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18/07/2013 | FRANCE | N°12LY02239

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 18 juillet 2013, 12LY02239


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 17 août 2012, présentée pour le préfet de l'Yonne ;

Le préfet de l'Yonne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201037 du 12 juillet 2012, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé, à la demande de l'intéressée, sa décision, en date du 20 avril 2012, obligeant Mme B...A...à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de Mme A...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 17 août 2012, présentée pour le préfet de l'Yonne ;

Le préfet de l'Yonne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201037 du 12 juillet 2012, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé, à la demande de l'intéressée, sa décision, en date du 20 avril 2012, obligeant Mme B...A...à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de Mme A...devant le tribunal administratif ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision obligeant Mme A...à quitter le territoire français était insuffisamment motivée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 février 2013, présenté pour MmeA..., qui conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre incident, à l'annulation du refus de titre de séjour et à ce qu'il soit enjoint au

préfet de l'Yonne, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le refus de carte de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 313-14 et L. 314-11-2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est à la charge de ses deux filles et de ses deux gendres ; qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11-7 du code précité en raison des liens entretenus avec ses filles, ses gendres et leurs enfants ; que l'obligation de quitter le territoire français est bien entachée d'un défaut de motivation ;

Vu le courrier du 10 juin 2013, par lequel le président de la formation de jugement informe les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de procéder d'office à une substitution de base légale concernant l'obligation de quitter le territoire français litigieuse ;

Vu le courrier du 26 juin 2013, par lequel le président de la formation de jugement informe les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des conclusions incidentes de Mme A...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2013 :

- le rapport de M. Tallec, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

Sur les conclusions incidentes de MmeA... :

1. Considérant que le Tribunal administratif de Dijon, par l'article 1er du jugement du 12 juillet 2012, a annulé l'obligation de quitter le territoire français prise par le préfet de l'Yonne à l'encontre de MmeA..., mais a rejeté, par l'article 4 de ce même jugement, les conclusions de l'intéressée dirigées contre la décision dudit préfet du 20 avril 2012 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que l'appel du préfet de l'Yonne est limité à la contestation de l'article 1er de ce jugement ; que les conclusions de l'appel incident de MmeA..., dirigées contre l'article 4 dudit jugement, ont été enregistrées au greffe de la Cour le 2 février 2013, soit après l'expiration du délai d'un mois imparti pour former appel contre le jugement attaqué, dont Mme A...a reçu notification le 20 juillet 2012 ; que, par suite, dès lors que ces conclusions de l'appel incident soulèvent un litige différent de celui qui résulte de l'appel principal, elles ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions du préfet de l'Yonne :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ;

3. Considérant que la décision portant refus de séjour fait référence aux deux autorisations provisoires de séjour qui avaient été délivrées à Mme A...en raison de son état de santé, fait état de la demande présentée par l'intéressée le 23 août 2011 sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne l'avis défavorable émis le 21 décembre 2011 par le médecin inspecteur de l'Agence Régionale de Santé de Bourgogne et indique qu'elle ne remplit plus les conditions prévues par ces dispositions ; qu'en outre l'arrêté litigieux indique " qu'après un examen attentif de sa situation, Mme B...A...n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que sa situation ne présente aucune circonstance exceptionnelle ou humanitaire permettant d'y déroger " et que " la mesure envisagée n'est pas de nature à comporter pour la situation personnelle, familiale ou professionnelle de l'intéressée des conséquences d'une exceptionnelle gravité, puisqu'elle n'apporte pas la preuve d'être totalement isolée dans son pays d'origine, où elle a toujours vécu " ; que la seule circonstance que n'aient pas été mentionnés deux courriers de la fille et du gendre de l'intéressée faisant notamment état des difficultés de Mme A...en cas de retour au Maroc, en raison du remariage de son mari, de l'impossibilité de ses deux fils de la prendre en charge et de ses problèmes de santé, ne suffit pas à faire regarder l'obligation de quitter le territoire français comme entachée d'une insuffisance de motivation ; que, dès lors, le préfet de l'Yonne est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Dijon a, pour ce seul motif, annulé sa décision du 20 avril 2012 obligeant Mme A...à quitter le territoire français ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; / 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée

sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; / 5° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'arrêté contesté, que Mme A...est entrée en France le 5 décembre 2009, munie d'un passeport et d'un visa portant la mention " famille de français " en cours de validité ; que, par suite, le préfet de l'Yonne ne pouvait pas légalement lui faire obligation de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions précitées du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait du être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

7. Considérant qu'en l'espèce, la mesure d'éloignement contestée trouve son fondement légal dans les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui peuvent être substituées à celles du 1° du I de ce même article, dès lors, en premier lieu, qu'ayant fait l'objet d'un refus de renouvellement de titre de séjour le 20 avril 2012, Mme A...se trouvait dans la situation où, en application des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code précité, le préfet pouvait décider qu'elle serait obligée de quitter le territoire français, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale, dont les parties ont été régulièrement informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, n'a pour effet de priver l'intéressée d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement n° 1201037 du 12 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du préfet de l'Yonne en date du 20 avril 2012 obligeant Mme B...A...à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, lui a enjoint de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être annulé ;

9. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que dès lors, les conclusions susvisées présentées par Mme A...et tendant au prononcé d'une injonction doivent être rejetées ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Mme A...une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1201037 du 12 juillet 2012 du Tribunal administratif de Dijon est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif et les conclusions présentées par celle-ci à la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2013, à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller

Lu en audience publique, le 18 juillet 2013.

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N° 12LY02239

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02239
Date de la décision : 18/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Jean-Yves TALLEC
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : JOURDAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-07-18;12ly02239 ?
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