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28/11/2013 | FRANCE | N°13LY01156

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 28 novembre 2013, 13LY01156


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 10 mai 2013 et régularisée le même jour, présentée pour M. A...C...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300443, du 9 avril 2013, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 19 décembre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, p

our excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer u...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 10 mai 2013 et régularisée le même jour, présentée pour M. A...C...B..., domicilié ...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300443, du 9 avril 2013, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 19 décembre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision par laquelle le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance du titre de séjour sollicité est insuffisamment motivée ; qu'elle est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'elle ne mentionne pas la date de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur lequel elle se fonde ; qu'elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet du Rhône n'apporte aucun élément permettant de contester le certificat du docteur Bosle et ne démontre pas qu'il pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il encourt des risques dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2013, présenté par le préfet du Rhône ; il conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. B... une somme de 100 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu la lettre en date du 18 octobre 2013 adressée aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 23 octobre 2013, présenté par le préfet du Rhône ; il fait valoir que l'Etat est recevable à demander la mise à la charge d'une partie, même bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, des frais d'instance non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire enregistré le 8 novembre 2013, présenté par le préfet du Rhône tendant aux mêmes fins que les mémoires susvisés par les mêmes moyens ;

Vu la décision du 28 mai 2013, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Laurent Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant de République Démocratique du Congo, est irrégulièrement entré en France le 24 mars 2007, selon ses déclarations ; que ses demandes d'asile ont été examinées et rejetées à trois reprises tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile ; que le 3 août 2009 et le 5 septembre 2011, M. B...a fait l'objet de décisions de refus de délivrance de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par la Cour de céans, les 15 avril 2010 et 26 juillet 2012 ; qu'en dernier lieu, M. B...a sollicité le 21 mai 2012 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, consulté, le médecin de l'Agence régionale de santé de la région Rhône-Alpes a estimé, le 5 juin 2012, que l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existait un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il pouvait voyager sans risque ; que, par la décision litigieuse du 19 décembre 2012, le préfet du Rhône a opposé un refus à la demande de titre de séjour dont il était saisi, a obligé M. B...à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi en cas de reconduite forcée ; que M. B...relève appel du jugement du 9 avril 2013 par lequel le préfet du Rhône a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées des motifs des décisions défavorables qui les concernent. (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

3. Considérant que M. B...reprend en appel le moyen, déjà soulevé devant le Tribunal administratif de Lyon, tiré du défaut de motivation de l'arrêté attaqué ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la Cour, d'adopter ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le préfet du Rhône a refusé la délivrance du titre de séjour à M. B...a été prise au vu de l'avis du 5 juin 2012 rendu par le médecin de l'Agence régionale de santé de la région Rhône-Alpes ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance qu'elle ne fasse pas mention de la date dudit avis, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision refusant la délivrance du titre de séjour à M. B..., manque en fait et ne peut être qu'écarté ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : ( ...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ; qu'il appartient au médecin de l'agence régionale de santé, en application des dispositions précitées, de donner seulement au préfet, tout en respectant le secret médical, les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer la décision que doit prendre l'autorité préfectorale à qui il appartient d'apprécier elle-même la situation de l'étranger après avoir examiné les autres pièces du dossier ;

6. Considérant que si M. B...soutient que la décision du préfet du Rhône attaquée serait viciée en ce que celui-ci se serait cru lié par l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé de la région Rhône-Alpes, le moyen manque en fait ;

7. Considérant que si pour contester cette décision de refus, M. B...produit d'une part, un certificat médical du 10 mai 2012 rédigé par un médecin généraliste, qui se borne à indiquer que le requérant présente outre une hypertension, un diabète de découverte récente et que "le traitement est à faire pendant de nombreuses années et ne lui serait pas accessible dans son pays d'origine", des pièces postérieures à la date de la décision contestée, faisant état d'un suivi par un service hospitalier d'endocrinologie, et d'autre part, des documents d'information à caractère général sur les problèmes de santé publique posés par le diabète en Afrique subsaharienne et en République Démocratique du Congo, ces pièces ne permettent toutefois pas d'établir l'inexistence d'un traitement approprié à l'état de santé de M. B...en République Démocratique du Congo et ne peuvent remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé sur ce point ; qu'enfin, le coût éventuel du traitement médicamenteux nécessaire dont se prévaut M. B...qui au demeurant n'apporte aucun élément chiffré, ne peut pas être utilement invoqué au soutien du moyen tiré de la violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui subordonne notamment la délivrance du titre de séjour prévu par ces dispositions à l'absence du traitement approprié dans le pays d'origine et non à un accès effectif de l'intéressé à un tel traitement ; qu'il résulte de ce qui précède que M.B..., qui ne fait pas état de circonstances humanitaires exceptionnelles, n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant le titre de séjour sollicité, le préfet du Rhône a violé les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le préfet du Rhône n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B... ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

9. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du 19 décembre 2012 ; qu'ainsi, à cette date, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

10. Considérant, d'autre part, que M. B...reprend en appel le moyen, déjà soulevé devant le Tribunal administratif de Lyon, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la mesure d'éloignement en litige ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux qui ont été retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la Cour, d'adopter ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant qu'au soutien du moyen tiré de la violation par la décision en litige des stipulations précitées de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. B...se borne à produire, outre des documents anciens et déjà présentés devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, des articles de presse relatifs à une situation de tension à l'approche des élections présidentielles et législatives de novembre 2011 ; que de tels documents sont relatifs à une situation générale et ancienne à la date de la décision attaquée ; que si le requérant produit également une convocation datée du 18 janvier 2012 devant un inspecteur de police judicaire , cette pièce, dont l'authenticité a été contestée par le préfet en première instance, ne présente pas de garantie suffisante ; que ces documents ne permettent pas d'établir que M. B... serait exposé à des risques personnels et actuels de traitements contraires aux stipulations précitées de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans le pays dont il a la nationalité ; que, dès lors, le moyen ne peut être qu'écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ; que si une personne publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat peut néanmoins demander au juge le bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais spécifiques exposés par elle à l'occasion de l'instance, elle ne saurait se borner à faire état d'un surcroît de travail de ses services et doit faire état précisément des frais qu'elle aurait exposés pour défendre à l'instance ; que le préfet du Rhône ne faisant état d'aucun frais précis, il y a lieu de rejeter ses conclusions tendant au remboursement de ses frais d'instance non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2013.

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N° 13LY01156


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY01156
Date de la décision : 28/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : GREPINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-28;13ly01156 ?
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