Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 novembre 2012, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;
M. A...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101113 du 5 novembre 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision 48SI du ministre de l'intérieur, en date du 11 février 2011, portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul et injonction de restituer celui-ci ;
2°) d'annuler la décision du 11 février 2011 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de rétablir les points illégalement retirés de son permis de conduire et de lui restituer celui-ci, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai de recours contre l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. A...soutient que, pour l'infraction du 14 octobre 2010, il ressort du relevé d'information intégral que l'amende forfaitaire a fait l'objet d'un paiement immédiat entre les mains de l'agent verbalisateur ; que la mention, sur ce relevé, que l'infraction est devenue définitive le 14 octobre 2010, emporte reconnaissance de la réalité de l'infraction et de la date de paiement de l'amende forfaitaire ; que les mentions dudit relevé sont similaires en ce qui concerne le paiement de l'amende forfaitaire relative à l'infraction du 16 mars 2010, pour laquelle le ministre a produit la quittance de paiement ; que, faute pour l'administration de produire la copie de la quittance de paiement exempte de toute réserve, la délivrance de l'information préalable n'est pas établie ; qu'il appartenait au Tribunal administratif de s'interroger sur la date de paiement de l'amende forfaitaire, immédiat ou différé, pour ensuite déterminer la personne à qui incombait la charge de la preuve et la façon dont cette preuve pouvait être rapportée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance du 24 avril 2013 portant clôture de l'instruction au 13 mai 2013 ;
Vu, enregistré le 13 mai 2013, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;
Le ministre soutient que la procédure du paiement immédiat n'est utilisée qu'avec l'accord de l'automobiliste ; que M. A...ne soutient pas avoir payé entre les mains de l'agent verbalisateur l'amende relative à l'infraction du 14 octobre 2010 et ne l'établit par aucun commencement de preuve ; que les mentions du relevé d'information intégral ne permettent pas d'identifier clairement un paiement immédiat ; que le silence du requérant sur le moment du paiement ne saurait lui être favorable sur le terrain de la dialectique de la preuve ; qu'il soutient qu'un procès-verbal a été dressé à son encontre, ce qui exclut un paiement immédiat de l'amende ; qu'il s'est nécessairement vu remettre un avis de contravention comportant l'information requise ; que, si le requérant prétendait avoir payé entre les mains de l'agent verbalisateur, il ne peut nier avoir reçu une quittance comportant ces informations ; qu'il ne peut y avoir enregistrement de l'infraction dans le fichier national du permis de conduire sans délivrance d'une quittance numérotée ; que la jurisprudence du Conseil d'Etat a écarté le moyen tiré de ce que le paiement serait intervenu avant la remise de la quittance et de l'information préalable, dès lors que le conducteur pouvait renoncer à la modalité du paiement immédiat avant de procéder à la signature de la quittance ou inscrire sur celle-ci une réserve sur les modalités selon lesquelles l'information lui a été délivrée ; qu'en l'espèce M. A...ne conteste pas sérieusement avoir signé sa quittance et n'allègue pas y avoir inscrit des réserves ; que, d'autre part, à supposer même qu'il prétende avoir procéder à cette inscription, cette situation est matériellement improbable ; qu'en effet, la procédure exceptionnelle du paiement immédiat ne peut intervenir qu'avec l'accord sans réserve de l'automobiliste, qui n'a aucun intérêt à solliciter un tel paiement puis à émettre des réserves ; que si M. A...souhaite se prévaloir de réserves hypothétiques, il paraît légitime qu'il les produise ;
Vu l'ordonnance du 14 mai 2013 portant réouverture de l'instruction jusqu'au 29 mai 2013 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Vu la décision par laquelle le rapporteur public a été, sur sa proposition, dispensé d'exposer ses conclusions à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :
- le rapport de M. du Besset, président de chambre ;
1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande M. A...tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 11 février 2011 portant invalidation de son permis de conduire pour solde de points nul ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : " Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ... entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire, l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, que si l'auteur de l'infraction s'est vu, préalablement au paiement d'une telle amende, délivrer un document contenant les informations qu'elles prévoient, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
3. Considérant que, selon le relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M.A..., le paiement de l'amende forfaitaire consécutive à l'infraction verbalisée le 14 octobre 2010 a été effectué ce même 14 octobre 2010 ; que le requérant soutient que, dans ces conditions, l'administration n'établit pas que l'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route lui a été donnée préalablement à ce paiement ;
4. Considérant que si le ministre de l'intérieur fait valoir quant à lui que le paiement a pu intervenir postérieurement au 14 octobre 2010, il n'invoque aucun élément permettant de douter de l'exactitude des mentions du relevé d'information intégral ou de leur portée ; qu'ainsi, alors qu'il n'a versé au dossier ni le procès-verbal de la contravention prévu à l'article A. 37-2 du code de procédure pénale, ni la souche de la quittance prévue à l'article R. 49-2 du même code, il n'établit pas que l'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route a été donnée à M. A...avant le paiement de l'amende forfaitaire ; que, par suite, la décision de retrait de deux points consécutive à l'infraction du 14 octobre 2010 doit être regardée comme intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;
5. Considérant que la décision 48 SI du 11 février 2011 est fondée sur un retrait total de douze points du capital du permis de conduire de M.A... ; qu'en raison de l'illégalité affectant la décision de retrait de deux points consécutive à l'infraction du 14 octobre 2012, le solde de points de ce titre de conduite, n'est pas nul ; que, par suite, cette décision est entachée d'illégalité ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
7. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que l'administration restitue à M. A...le bénéfice des points illégalement retirés de son permis de conduire ainsi que son titre de conduite ; que, par suite, il doit être enjoint au ministre de l'intérieur de restituer deux points au permis de conduire de M. A...et, sous réserve de la commission d'autres infractions, de lui restituer son titre de conduite ; qu'il lui sera imparti à cet effet un délai d'un mois ;
8. Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1101113 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 5 novembre 2012 et la décision du ministre de l'intérieur du 11 février 2011 portant invalidation du permis de conduire de M. A...sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir deux points au capital du permis de conduire de M. A...et, sous réserve de la commission d'autres infractions, de lui restituer ce permis, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2013, où siégeaient :
- M. du Besset, président de chambre,
- M. Gazagnes, président assesseur,
- M. Dursapt, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 juin 2013.
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N° 12LY02774
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