Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 janvier 2013, présentée pour M. A... C..., domicilié ... ;
M. C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1003325 du 26 juin 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 mars 2010 du préfet du Rhône refusant l'échange de son permis de conduire irakien contre un permis français ;
2°) d'annuler la décision du 29 mars 2010 ;
3°) d'enjoindre à l'administration de procéder à l'échange demandé ;
4°) de condamner l'Etat à verser à MeB..., son conseil, une somme de 1 000 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. A...C...soutient que c'est à tort que le Tribunal administratif a estimé que son permis de conduire n'était plus en cours de validité ; qu'il ressort de l'attestation de l'ambassade de la République d'Irak qu'en absence de possibilité de renouvellement des permis de conduire, entre 2003 et 2010, ceux-ci sont restés valables ; qu'il n'est en effet pas possible qu'au cours de cette période l'ensemble des conducteurs n'ait plus été autorisé à circuler avec leur permis de conduire, alors que le renouvellement n'était pas possible ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du 2 octobre 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle, près le Tribunal de grande instance de Lyon, a accordé l'aide totale à M. A...C...;
Vu l'ordonnance du 19 juin 2013 portant clôture de l'instruction au 16 juillet 2013 ;
Vu, enregistré le 2 juillet 2013, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. C...a obtenu son premier titre de séjour le 26 février 2009 alors que son permis de conduire irakien avait perdu sa validité le 4 juin 2006, date à laquelle il se trouvait encore en Irak ; qu'en conséquence, il ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article 10.3 de l'arrêté du 8 février 1999 et le préfet était tenu de rejeter sa demande d'échange ; que l'attestation de l'ambassade d'Irak, produite par le requérant, postérieure à la décision attaquée et obtenue auprès des autorités irakiennes alors qu'il a le statut de réfugié, ne saurait être admise comme preuve du caractère authentique du permis de conduire à échanger ; que ne peuvent être prise en considération les documents émanant d'autorités étrangères et obtenus en dehors de la voie diplomatique ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu l'arrêté du 8 février 1999 du ministre de l'équipement, des transports et du logement fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les Etats n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 septembre 2013 :
- le rapport de M. du Besset, président de chambre ;
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., représentant M.C... ;
1. Considérant que M. C...a demandé au préfet du Rhône d'échanger son permis de conduire irakien contre un permis français ; que, par décision du 29 mars 2010, le préfet du Rhône a refusé cet échange au motif que ce permis de conduire irakien était périmé depuis le 4 juin 2006 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de cette décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222.3 du code de la route : " Tout permis de conduire national, en cours de validité, délivré par un Etat ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen, peut être reconnu en France jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après l'acquisition de la résidence normale de son titulaire. Pendant ce délai, il peut être échangé contre le permis français, sans que son titulaire soit tenu de subir les examens prévus au premier alinéa de l'article R. 221.3. Les conditions de cette reconnaissance et de cet échange sont définies par arrêté du ministre chargé des transports (...) " ; qu'aux termes de l'article 7 de l'arrêté du ministre de l'équipement, des transports et du logement du 8 février1999 susvisé, alors en vigueur : " 7.1. Pour être échangé contre un titre français, tout permis de conduire national, délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen, doit répondre aux conditions suivantes : / (...) 7.1.2. Etre en cours de validité ; (...) ";
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, selon une attestation du consul d'Irak à Paris, produite pour la première fois en appel, le renouvellement des permis de conduire a été, du fait de la guerre, suspendu en Irak de 2003 à 2010 ; que le ministre de l'intérieur, qui ne saurait utilement faire valoir que cette attestation n'a pas été transmise par la voie diplomatique, ne conteste pas la réalité de cet état de fait ;
4. Considérant que, les permis de conduire irakiens n'ayant pu, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, être renouvelés de 2003 à 2010, ces permis, lorsqu'ils sont arrivés à péremption pendant cette période, doivent être regardés comme ayant gardé leur validité au moins jusqu'à la fin de celle-ci ; qu'ainsi le permis de conduire irakien de M. C..., qui est arrivé à péremption le 4 juin 2006, devait être regardé comme étant encore en cours de validité au 29 mars 2010, date de la décision en litige ; que, dès lors, le préfet du Rhône ne pouvait légalement en refuser l'échange au motif qu'il était périmé ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que l'administration procède à l'échange du permis de conduire irakien de M. C...contre un permis français ; qu'il y a lieu d'adresser une injonction en ce sens au préfet du Rhône ; qu'il lui sera imparti à cet effet un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, à ce titre, à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au profit de Me Amélie Prudhon, avocat de M. C..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1003325 du 26 juin 2012 du Tribunal administratif de Lyon et la décision du 29 mars 2010 du préfet du Rhône sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Rhône de procéder à l'échange du permis de conduire irakien de M. C...contre un permis français dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera, au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros à Me B..., sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône. Copie en sera adressée à MeB....
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2013, où siégeaient :
- M. du Besset, président de chambre,
- M. Gazagnes, président-assesseur,
- Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 octobre 2013.
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N° 13LY00103