Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 décembre 2012, présentée pour M. A... B..., domicilié... ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1200862-1200864 du 12 juillet 2012 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2012 par lequel le préfet de la Haute-Loire a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné à l'expiration du délai de trente jours qui lui a été laissé pour quitter le territoire français ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) de faire injonction au préfet de la Haute-Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
Il soutient qu'il appartenait au préfet de s'assurer que la mesure qu'il a prise ne l'exposait pas à des risques ; que le préfet a, ainsi, commis une erreur de droit ; que le préfet, qui avait connaissance de l'existence de risques, du fait de la demande d'asile qu'il avait déposée, devait procéder à un tel contrôle ; que la décision a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 février 2013, présenté par le préfet de la Haute-Loire, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'il ne s'est pas senti en compétence liée ; qu'il appartenait à M. B...d'établir la réalité des risques encourus en cas de retour dans son pays ; que la décision ne méconnaît pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la décision du 2 octobre 2012 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2013 :
- le rapport de M. Besse, premier conseiller ;
1. Considérant que M.B..., de nationalité russe, est entré en France en novembre 2009 ; qu'il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 1er février 2012 ; que, par décision en date du 15 février 2012, le préfet de la Haute-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit d'office à l'expiration de ce délai ; que M. B...relève appel du jugement du 12 juillet 2012 en tant que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet de la Haute-Loire a fixé le pays de destination ;
2. Considérant que, d'une part, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. (...) L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. " ;
3. Considérant que, d'autre part, aux termes de l'article L. 513-2 dudit code : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible./ Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains et dégradants " ;
4. Considérant, en premier lieu, que M. B...soutient que le préfet de la Haute-Loire a commis une erreur de droit en s'abstenant d'examiner effectivement et selon une appréciation qui lui est propre les éléments concernant les risques encourus en Russie et susceptibles de porter atteinte aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préfet n'ayant pu apprécier, selon le requérant, l'existence de faits de nature à faire obstacle à son retour dans son pays qui auraient été portés à la seule connaissance de l'Office de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour prendre la décision fixant le pays de destination ;
5. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, que le préfet ne s'est pas senti lié par les décisions de l'Office de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour prendre la décision fixant le pays de destination ; que, par ailleurs, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de solliciter de l'intéressé de produire des éléments concernant les risques encourus dans son pays préalablement à l'intervention de la décision fixant le pays de destination prise en même temps que l'obligation de quitter le territoire visée par les dispositions du I. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé concernant les risques qu'il pouvait encourir en cas de retour en Russie au vu des éléments qui avaient été portés à sa connaissance notamment dans le cadre de la constitution et de l'instruction auprès des services de la préfecture du dossier de la demande d'asile présentée par l'intéressé valant demande de carte de résident prévue au 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit commise par le préfet et de l'absence d'examen particulier de la situation de M. B...doit être écarté ;
6. Considérant, en second lieu, que M. B...fait valoir qu'il serait exposé à des menaces contre sa vie et à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Russie, en raison des fonctions de chef de patrouille au ministère des affaires intérieures qu'il a occupées, en Ingouchie, entre janvier 2006 et novembre 2009 ; qu'il soutient qu'il était affecté au contrôle des véhicules aux frontières dans le cadre de la lutte antiterroriste, que plusieurs de ses collègues ont été victimes d'attentats en représailles, que deux inconnus l'ont roué de coups en mai 2009, qu'il a été la cible de tirs en novembre 2009 ; que, toutefois, il ne produit aucun élément probant à l'appui de ses allégations et n'établit pas même avoir exercé des fonctions au sein du ministère des affaires intérieures ; qu'en outre, il ne fait état d'aucune démarche en vue d'obtenir la protection des autorités de son pays ; que, dans ces conditions, il n'établit pas la réalité de risques personnellement encourus en cas de retour dans son pays ; qu'ainsi, la décision fixant le pays de destination n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Loire.
Délibéré après l'audience du 11 juin 2013 à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
M. Bourrachot, président-assesseur,
M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique le 2 juillet 2013.
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N° 12LY03056
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