Estienne, président assesseur,

Lu en audience publique, le 9 janvier 2014.

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N° 13LY01030

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01030
Date de la décision : 09/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: M. Philippe GAZAGNES
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : ZAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-09;13ly01030 ?
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