La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/09/2013 | FRANCE | N°12LY02775

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 septembre 2013, 12LY02775


Vu la requête, enregistrée le 8 novembre 2012 au greffe de la Cour, présentée pour l'EURL Concept EC, dont le siège est 38 rue Jean Jaurès à Commentry (03600) ;

L'EURL Concept EC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1001340-1001341 du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des majorations y afférentes, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2003 au 31 décembre 2006, ainsi que des cotisations sup

plémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre...

Vu la requête, enregistrée le 8 novembre 2012 au greffe de la Cour, présentée pour l'EURL Concept EC, dont le siège est 38 rue Jean Jaurès à Commentry (03600) ;

L'EURL Concept EC demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1001340-1001341 du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des majorations y afférentes, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2003 au 31 décembre 2006, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2006, ainsi que des intérêts de retard dont elles étaient assorties ;

2°) de la décharger desdites impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'avis de la commission départementale ne lui a pas été intégralement notifié, en méconnaissance des dispositions de l'article R.* 60-3 du livre des procédures fiscales ; que, s'agissant de l'indemnité de 62 505,35 euros qui lui a été versée de la part de son nouveau prestataire de photocopieurs, l'administration a procédé à un changement de base légale de l'imposition, sans envoyer une nouvelle proposition de rectification, ce qui entache la procédure d'irrégularité ; que, dans la mesure où le caractère régulier de sa comptabilité n'a pas été remis en cause, l'administration ne pouvait reconstituer le montant des recettes encaissées en retenant une méthode globale, à savoir la différence, du début à la fin des exercices, entre le chiffre d'affaires comptabilisé, corrigé de la variation des comptes clients ; qu'elle devait procéder à un pointage des encaissements ; que le recours à une telle méthode, aux résultats imprécis, doit entraîner la décharge des impositions ; qu'il en est de même pour les rectifications au titre de la taxe déductible ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 février 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que l'avis de la commission départementale des impôts a été porté intégralement à la connaissance de l'EURL Concept EC ; que le fondement légal de l'imposition de l'indemnité de 62 505 euros, à savoir les articles 38-2 et 38-2 bis du code général des impôts, n'a pas été modifié ; qu'à hauteur de la somme de 19 062 euros, correspondant à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui n'avaient pas été contestés, la charge de la preuve du caractère exagéré de l'imposition incombe à l'EURL Concept EC, en application de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales ; que, s'agissant de la taxe collectée, la méthode retenue par le vérificateur tient compte des règles du fait générateur et de l'exigibilité de la taxe prévues en matière de prestation de services ; que le vérificateur a eu en outre recours à des tests de cohérence ; que, s'agissant de la taxe déductible, les rappels découlent de l'application des dispositions du code général des impôts prévoyant que la taxe sur la valeur ajoutée ne peut être déduite qu'après le paiement des factures mentionnant cette taxe ; que les rappels ont porté sur les seules prestations pour lesquelles les factures n'avaient pas été payées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2013 :

- le rapport de M. Besse, rapporteur,

- et les conclusions de M. Lévy Ben-Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que l'EURL Concept EC, qui exerçait une activité d'expertise comptable, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur la période du 1er octobre 2003 au 31 décembre 2006, à l'issue de laquelle ont été mis en recouvrement des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, assortis d'intérêt de retard et de pénalités, sur l'ensemble de la période, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2006 ; que l'EURL Concept EC relève appel du jugement du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes tendant à la décharge desdites impositions ;

Sur la régularité de la procédure :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.* 60-3 du livre des procédures fiscales : " L'avis ou la décision de la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts." ; qu'il résulte de l'instruction que, par courrier du 2 juin 2009, reçu le lendemain, l'administration, qui n'était pas tenue d'adresser une copie du procès-verbal de la commission, a adressé au gérant de l'EURL Concept EC l'avis intégral de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence de notification de l'avis manque en fait ;

3. Considérant, en second lieu, que, dans la proposition de rectification du 17 avril 2008, l'administration avait indiqué que l'indemnité de 62 505,35 euros versée en 2006 par la société prestataire du contrat de location de photocopieurs suite à une renégociation de l'ancien contrat, au titre des échéances restant à courir, constituait un produit imposable au titre de l'exercice clos en 2006, en se fondant sur les dispositions des article 38-2 et 38-2 bis du code général des impôts, après avoir rappelé, notamment, que les créances nées au cours d'un exercice doivent, si elles sont certaines dans leur principe et leur montant, entrer en compte pour la détermination de l'actif afférent audit exercice ; que, dans sa réponse, en date du 19 août 2008, aux observations de l'EURL Concept EC, qui avait estimé que ces sommes auraient dû être comptabilisées en produits constatés d'avance, l'administration a indiqué qu'en vertu de l'article 38-2 bis du code général des impôts, les produits doivent être rattachés aux exercices comptables selon la règle des créances acquises, qu'en l'espèce la totalité des sommes avait été encaissée en 2006, et que la règle du rattachement des produits constatés d'avance ne s'appliquait pas, le produit perçu ne correspondant pas à un versement reçu en avance sur le paiement d'un prix fixé entre les parties pour une prestation future ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient l'EURL Concept EC, l'administration n'a modifié, en cours de procédure, ni le fondement légal ni même le motif de la rectification litigieuse ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant, en premier lieu, que l'EURL Concept EC, qui ne critique que la méthode retenue pour l'évaluation des insuffisances de déclaration au titre de la taxe collectée, soit, en droits, 10 679 euros en 2004, 3 942 euros en 2005 et 2 942 euros en 2006, et de la taxe déductible, soit, en droits, 4 540 euros en 2004 et 8 286 euros en 2005, ne conteste pas le bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2006, ni des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la taxe non déclarée sur certaines opérations, de la taxe sur les carburants, et de la taxe déduite par anticipation ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R.* 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...). " ; que lorsque le contribuable n'est pas en situation d'imposition d'office et qu'il peut se prévaloir d'une comptabilité régulière, sincère et probante, la charge de la preuve du caractère insuffisant des déclarations du contribuable pèse normalement sur l'administration, sauf lorsque le contribuable a donné son accord à la rectification ou s'est abstenu d'y répondre dans le délai légal ; qu'en l'espèce, en réponse à la proposition de rectification qu'elle avait reçue le 18 décembre 2007, s'agissant des impositions au titre de l'exercice 2004, l'EURL Concept EC n'avait contesté que les rappels au titre de la taxe déductible ; que, par ailleurs, en réponse à la proposition de rectification qu'elle avait reçue le 22 avril 2008, concernant les années 2005 et 2006, elle n'avait contesté que les rehaussements au titre de la taxe déductible pour 2005, ainsi que les impositions supplémentaires pour la taxe collectée, à hauteur de 414 euros en droits en 2005 et 676 euros en droits en 2006 ; que la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions incombe donc à l'administration, pour ces rehaussements, et à l'EURL Concept EC, pour les autres ;

6. Considérant qu'en application des dispositions de l'article 269 du code général des impôts : " 2. La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. " ; qu'il résulte de l'instruction que, pour mettre à la charge de l'EURL Concept EC des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la taxe collectée, le vérificateur, qui n'a pas remis en cause la comptabilité de la société dont il a admis le caractère régulier, sincère et probant, a comparé le montant du compte 4457 " TVA collectée ", en fin d'exercice, et la taxe sur la valeur ajoutée figurant au compte des créances sur les clients, en tenant compte, pour les années 2005 et 2006, de la taxe sur la valeur ajoutée " extournée au compte 4457 ", et considéré que la différence révélait une insuffisance de déclaration ; que, s'agissant de la taxe déduite, il a constaté que le solde du compte 445660 " TVA déductible biens et services " était créditeur et a estimé que, sous réserve des comptes de TVA à régulariser, cette situation révélait, à cette hauteur, une déduction excessive ; qu'il a calculé les rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur les différences entre ces montants ;

7. Considérant qu'en l'absence de remise en cause du caractère régulier, sincère et probant de la comptabilité, l'administration fiscale ne peut, pour établir que la société n'aurait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'ensemble des recettes encaissées, ou qu'elle aurait trop déduit de taxe déductible, recourir à une méthode d'évaluation moins précise que les écritures comptabilisées ; que, s'il est loisible à l'administration de procéder à des tests de cohérence des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée en les rapprochant d'autres éléments tirés de la comptabilité de la société, tels les soldes des comptes de produits et ceux des comptes des clients, corrigés de leurs variations entre l'ouverture et la clôture de la période considérée, une telle méthode, susceptible de révéler l'existence d'anomalies dans les déclarations de la société contribuable, ne saurait apporter, faute d'établir que la source des écarts ainsi révélés résulte d'une dissimulation de recettes et non de pratiques commerciales régulières pouvant les expliquer, la preuve que les écarts ainsi relevés doivent faire l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en recourant à une méthode imprécise, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe s'agissant des impositions qui ont été contestées, de l'insuffisance de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée ni de ce que la requérante aurait déduit trop de taxe déductible ; que, par suite, il y a lieu de décharger l'EURL Concept EC des impositions supplémentaires au titre de la taxe déductible pour 2004 et 2005, ainsi que des rappels au titre de la taxe collectée, à hauteur de 414 euros en 2005 et 676 euros en 2006 ;

8. Considérant, en revanche, que s'agissant des autres impositions, l'EURL Concept EC, qui ne donne aucune explication sur les écarts constatés entre les soldes de sa comptabilité et ses déclarations de chiffre d'affaires, n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des impositions mises à sa charge ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'EURL Concept EC est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes en ce qu'elles tendaient à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge à concurrence de la somme de 4 540 euros en droits au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2004, à concurrence de la somme de 8 700 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2005 et de 676 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par l'EURL Concept EC ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'EURL Concept EC est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge, à concurrence de la somme de 4 540 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2004, de la somme de 8 700 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2005 et de la somme de 676 euros pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2006, ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 2 : Le jugement nos 1001340-1001341 du 2 octobre 2012 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à l'EURL Concept EC la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL Concept EC et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2013 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2013.

''

''

''

''

2

N° 12LY02775


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02775
Date de la décision : 24/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-07-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Procédure de taxation. Procédure de rectification (ou redressement).


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-09-24;12ly02775 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award