Vu la requête, enregistrée le 20 février 2013, présentée pour Mme C...E...domiciliée ... ;
Mme C...E...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101955 en date du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande de requalification de son emploi en emploi permanent, de condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de MoulinsVichy à lui verser une somme de 50 000 euros au titre de dommages et intérêts et, à titre principal, d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de la réintégrer sur un contrat à durée indéterminée et, à titre subsidiaire, de condamner la chambre de commerce et d'industrie à lui verser 7 846,08 euros au titre des indemnités de préavis, de congés payés et de licenciement ;
2°) d'annuler la décision du 31 août 2011 par laquelle la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy a refusé de requalifier son contrat en contrat à durée indéterminée et de faire droit à sa demande indemnitaire ;
3°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy à lui verser une somme de 37 846,08 euros au titre du préjudice financier et 20 000 euros au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral et d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2011 et de capitaliser ces intérêts ;
4°) d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy de lui verser les sommes demandées dans un délai de deux mois sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
elle soutient que :
- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur le caractère permanent de son emploi en ce que ses contrats ne précisent pas le motif d'un recours à la forme de contrat à durée déterminée ;
- ces contrats ne peuvent être qualifiés de contrats de vacation puisqu'elle consacrait la quasi-totalité de son emploi du temps à une activité normale du service assuré par la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy ;
- l'activité d'enseignement de langues étrangères relève de l'activité normale du service de la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy; la régularité de la tâche confiée remet en cause son caractère ponctuel ; elle a exercé les mêmes missions durant 7 ans et 11 mois ; la liste fournie par la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy de ses formateurs permanents fait apparaître des personnels dont la durée de la collaboration avec la chambre est inférieure à la sienne ;
- elle a été incitée à adopter le statut d'auto-entrepreneur ;
- l'article 55 du statut du personnel des chambres de commerce et d'industrie imposait qu'elle bénéficie d'un contrat à durée indéterminée ;
- la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy a commis une faute engageant sa responsabilité en refusant de régulariser sa situation et en rompant son contrat ;
Vu le jugement attaqué;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2013, présenté pour la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de 1'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- il résulte des termes mêmes des contrats de travail de 2004 à 2009 que la requérante a été engagée comme vacataire dès lors qu'ils avaient un but précis relevant de l'activité du centre d'étude de langues et que la rémunération est une rémunération sur une base horaire ; en 2008, la requérante exerçait un autre emploi parallèlement à son activité pour la chambre de commerce et d'industrie ; pour 2008 et 2009, elle n'a exercé qu'une activité limitée pour la chambre de commerce et d'industrie ;
- pour les années 2008 à 2011, les contrats ont été qualifiés d'emploi de vacation ; les contrats portent sur des interventions ponctuelles rémunérées à l'heure ;
- la moyenne annuelle du temps de travail de la requérante pour les années 2004 à 2010 correspond à un tiers temps ;
- la commission paritaire nationale du 13 juin 2005 a supprimé le recours aux quotas d'heures pour les vacataires adopté en 2000; la requérante ne peut invoquer ces dispositions ;
- les demandes indemnitaires doivent être rejetées en 1'absence de requalification du contrat;
Vu le mémoire, enregistré le 10 juin 2013, présenté pour Mme E...qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
elle soutient, en outre, qu'elle ne pouvait exercer une autre activité sans accord préalable de la chambre de commerce et d'industrie ; il n'y a pas lieu de comparer le nombre d'heures effectuées au regard d'un quota pour établir la permanence de l'emploi occupé ; le quota d'heures n'a pas été respecté par la chambre de commerce et d'industrie ce qui traduit la permanence de 1'emploi ;
Vu le mémoire, enregistré le 01 octobre 2013, présenté pour Mme E...qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 novembre 2013, présenté pour la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 14 novembre 2013, présenté pour Mme E...qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements interconsulaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2013 :
- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de MeA..., représentant Mme E...et MeD..., représentant la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy ;
1. Considérant que Mme C...E...fait appel du jugement n° 1101955 en date du 20 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande de requalification de son emploi en emploi permanent, de condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy à lui verser une somme de 50 000 euros au titre de dommages et intérêts et, à titre principal, d'enjoindre à la chambre de commerce et d'industrie de la réintégrer sur un contrat à durée indéterminée et à titre subsidiaire de condamner la chambre de commerce et d'industrie à lui verser 7 846,08 euros au titre des indemnités de préavis, de congés pays et de licenciement ;
2. Considérant que Mme E...a été recrutée le 4 mars 2004 pour une durée d'un an par la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy en qualité d'animateur de formation au centre d'étude des langues ; que cet engagement a été reconduit par quatre contrats d'une durée d'un an du 5 mars 2005 au 5 mars 2009 ; qu'à partir du 6 mars 2009, Mme E... a bénéficié d'un contrat de formateur vacataire d'une durée d'un an, qui a été renouvelé pour une durée d'un peu plus de dix mois, puis prolongé par 10 avenants successifs jusqu'au 23 décembre 2010 ; que, privée de toute mission à compter de cette date, Mme E... a, le 8 juillet 2011, adressé un courrier à son employeur afin d'obtenir la régularisation de sa situation contractuelle, sa réintégration au sein de la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy en contrat à durée indéterminée ainsi que la réparation de ses préjudices ; que par un courrier en date du 31 août 2011, le président de cet organisme a rejeté cette demande ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires : " Les compagnies consulaires peuvent employer des enseignants permanents hors statut (...). Ces enseignants seront employés sous contrat permanent hors statut (...) " ; qu'aux termes de l'article 49-5 du même statut : "Les compagnies consulaires peuvent employer des intervenants vacataires dans les cas suivants : exécution d'une tâche précise sur un emploi dénué de permanence, exécution d'une tâche spécialisée, d'une expertise, en complément d'une autre activité professionnelle exercée à titre principal (...) " ; que ces dispositions ouvrent la possibilité aux compagnies consulaires d'employer des enseignants permanents hors statut et limitent l'emploi d'intervenants vacataires aux situations d'exécution de tâches précises ou spécialisées, dénuées de permanence ; que 1'enseignement des langues étrangères au sein d'un organisme consulaire relève de l'activité normale du service et répond ainsi à un besoin permanent ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme E...a exercé son activité au sein de la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy à raison de 543,33 heures en 2004, de 703 heures en 2005, de 614,50 heures en 2006, de 662,50 heures en 2007, de 343,25 heures en 2008, de 272,50 heures en 2009 et de 626,40 heures en 2010; que compte-tenu de la régularité et de 1'importance des engagements de la requérante avec son employeur, Mme E... doit être regardée comme occupant un emploi permanent, et ce, nonobstant la double circonstance que le volume et les dates des interventions de l'intéressée ont pu varier d'une année sur l'autre et que la requérante a effectué parallèlement en 2008 une activité pour le compte d'un agent immobilier; que, dès lors, Mme E...aurait dû bénéficier d'un contrat à durée indéterminée ; que, par suite, le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand doit être annulé ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 48-7 du statut du personnel administratif des chambres consulaires, Mme C...E...aurait, dans l'hypothèse d'un licenciement, bénéficié d'une période de préavis de deux mois et aurait dû percevoir une indemnité de licenciement proportionnelle à son ancienneté; qu'il résulte de l'instruction que Mme E...est fondée à demander à ce titre la somme de 7 846,08 euros ;
6. Considérant qu'en ne faisant pas bénéficier Mme E...d'un contrat d'enseignant permanent, la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy a commis une faute dont la requérante est fondée à demander réparation des préjudices qui en découlent ;
7. Considérant que si Mme E...soutient qu'elle a subi un préjudice financier à hauteur de 30 000 euros, elle n'apporte aucun élément à l'appui de cette prétention; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice lié au trouble dans les conditions d'existence et du préjudice moral subis par la requérante en les évaluant à la somme de 2 000 euros ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...E...est fondée à demander que la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy lui verse une somme de 9 846,08 euros; que la chambre de commerce et d'industrie de Moulins-Vichy doit être condamnée à lui verser cette somme, avec intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2011, date de réception de la demande préalable; qu'à la date d'introduction de la requête d'appel, qui est celle de la demande de capitalisation des intérêts, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C...E...qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la chambre de commerce et d'industrie Moulins-Vichy demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions pour mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie Moulins-Vichy, une somme de 1 500 euros demandée par Mme C...E...;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1101955 du 20 décembre 2012 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : La chambre de commerce et d'industrie Moulins-Vichy versera la somme de 9 846,08 euros à Mme C...E.... Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 8 juillet 2011. Les intérêts, échus à compter du 20 février 2013, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : La chambre de commerce et d'industrie Moulins-Vichy versera une somme de 1 500 euros à Mme E...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Article 4 : Le présent jugement sera notifié à Mme C...E...et à la chambre de commerce et d'industrie Moulins-Vichy.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2013 à laquelle siégeaient :
M. Martin, président de chambre,
M. Clément et MmeB..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 10 décembre 2013.
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N° 13LY00444
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