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09/01/2014 | FRANCE | N°13LY00474

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 09 janvier 2014, 13LY00474


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 février 2013, présentée pour M. A... B..., domicilié ... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207200 du 5 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 22 octobre 2012 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites d

écisions ;

3°) de faire injonction au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 février 2013, présentée pour M. A... B..., domicilié ... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1207200 du 5 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 22 octobre 2012 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) de faire injonction au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 196 euros en application combinée des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Il soutient que le préfet du Rhône a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que le refus de séjour a été pris en méconnaissance de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre ; qu'elle est insuffisamment motivée ; que l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoit que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation différente de la décision de refus de séjour est incompatible avec la directive du 16 décembre 2008 ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son état de santé ; que la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 30 septembre 2013, fixant la clôture de l'instruction au 28 octobre 2013, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du 6 mars 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2013 :

- le rapport de M. Besse, premier conseiller,

- et les observations de Me Sabatier, avocat de M. B...;

1. Considérant que M.B..., de nationalité bosnienne, né en 1982, est entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 19 janvier 2010, avec son épouse et leur fille mineure ; qu'il a bénéficié du 21 juin 2011 au 20 juin 2012 d'une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " qui lui a été délivrée en raison de son état de santé ; que, par décisions du 22 octobre 2012, le préfet du Rhône a refusé de renouveler ce titre de séjour, a obligé M. B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B...relève appel du jugement du 5 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur le refus de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant qu'il ressort de la décision attaquée que le préfet du Rhône a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. B...avant de décider de ne pas faire droit à sa demande de délivrance d'un titre de séjour au titre des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé pour prendre cette décision ;

4. Considérant que M. B...produit des certificats médicaux attestant qu'il souffre de troubles psychiatriques entraînant des insomnies et d'un état dépressif pour lequel il bénéficie d'un suivi médical et d'un traitement médicamenteux ; que, par avis du 7 juin 2012, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Bosnie, pays vers lequel il peut voyager sans risque ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu du caractère peu précis des certificats médicaux du psychiatre qui suit M. B...que ce dernier ne pourrait pas être soigné en Bosnie, contrairement à ce qu'a indiqué le médecin de l'agence régionale de santé ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre a été prise en méconnaissance des dispositions précitées ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur son état de santé ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; que, si M. B...fait valoir qu'il résidait en France depuis plus de deux ans et demi à la date de la décision attaquée, que sa fille est scolarisée et que son épouse bénéficie d'un contrat d'insertion, cette dernière a fait l'objet d'un refus de titre assorti d'une obligation de quitter le territoire français par décisions du même jour ; que, compte tenu du caractère récent de son séjour en France et du fait qu'il n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales en Bosnie, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans, la décision de refus de titre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations précitées ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ; qu'aux termes de l'article 12, paragraphe 1, de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour (...) sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'étant vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du même jour, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

9. Considérant que les dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont pas incompatibles avec les objectifs fixées par les dispositions de la directive du 16 décembre 2008, ne prévoient pas de motivation distincte pour la décision portant obligation de quitter le territoire français, et n'impliquent pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation ; qu'en l'espèce, la décision vise les dispositions applicables du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et le refus de séjour énonce par ailleurs les considérations de droit et de fait qui le fondent ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français doit être écarté ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : ( ...) 10º L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; (...) " ; que, pour les mêmes motifs que ceux retenus ci-dessus, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur le pays de destination :

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

M. Besse et MmeC..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2014.

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N° 13LY00474

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00474
Date de la décision : 09/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-01-09;13ly00474 ?
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