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11/07/2013 | FRANCE | N°12LY03024

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2013, 12LY03024


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 décembre 2012, présentée par la préfète de la Loire ;

La préfète de la Loire demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204916, du 6 novembre 2012, du Tribunal administratif de Lyon qui a annulé ses décisions du 18 avril 2012 par lesquelles elle a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) de rejeter la demande de M. A...;

Elle soutient

que :

- le requérant n'avait pas soulevé le moyen d'une absence de motivation en droit ; que le ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 décembre 2012, présentée par la préfète de la Loire ;

La préfète de la Loire demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204916, du 6 novembre 2012, du Tribunal administratif de Lyon qui a annulé ses décisions du 18 avril 2012 par lesquelles elle a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B...A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

2°) de rejeter la demande de M. A...;

Elle soutient que :

- le requérant n'avait pas soulevé le moyen d'une absence de motivation en droit ; que le Tribunal administratif de Lyon a statué au-delà des conclusions de la requête ;

- le moyen tiré du défaut de motivation d'un refus de titre de séjour à un demandeur d'asile est inopérant, dès lors qu'elle était en situation de compétence liée ;

- aucun des moyens dirigés contre sa décision de refus de délivrance d'un titre de séjour n'est opérant ;

- une nouvelle décision d'obligation de quitter le territoire a été édictée le 19 juin 2012 à l'encontre de M. A...; cette décision du 19 juin 2012 est devenue définitive ; par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation des décisions du 18 avril 2012 portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2013, présenté pour M. A...; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête est irrecevable ; que la préfète s'est crue à tort en situation de compétence liée ; que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus ; que l'arrêté préfectoral ne fait état d'aucun élément sur sa famille ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) du 4 avril 2013, admettant M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 juin 2013 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 751-3 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 811-2 du même code : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4 (...) " ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la préfète de la Loire a reçu notification le 14 novembre 2012 du jugement n° 1204916 du 6 novembre 2012 ; que la requête d'appel a été enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 13 décembre 2012 et confirmée par courrier le 17 décembre 2012, soit dans le délai d'appel imparti par les dispositions précitées du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir présentée par M. A...tirée de la tardiveté de la requête d'appel de la préfète de la Loire doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation présentées par la préfète de la Loire :

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.A..., ressortissant arménien, est entré en France en décembre 2010, accompagné de son épouse ; que sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 9 décembre 2011 ; que, par arrêté du 18 avril 2012, la préfète de la Loire a refusé à M. A...la délivrance d'un titre de séjour, en assortissant ce refus d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision désignant l'Arménie comme pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'issue de ce délai ;

4. Considérant que, par jugement rendu le 6 novembre 2012, le Tribunal administratif de Lyon a annulé, pour insuffisance de motivation en droit, la décision du 18 avril 2012 par laquelle la préfète de la Loire a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. A...; qu'il est constant que cette décision a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par M. A...; que, dès lors que par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire avaient été refusés à M.A..., la préfète de la Loire était tenue de refuser à ce dernier la délivrance des titres de séjour prévus à l'article L. 313-13 et au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que la préfète de la Loire se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision de refus de titre de séjour n'est pas opérant ; qu'en conséquence, c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le motif que la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour était insuffisamment motivée, pour annuler cette décision et, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M.A..., tant devant le tribunal administratif que devant la Cour ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi :

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la préfète de la Loire a notifié à M.A..., suite au dépôt de sa requête en première instance, le 19 juin 2012, un nouveau refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire et d'une décision fixant le pays de destination ; que la préfète de la Loire doit être regardée comme ayant, en notifiant cette obligation de quitter le territoire, implicitement mais nécessairement abrogé sa précédente décision du 18 avril 2012 faisant obligation à M. A...de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, par voie de conséquence, celle désignant le pays de son renvoi ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de ces décisions sont devenues sans objet ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

7. Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la préfète de la Loire était en situation de compétence liée pour refuser à M. A...la délivrance d'un titre de séjour en qualité de réfugié ou de bénéficiaire de la protection subsidiaire ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cette décision est inopérant ;

8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

9. Considérant qu'il ressort des mentions de la décision que la préfète a, subsidiairement, procédé à l'examen de la situation de M. A...au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A...fait valoir qu'il séjourne en France depuis décembre 2010 avec son épouse et leur enfant né à Roanne le 20 juillet 2010, et que son frère réside également en France ; que, toutefois, cette durée de séjour en France, justifiée par l'examen de la situation de l'intéressé au regard du droit d'asile, est, en tout état de cause, faible au regard de ses liens avec son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, où il a épousé une compatriote et où, en l'absence de risques personnels et actuels avérés, il pourra poursuivre une vie privée et familiale normale en compagnie de son épouse et de leur enfant ; que, par suite, le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. A...n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

10. Considérant que M. A...ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour contester la décision de refus de délivrance du titre de séjour, laquelle n'a ni pour objet, ni pour effet de désigner le pays de renvoi ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la préfète de la Loire, que cette dernière est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 18 avril 2012 par lesquelles elle a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1204916, en date du 6 novembre 2012, du Tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A...dirigées contre les décisions en date du 18 avril 2012 portant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

Article 3 : La demande de M. A...tendant à l'annulation de la décision du 18 avril 2012 portant refus de délivrance d'un titre de séjour est rejetée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2013 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2013.

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N° 12LY03024


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY03024
Date de la décision : 11/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SELARL AD JUSTITIAM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-07-11;12ly03024 ?
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