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27/06/2013 | FRANCE | N°12LY02717

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 12LY02717


Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme B...D..., domiciliée ...;

Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204236 du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 29 mai 2012 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée et a prononcé à son encontre u

ne interdiction de retour sur le territoire français d'un an ;

2°) d'annuler les dé...

Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme B...D..., domiciliée ...;

Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204236 du 2 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 29 mai 2012 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet du Rhône ;

3°) d'enjoindre audit préfet, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que les décisions ont été signées par une autorité incompétente ;

- que le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations des articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison de ses attaches familiales et privées en France et de la durée et de la continuité de son séjour sur le territoire français ;

- que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est illégale par conséquence de l'illégalité des décisions qui la fondent ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est entachée d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête de Mme D...a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense ;

Vu l'ordonnance en date du 14 février 2013 fixant la clôture de l'instruction au 1er mars 2013 à 16 heures 30, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance en date du 30 avril 2013 portant réouverture de l'instruction et fixant la clôture de l'instruction au 17 mai 2013 à 16 heures 30, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2013 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeD..., ressortissante algérienne née le 9 juin 1966, est entrée en France le 24 novembre 2001, sous couvert d'un visa de court séjour et déclare y résider depuis lors ; que sa demande d'asile territorial a été rejetée le 14 mars 2003 ; qu'un premier refus de délivrance de titre de séjour lui a été opposé le 29 avril 2003 ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière a été pris à son encontre le 15 octobre 2003 ; que le Tribunal administratif de Lyon par un jugement du 10 avril 2008 a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ; que ce jugement a été confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 26 mars 2009 ; que le préfet du Rhône suite à une nouvelle demande a opposé le 23 mars 2011 un troisième refus de délivrance d'un titre de séjour ; que, par les décisions attaquées en date du 29 mai 2012, le préfet du Rhône a rejeté la demande de certificat de résidence algérien présentée le 4 janvier 2012 par MmeD..., l'a obligée à quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établirait être légalement admissible et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ; que Mme D...relève appel du jugement du Tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa quatrième demande de délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :

2. Considérant que l'arrêté attaqué a été signé par Mme C...A..., directrice de la citoyenneté, de l'immigration et de l'intégration, qui a reçu délégation, par arrêté préfectoral n° 2012110-0001 du 19 avril 2012, régulièrement publié au numéro spécial du recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône du 23 avril 2012, à l'effet de signer d'une manière permanente les actes administratifs établis par sa direction ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la décision de refus de séjour aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dans sa rédaction issue du troisième avenant en date du 11 juillet 2001, qui reprend les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) / 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser un séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que la requérante fait valoir qu'elle a vécu habituellement en France depuis plus de dix ans, et qu'elle est donc en droit d'obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que, toutefois, elle se borne à produire pour 2003, un récépissé de demande de carte de séjour valable du 19 février au 18 mai 2003 et une simple attestation d'un avocat de Thionville indiquant qu'il a présenté pour elle une demande d'annulation de la décision, en date du 29 avril 2003, du préfet de la Moselle lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que, pour 2004, elle se prévaut d'un courrier de la ligue des droits de l'homme indiquant qu'elle a été reçue en entretien en 2004 et 2005, d'une attestation d'hébergement de sa nièce et des photos des fiançailles de cette dernière ; qu'elle n'établit pas par les pièces jointes au dossier, avoir résidé habituellement en France de 2002 à 2012, notamment en 2003 et 2004 ; que Mme D...n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la décision attaquée a méconnu les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien modifié ;

5. Considérant qu'ainsi que cela est susmentionné, Mme D...ne justifie pas de la durée de résidence habituelle en France dont elle se prévaut ; que, d'autre part, elle fait valoir la présence de plusieurs de ses frères et soeurs sur le territoire français et des liens affectifs qui l'unissent à un ressortissant français ; que, cependant, il est constant que la requérante a de nombreux frères et soeurs dans son pays d'origine, qu'elle a quitté en 2001 pour venir en France, à l'âge de trente-cinq ans ; que l'ancienneté de sa relation avec son compagnon, ressortissant français, n'est pas établie dès lors que certaines pièces produites en appel, notamment sa carte de titulaire d'aide médicale mentionne, pour l'année 2011, une adresse à Lyon, différente de leur adresse commune à Charbonnières-les-Bains ; que, dès lors, eu égard à l'ensemble de ces circonstances et aux conditions du séjour de MmeD..., le préfet du Rhône a pu lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de ce refus ; que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent ainsi être écartés ; que la requérante ne peut utilement invoquer une méconnaissance de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que sa situation est régie par les stipulations de l'accord franco-algérien modifié ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant que la décision de refus de délivrance de titre de séjour n'étant pas illégale, Mme D...n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de séjour, la décision du préfet du Rhône faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire français n'est pas contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeD... ;

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

9. Considérant que la décision de refus de délivrance de titre de séjour et la mesure d'éloignement n'étant pas illégales, Mme D...n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de ces décisions à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ;

10. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de séjour, la décision du préfet du Rhône faisant obligation à Mme D...de quitter le territoire français n'est pas contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. (...) Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. " que, s'il ressort des termes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans pouvoir se limiter à l'un ou plusieurs d'entre eux, la circonstance que sa présence sur le territoire français ne représente pas une menace pour l'ordre public n'est pas de nature à faire obstacle, à elle seule, au prononcé d'une interdiction de retour si la situation de l'intéressé, au regard notamment des autres critères, justifie légalement, dans son principe et sa durée, la décision d'interdiction de retour ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D...est irrégulièrement entrée en France et qu'elle a fait l'objet de plusieurs décisions de refus de titre de séjour, alors que sa demande d'asile a été rejetée par les autorités compétentes ; que comme il était dit plus haut les décisions attaquées ne portent pas une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale ; que, dans ces circonstances, et quand bien même la présence en France de Mme D...ne représenterait pas une menace pour l'ordre public, le préfet du Rhône n'a pas méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prenant à l'encontre de la requérante une décision d'interdiction de retour sur le territoire français durant une année ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et au ministre l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2013 à laquelle siégeaient :

Mme Mear, présidente,

M. Reynoird, premier conseiller,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013.

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N° 12LY02717


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02717
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SELARL MATHIEU AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-27;12ly02717 ?
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