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14/11/2013 | FRANCE | N°12LY01244

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 14 novembre 2013, 12LY01244


Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2012, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, dont le siège est à la mairie de Saint-François-Longchamp (73130), représenté par son président ;

Le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801077 du 22 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une indemnité de 200 000 euros tous intérêts compris à la SARL Atelier Dujol architecture, à la SARL bureau d'étu

des Plantier, à la SARL Tech'tra Ingénierie et à la SARL In Situ ;

2°) de mettre à...

Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2012, présentée pour le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, dont le siège est à la mairie de Saint-François-Longchamp (73130), représenté par son président ;

Le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801077 du 22 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une indemnité de 200 000 euros tous intérêts compris à la SARL Atelier Dujol architecture, à la SARL bureau d'études Plantier, à la SARL Tech'tra Ingénierie et à la SARL In Situ ;

2°) de mettre à la charge de ces sociétés la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le SIVOM soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a retenu que les documents de la consultation ne comportaient pas de restriction ni de précision technique concernant l'implantation du projet, alors que l'implantation d'une construction sur un torrent de montagne constitue un parti-pris singulier et que le dossier de consultation et les précisions apportées lors de la réunion du 12 juin 2006 excluaient du site d'implantation le torrent et le parking, ce dernier étant situé sur le territoire de la commune voisine ;

- il n'est pas établi que les demandeurs avaient une chance sérieuse d'emporter le marché, le jury ayant relevé, outre son positionnement aléatoire, une complexité de toiture posant des problèmes de pérennité des ouvrages, une disposition peu favorable au regard du risque sismique et du traitement des eaux et une construction sur pilotis peu cohérente par rapport aux recommandations SOLEN ; le groupement Dujol n'était pas le mieux placé ;

- les demandeurs ont été indemnisés des frais d'établissement du dossier ; le montant de l'indemnité est proportionné aux chances qu'avait l'entreprise de remporter le marché ; le Tribunal ne pouvait fixer une somme globale et forfaitaire, dès lors que chaque entreprise devait apporter la preuve de l'existence de son propre préjudice, que le montant de l'indemnisation des membres du groupement ne pouvait être fixé en tenant exclusivement compte du pourcentage de marge de l'architecte et que le Tribunal devait procéder à des investigations supplémentaires pour calculer la réalité du préjudice invoqué ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 septembre 2012, présenté pour la SARL Atelier Dujol architecture, la SARL bureau d'études Plantier, la SARL Tech'tra Ingénierie et la SARL In Situ, qui demandent à la Cour ;

1°) de rejeter la requête ;

2°) de réformer le jugement attaqué pour porter le montant de l'indemnité que le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey est condamné à leur verser à 254 389 euros hors taxe, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2008 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) de condamner le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey à leur verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elles soutiennent que :

- l'appel principal est irrecevable pour défaut de versement de la contribution pour l'aide juridique ;

- les premiers juges ont retenu à... ; le SIVOM n'a d'ailleurs pas mis en oeuvre la faculté de réfaction ou de suppression de la prime qui était prévue pour les offres non conformes au règlement ; le projet effectivement réalisé ne respecte pas l'implantation initialement prévue ; à titre subsidiaire, d'autres irrégularités affectent la procédure, du fait de l'absence de signature du procès-verbal par les membres du jury, de l'impossibilité de vérifier la satisfaction du quorum ou la régularité de la composition du jury, en raison de l'absence du procès-verbal du réexamen du projet n° 1, de l'impossibilité d'organiser de nouvelles négociations avec un seul candidat, du fait que le projet retenu avait été regardé comme non satisfaisant par le jury ;

- le Tribunal a retenu à... ;

- le montant de l'indemnité doit être relevé, dès lors que le taux de marge nette de 47 %, ou à tout le moins de 44 %, aurait dû être retenu, qu'il y avait lieu d'y ajouter les intérêts et leur capitalisation et que la prime de 13 000 euros n'avait pas à être déduite du manque à gagner ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 octobre 2012, par lequel le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey conclut aux mêmes fins que sa requête ;

Il reprend les moyens précédemment développés et fait valoir en outre que :

- la fin de non-recevoir doit être écartée, car la contribution pour l'aide juridique a été réglée ;

- l'absence de signature du procès-verbal n'implique pas l'irrégularité de la procédure ;

- le jury pouvait demander la modification d'offres imprécises aux candidats dont les offres présentaient les mêmes lacunes, mais cela ne vaut pas pour les offres irrecevables ;

- à supposer même que la procédure soit entachée d'un de ces vices, les sociétés ne pourraient prétendre à aucune indemnisation de ce fait ;

Vu l'ordonnance du 3 janvier 2013 fixant la clôture d'instruction du 25 janvier 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 janvier 2013, par lequel le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey demande à la Cour de condamner solidairement la SARL Atelier Dujol architecture, la SARL bureau d'études Plantier, la SARL Tech'tra Ingénierie et la SARL In Situ à lui rembourser la somme de 201 500 euros, outre intérêts à compter du 22 mai 2012 ;

Il reprend les moyens précédemment développés et fait valoir, en outre, que le projet du groupement Dujol était implanté en dehors des limites répertoriées du plan local d'urbanisme et du plan d'indexation en Z de la commune de Montgellafrey et que la patinoire était implantée sur une zone inconstructible au regard du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-François Longchamp alors applicable, qui a fait l'objet d'un classement en emplacement réservé dans le PLU révisé, et dans un secteur classé en risque moyen de mouvement de terrain ; que le changement d'implantation du projet retenu a été justifié par des difficultés apparues lors de sondages ; à titre subsidiaire, que le préjudice devait être déterminé en tenant compte des marchés qui auraient pu être obtenus en 2007 et 2008 et compenser la perte de marge bénéficiaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2013, présenté pour la SARL Atelier Dujol architecture, la SARL bureau d'études Plantier, la SARL Tech'tra Ingénierie et la SARL In Situ, qui concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elles font valoir, en outre, que le projet du groupement Dujol ne correspondait pas à une offre inacceptable au sens de l'article 35 du code des marchés publics, qu'il était matérialisé dans les limites de la commune de Montgellafrey et sur une zone strictement constructible ; que l'implantation du projet en zone à risques naturels n'empêchait pas toute construction ; que le projet retenu est, pour sa part, situé en zone torrentielle à risque fort, non constructible ;

Vu l'ordonnance du 25 janvier 2013 reportant la clôture de l'instruction au 15 février 2013 ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 février 2013, présenté pour le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il fait valoir en outre que l'offre du groupement Dujol était à la fois inacceptable et irrégulière ; que le changement d'implantation, intervenu après l'adoption du projet retenu, est sans incidence sur la légalité de la procédure ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 février 2013, présenté pour la SARL Atelier Dujol architecture, la SARL bureau d'études Plantier, la SARL Tech'tra Ingénierie et la SARL In Situ, qui concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elles font valoir en outre que la piste de la patinoire ne faisait pas partie de l'opération ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 février 2012, présenté pour le SIVOM de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Il fait valoir en outre que la patinoire devait être prise en compte pour l'organisation du site ;

Vu l'ordonnance du 21 février 2013 reportant la clôture de l'instruction au 8 mars 2013 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code des marchés publics

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

- les observations de Me A..., représentant le syndicat intercommunal à vocation multiple de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey, et MeB... ;

1. Considérant que le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey a conclu, à l'issue d'un concours, un marché de maîtrise d'oeuvre relatif à la construction d'un centre de mise en forme et de loisirs de 1 400 mètres carrés avec la société At'las Architectes ; que, par jugement du 22 mars 2012, le Tribunal administratif de Grenoble a condamné le SIVOM de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey à verser aux sociétés Atelier Dujol Architecture, Bureau d'études Plantier, Tech'tra ingénierie et In Situ, membres d'un groupement solidaire évincé, une indemnité de 200 000 euros ; que le SIVOM relève appel de ce jugement, qui est également contesté par les quatre sociétés précédemment mentionnées, par le biais de l'appel incident ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel par les sociétés Atelier Dujol Architecture et autres :

2. Considérant que, contrairement à ce qu'allègue le défendeur, la contribution pour l'aide juridique a été acquittée par le SIVOM de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey ; que, par suite, la fin de non-recevoir doit être écartée ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par le SIVOM de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey :

3. Considérant que les sociétés Atelier Dujol Architecture, Bureau d'études Plantier, Tech'tra ingénierie et In Situ, qui se sont portées candidates au marché de maîtrise d'oeuvre en envisageant de former un groupement solidaire, étaient, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, recevables à présenter une requête collective, eu égard aux liens existants entre les préjudices dont elles demandent réparation, qui découlent d'un même fait générateur, tenant au rejet de l'offre présentée par le groupement qu'elles avaient formé ; que la circonstance qu'elles n'aient pas individualisé le préjudice de chacune d'entre elles est sans incidence sur la recevabilité de leur demande indemnitaire ;

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne l'irrégularité de l'éviction du groupement SARL Atelier Dujol architecture :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jury mis en place par le SIVOM a retenu, sur les 19 candidatures reçues, 3 groupements pour procéder aux négociations ; que le groupement ayant pour mandataire la SARL Atelier Dujol architecture a vu son offre écartée sur proposition du jury ; qu'il ressort du procès-verbal du jury de concours du 8 septembre 2006 que celui-ci a estimé que l'offre n'était pas conforme, d'une part, en raison de son choix d'implanter le bâtiment sur un torrent, et, d'autre part, en raison de son implantation en dehors du terrain désigné, sur un espace présenté à titre liminaire comme relevant d'un emplacement réservé aux parkings selon le plan local d'urbanisme ; que, par délibération du 17 novembre 2006, le comité syndical doit être regardé comme s'étant, sur proposition de son président, approprié cet avis ; que, dans ses écritures d'appel, le SIVOM reprend à son compte ces deux motifs principaux, et oppose en outre le défaut de conformité du projet du groupement SARL Atelier Dujol architecture au document d'urbanisme ;

5. Considérant qu'ainsi que l'ont estimé les premiers juges, l'offre du groupement Atelier Dujol Architecture ne pouvait être déclarée inacceptable en raison du parti-pris d'implantation au dessus du torrent du Bugeon, dans la mesure où ni les documents de la consultation, ni les précisions apportées en cours de procédure par le maître d'ouvrage, ne permettaient de savoir que ce choix était insusceptible d'être admis ; qu'il n'est pas établi, ni même d'ailleurs clairement allégué, qu'un tel choix constituerait un manquement aux règles de l'art, de nature à justifier par lui-même l'éviction du candidat ;

6. Considérant toutefois que ce groupement a, en outre, positionné son projet pour partie sur le territoire de la commune de Saint-François-Longchamp, alors que ni le plan représentant la localisation du projet joint au dossier de consultation, ni le plan remis aux trois candidats pré-sélectionnés en juin 2006 ne faisaient apparaître ce terrain et que seuls les documents d'urbanisme de la commune de Montgellafrey figuraient au dossier, si bien que, malgré les ambiguïtés du dossier, la possibilité d'implanter le projet en dehors des limites de la commune de Montgellafrey devait être regardée comme exclue ; que, par ailleurs, la construction de la patinoire que le groupement Atelier Dujol architecture entendait y implanter n'était autorisée ni par le plan d'occupation des sols de Saint-François-Longchamp en vigueur, qui classait le terrain en zone NCp, ni par le projet de plan local d'urbanisme alors en cours d'élaboration, qui visait à classer le terrain en zone N et à le grever d'un emplacement réservé destiné à créer des zones de stationnement ; que le groupement n'allègue pas qu'à un moment de la procédure, il se serait assuré de l'assentiment de la collectivité compétente pour faire évoluer le document d'urbanisme dans un sens compatible avec son projet ; que, par suite, et alors que la notice " exigences techniques " figurant au dossier de consultation précisait la nécessité de respecter les documents d'urbanisme, le choix d'implanter cette patinoire, composante du projet que l'offre devait nécessairement localiser, sur une zone qui n'était pas susceptible de l'accueillir au regard du droit de l'urbanisme, rendait l'offre non-conforme, alors même qu'il était demandé aux candidats de ne pas chiffrer le coût de réalisation de cette patinoire ; que, dès lors, le SIVOM de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey est fondé à soutenir que l'offre du groupement Atelier Dujol architecture pouvait être écartée comme non-conforme, pour ces motifs, et que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas relevé que l'offre du groupement demandeur n'était pas conforme au règlement de la consultation ;

7. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les sociétés Atelier Dujol Architecture, Bureau d'études Plantier, Tech'tra ingénierie et In Situ ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'offre, présentée par le groupement At'las Architectes, telle qu'elle avait été soumise au jury le 8 septembre 2006, n'était pas conforme aux exigences du maître de l'ouvrage formulées dans le dossier de consultation et précisées par le document remis en juin 2006 ; qu'en effet, il ressort de la comparaison du photomontage présentant son offre et des plans figurant au dossier, et malgré l'absence de plan masse relevée dans le rapport d'analyse des offres, que le bâtiment envisagé est situé, pour une partie non négligeable, dans un secteur que le plan local d'urbanisme de la commune de Montgellafrey en cours d'élaboration, qui figurait au dossier de consultation, envisageait de classer en zone N, et non en zone constructible AU ; qu'à la date de l'analyse des offres, et ainsi que le précisaient tant le plan figurant au dossier de consultation que le plan remis aux candidats en juin 2006, le projet semblait également pour partie implanté en secteur ZNC du " plan indicé en Z ", dont il n'est pas contesté qu'il avait valeur réglementaire et qu'il devait être respecté par les candidats ; que le secteur ZNC correspond à une " zone aujourd'hui non bâtie, soumise en l'état actuel du site à un risque fort tel qu'il exclut la réalisation de tout projet de construction ", au titre du risque de crues torrentielles ; qu'il n'est pas démontré qu'il était sérieusement envisagé par l'autorité compétente, à la date d'examen des offres des trois groupements pré-sélectionnés, de revenir sur ce zonage, au motif qu'il aurait surévalué le risque ; que le projet du groupement At'las, qui a été retenu après que le jury avait demandé des évolutions fonctionnelles et architecturales, a d'ailleurs vu sa localisation modifiée postérieurement à l'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre ;

9. Considérant que, par suite, en écartant l'offre du groupement Atelier Dujol Architecture, ainsi que celle du groupement Atelier A, comme irrecevables en raison du non-respect des contraintes d'implantation, tout en choisissant de poursuivre les négociations avec le seul groupement At'las architectes, dont l'offre était en réalité entachée d'une non-conformité du même ordre que celle qui avait été reprochée aux deux concurrents évincés, le jury a méconnu le principe d'égalité devant la commande publique ; que, dès lors, le SIVOM de Saint-François-Longchamp-Montgellafrey n'est pas fondé à se plaindre de ce que les premiers juges ont estimé que le groupement Atelier Dujol Architecture avait été irrégulièrement évincé ;

En ce qui concerne l'existence d'une chance sérieuse de remporter le marché :

10. Considérant que le projet du groupement Atelier Dujol Architecture était celui qui avait la préférence du jury, en terme architectural, alors que le projet présenté par le candidat retenu, tel qu'il avait été examiné le 8 septembre 2006, avait été décrit par le jury comme " sans relief et sans allure " ; que le groupement Atelier Dujol Architecture était susceptible, à l'instar du groupement effectivement retenu, de modifier son projet, et ainsi de remédier aux difficultés posées en terme d'implantation ; qu'il ne résulte au demeurant pas de l'instruction que le choix de construire sur le torrent du Bugeon, à un endroit où il est busé, alors que le groupement SARL Atelier Dujol architecture prévoyait expressément la possibilité de redimensionner le busage avant la réalisation du bâtiment, justifiait nécessairement qu'une faible note technique soit attribuée à son offre ; qu'il n'est pas davantage démontré que le projet posait, dans sa conception même, des difficultés insusceptibles d'être surmontées de manière raisonnable en ce qui concerne sa toiture, ses fondations ou le traitement des eaux ou que les autres offres lui étaient incontestablement supérieures ; que son coût de réalisation, tel que réévalué au cours de l'analyse des offres, n'était pas très éloigné de celui du projet retenu ; que, dans ces conditions, le vice entachant la procédure d'attribution du marché a privé le groupement Atelier Dujol Architecture d'une chance sérieuse de se voir attribuer ce contrat ;

En ce qui concerne l'évaluation du préjudice :

11. Considérant que les sociétés membres du groupement Atelier Dujol Architecture ont droit à être indemnisées de leur manque à gagner, qui doit être déterminé, non en fonction du taux de marge brute constaté dans leur activité, mais en fonction du bénéfice net que leur aurait procuré le marché si elles l'avaient obtenu ; qu'il n'y a pas lieu, pour déterminer leur préjudice, de tenir compte des marchés de substitution qu'elles auraient pu obtenir ;

12. Considérant que le manque à gagner inclut nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans leurs charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ; qu'il ressort du cahier des clauses administratives particulières que la prime de 13 000 euros versée au titre du concours, que le groupement Atelier Dujol Architecture ne conteste pas avoir reçue, avait vocation à être déduite du paiement de l'acompte relatif aux esquisses et constituait donc, pour le lauréat, un élément du prix ; qu'ainsi, cette prime devait être déduite du manque à gagner dû au concurrent évincé, comme l'ont retenu à... ;

13. Considérant qu'en se bornant à fournir une attestation d'expert-comptable, peu circonstanciée et ambigüe, faisant état d'un taux de marge " retraité " de 47 % pour l'atelier Dujol, ainsi qu'un document faisant état d'un taux de marge de 47 % pour les deux co-traitants principaux, sans préciser le taux de marge nette de chacun des membres du groupement, les sociétés membres du groupement ne permettent pas à la Cour d'évaluer leur préjudice ; qu'il y a lieu, avant-dire droit, de leur demander de fournir tous documents permettant de déterminer quelle aurait été, pour chacune d'entre elle, la marge nette réalisée si le groupement avait emporté le marché, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête et de l'appel incident, procédé à un supplément d'instruction afin que les sociétés Atelier Dujol Architecture, Bureau d'études Plantier, Tech'tra ingénierie et In Situ produisent, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, tous documents de nature à établir quelle aurait été la marge nette que chacune d'entre elle aurait perçue si le groupement qu'elles constituaient s'était vu attribuer le marché de maîtrise d'oeuvre relatif à la construction d'un centre de mise en forme et de loisirs conclu par le syndicat intercommunal à vocation multiple de Saint-François-Longchamp Montgellafrey.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat intercommunal à vocation multiple de Saint-François-Longchamp Montgellafrey, aux sociétés Atelier Dujol Architecture, Bureau d'études Plantier, Tech'tra ingénierie et In Situ et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2013, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Dursaptet Mme Samson-Dye, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01244
Date de la décision : 14/11/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Illégalité engageant la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : SCP DENARIE - BUTTIN - BERN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-11-14;12ly01244 ?
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