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15/10/2013 | FRANCE | N°12LY03165

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 15 octobre 2013, 12LY03165


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 2012, présentée pour Mme C...A..., épouseB..., domiciliée,... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201419 du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 juin 2012 par lesquelles le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination du pays elle sera renvo

yée ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de faire injonction au préfet de ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 décembre 2012, présentée pour Mme C...A..., épouseB..., domiciliée,... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201419 du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 27 juin 2012 par lesquelles le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination du pays elle sera renvoyée ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de faire injonction au préfet de l'Allier, en cas d'annulation du refus de titre, de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à défaut, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification l'arrêt à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire durant cet examen ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée, est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en n'examinant pas sa situation dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français sera annulée par exception d'illégalité du refus de titre, est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet a estimé être en situation de compétence liée, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire de trente jours sera annulée par exception d'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français, est insuffisamment motivée, est dépourvue de base légale dès lors que l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est contraire à l'article 7.2 de la directive retour, méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination sera annulée par exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 février 2013, présenté par le préfet de l'Allier, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le moyen tiré de ce que le refus de séjour est insuffisamment motivé en raison d'une erreur dans les textes visés est inopérant, que les autres moyens dirigés contre le refus de titre et l'obligation de quitter le territoire français ne sont pas fondés ; que les conclusions dirigées contre la décision fixant un délai de départ sont irrecevables car nouvelles en appel et, à titre subsidiaire, les moyens soulevés contre cette décision ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu la directive 2004/38/CE du 29 avril 2004 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président ;

1. Considérant que Mme C...A...épouseB..., ressortissante marocaine née le 1er février 1983, est entrée en France le 30 septembre 2007, sous couvert d'un visa de long séjour de type D, revêtu de la mention " étudiant " ; que le 26 novembre 2007, un titre de séjour mention " étudiant " lui a été délivré ; que ce titre a été renouvelé jusqu'au 25 novembre 2009 ; que MmeB..., qui a obtenu en 2009 le diplôme de master de commerce international à l'université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand et a sollicité son changement de statut, a obtenu le 26 janvier 2010 une carte de séjour temporaire mention " travailleur temporaire " qui lui a été renouvelée jusqu'au 7 mai 2012 ; qu'elle a sollicité le 27 février 2012 le renouvellement de ce titre de séjour ; qu'elle a par ailleurs sollicité le 30 avril 2012, n'ayant plus de travail et à défaut d'un titre salarié, la délivrance d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " compte tenu de sa situation familiale et ses liens avec la France ; que par un arrêté en date du 27 juin 2012, le préfet de l'Allier a refusé de faire droit à ces demandes, assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel sera renvoyée Mme B...; que Mme B...relève appel du jugement du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur le refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la motivation d'une décision ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la décision refusant de délivrer un titre de séjour que ce refus de titre contient les considérations de droit et de fait qui en constituent son fondement ; que cette décision est ainsi suffisamment motivée au regard des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979, alors même que le préfet a fait, à tort, application des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le cadre de l'examen de la demande de renouvellement du titre " travail temporaire " de Mme B...au lieu des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain que le Tribunal a, dans le jugement attaqué, substituées comme fondement légal à ce refus ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des termes de l'arrêté attaqué, que le préfet, qui a pris en compte les éléments exposés par la requérante dans ses différentes demandes, se serait cru à tort en situation de compétence liée pour les rejeter et qu'il aurait méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'existence d'une erreur de droit manque en fait et doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle a séjourné une première fois en France régulièrement avec sa famille entre 1998 et 2002 ; qu'elle a durant cette période poursuivi ses études de la 3ème à la terminale et obtenu le baccalauréat ; qu'elle a quitté la France avec sa famille en 2002 avant de retourner le 30 septembre 2007 une nouvelle fois sur le territoire français régulièrement avec un visa étudiant afin de poursuivre des études supérieures ; qu'elle a résidé, depuis lors et jusqu'au refus attaqué, régulièrement en France, d'abord avec une carte de séjour temporaire étudiant délivrée le 26 novembre 2007 et qui lui a été renouvelée jusqu'au 25 novembre 2009, ayant obtenu son diplôme de master de commerce international à l'université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, puis à compter du 26 janvier 2010 avec une carte de séjour temporaire mention " travail temporaire " à la suite de son changement de statut, ayant travaillé auprès d'une société française comme chargée de clientèle puis auprès d'une autre société comme gestionnaire export, ce titre lui ayant été renouvelé jusqu'à la date du refus attaqué ; qu'elle fait valoir qu'elle est parfaitement intégrée dans la société française où elle a noué des liens amicaux, en produisant notamment en appel six attestations d'amis, et qu'elle est mariée depuis le 23 juillet 2011 avec M. D...B..., ressortissant ivoirien né en 1974, qui est titulaire d'une carte de séjour temporaire étudiant et qui serait inscrit en master de marketing et management de l'industrie pharmaceutique ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la requérante était mariée depuis moins d'un an à la date du refus attaqué ; qu'elle ne produit pas d'élément concernant l'intensité et la durée de sa relation avec M. B...antérieurement à ce mariage et notamment l'existence d'une vie commune ; qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Maroc où réside notamment son père diplomate et n'établit pas qu'elle serait dans l'impossibilité de reconstituer sa vie privée et familiale avec son époux en dehors de la France, notamment dans son pays ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas, par la décision contestée, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée de mener une vie privée et familiale normale au regard des buts poursuivis ; que cette décision n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle n'est pas davantage entachée, dans les circonstances de l'espèce sus-décrites, d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

8. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet de l'Allier a refusé le 27 juin 2012 la délivrance d'un titre de séjour à Mme B...; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, elle était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

9. Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B...n'est pas entachée d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre, doit être écarté ;

10. Considérant que, compte tenu des éléments précédemment exposés, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant un délai de départ volontaire de 30 jours :

11. Considérant que si Mme B...entend demander à la Cour l'annulation de la décision du 27 juin 2012 fixant un délai de départ de trente jours, elle n'a toutefois présenté devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand aucune conclusion dirigée contre cette décision ; que, par suite, ces conclusions sont nouvelles en appel et doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que, compte tenu de ce qui précède les décisions refusant à Mme B... un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité ; que, dès lors, l'intéressée n'est pas fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité desdites décisions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., épouseB..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Samson, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2013.

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N° 12LY03165

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY03165
Date de la décision : 15/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : GAUSSERES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-10-15;12ly03165 ?
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