La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2013 | FRANCE | N°12LY01250

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 06 juin 2013, 12LY01250


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mai 2012, présentée pour la société Hyparlo, dont le siège est 26 quai Michelet à Levallois Perret (92300), et pour la société Carrefour Insurance Limited, dont le siège est 25/28 Adelaïde Road à Dublin (Irlande) ;

Les sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003929 du 14 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à verser les sommes de 7 774 euros hors taxe à la société Carre

four Insurance Limited, subrogée dans les droits de la société Hyparlo, et de 10 26...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 mai 2012, présentée pour la société Hyparlo, dont le siège est 26 quai Michelet à Levallois Perret (92300), et pour la société Carrefour Insurance Limited, dont le siège est 25/28 Adelaïde Road à Dublin (Irlande) ;

Les sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003929 du 14 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à verser les sommes de 7 774 euros hors taxe à la société Carrefour Insurance Limited, subrogée dans les droits de la société Hyparlo, et de 10 266 euros hors taxe à la société Hyparlo, avec les intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la requête et capitalisation des intérêts ;

2°) de prononcer les condamnations demandées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited soutiennent, à titre principal, que le Tribunal administratif a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne reconnaissant pas la responsabilité sans faute de l'Etat du fait des attroupements ; qu'au regard de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales et de la jurisprudence, les faits perpétrés l'ont été par des attroupements et engagent la responsabilité de l'Etat ; qu'en l'espèce, ces actes sont constitutifs de délits d'entrave à la circulation et de dégradations volontaires au sens des articles 322-1 et suivants du code pénal ; qu'il résulte des constatations de l'huissier Rajon et de l'expertise de M. B...que les manifestants ont, le 21 septembre 2009, bloqué le secteur de la sous-préfecture de Roanne et dans ce cadre 150 chariots du magasin Carrefour ont été dérobés et déplacés devant celle-ci ; que cette action de blocage s'est produite dans le cadre du mouvement de revendication collective des producteurs de lait en mai et juin 2009 ; qu'ainsi, ces agissements, qui constituent un délit commis à force ouverte, résultent d'un attroupement ou d'un rassemblement précisément identifié ; qu'à titre subsidiaire, le Tribunal administratif a mal apprécié les faits en ne retenant pas la responsabilité de l'Etat du fait de la carence fautive des forces de l'ordre ; que la seule inaction des autorités de police établit l'existence d'une carence, nonobstant toute notion de faute ; qu'en l'espèce la carence des forces de l'ordre n'est pas contestée par le préfet, seul a été débattu le caractère fautif de celle-ci ; que le Tribunal administratif a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que l'existence de la carence n'était pas rapportée ; qu'il a inversé la charge de la preuve, dès lors qu'il appartient au préfet de prouver que les forces de l'ordre ont pris les mesures nécessaires ; que, très subsidiairement, l'inaction des forces de l'ordre, leur ouvre droit à indemnisation en vertu du principe de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, fondée sur la responsabilité sans faute de l'administration ; que le préjudice qu'elles ont subi est anormal et spécial ; qu'elles en justifient l'évaluation et la réalité ;

Vu l'ordonnance du 16 avril 2013 portant clôture de l'instruction au 6 mai 2013 ;

Vu, enregistré le 23 avril 2013, le mémoire présenté pour le préfet de la Loire, qui indique s'en remettre à ses écritures du 18 juillet 2011 ;

Vu, enregistré le 30 avril 2013, le nouveau mémoire présenté pour les sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited qui concluent aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par les moyens que la faute simple suffit à engager la responsabilité de l'Etat ; qu'il n'y a pas eu en l'espèce une action de " commando ", le préfet ayant reconnu que les producteurs laitiers à l'origine des délits étaient des manifestants agissant dans le cadre d'un mouvement de protestation national ; qu'il n'est apporté aucune preuve de la préméditation ; que les actions des manifestants à l'origine du vol de chariots, notamment le blocage de la sous-préfecture de Roanne, se sont prolongées sur une grande partie de la journée du 21 septembre 2009, si bien que les forces de l'ordre ont largement disposé du temps nécessaire pour faire cesser les délits ; qu'ainsi leur inaction ne peut que résulter d'une décision d'abstention volontaire, susceptible d'engager la responsabilité sans faute de l'Etat ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2013 :

- le rapport de M. du Besset, président de chambre ;

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de MeA..., représentant les sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande des sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited tendant à la condamnation de l'Etat à verser les sommes de 7 774 euros à la société Carrefour Insurance Limited, subrogée dans les droits de la société Hyparlo, et de10 266 euros à la société Hyparlo, en réparation des préjudices subis par la société Hyparlo à la suite du vol de chariots sur le parking du magasin Carrefour à Mably, le 21 septembre 2009, par des producteurs de lait ;

Sur la responsabilité de l'Etat au titre de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : " L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens. / Il peut exercer une action récursoire contre la commune lorsque la responsabilité de celle-ci se trouve engagée. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 21 septembre 2009, des producteurs de lait se sont rendus au centre commercial Carrefour de Mably où ils se sont emparés, dans les abris situés sur le parking, de 150 chariots qui leur ont servi ensuite à bloquer l'accès à la sous-préfecture de Roanne ; que ces délits, commis dans le cadre d'un mouvement national de revendication des producteurs de lait, doivent être regardés, dans les circonstances de l'espèce, comme constituant une action qui n'a pas été spontanée mais préméditée et organisée ; qu'une telle action ne peut être regardée comme le fait d'un attroupement ou d'une manifestation au sens des dispositions précitées de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, la responsabilité de l'Etat ne peut être recherchée sur le fondement de ces dispositions ;

Sur la responsabilité de l'Etat du fait de la carence des services de police :

4. Considérant que si l'administration a pu être informée de la possibilité d'actions menées par les producteurs de lait dans le cadre d'un mouvement national, pour autant, les sociétés requérantes, auxquelles incombe la charge de la preuve, n'établissent ni qu'elle aurait été prévenue de l'action qui devait être menée le 21 septembre 2009 au centre commercial Carrefour de Mably et aurait négligé de prendre des mesures pour empêcher la commission des délits en cause, ni que, informée en temps utile, elle se serait abstenue d'intervenir ; que, par suite, elles ne sont pas fondées à soutenir que l'Etat a commis dans l'usage de ses pouvoirs de police une faute de nature à engager sa responsabilité ;

Sur la responsabilité de l'Etat pour rupture de l'égalité devant les charges publiques :

5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que les autorités investies du pouvoir de police se seraient volontairement abstenues, pour un motif d'intérêt général, d'empêcher les agissements du 21 septembre 2009 ; qu'ainsi, en l'absence d'un lien de causalité direct entre les dommages résultant de ces incidents et un fait de l'administration, les société requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la responsabilité de l'Etat se trouve engagée sans faute pour rupture de l'égalité devant les charges publiques ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Hyparlo et la société Carrefour Insurance Limited ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions présentées au titre des frais non compris dans les dépens :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser une somme quelconque à la société Hyparlo et à la société Carrefour Insurance Limited ;

DECIDE :

Article 1er : La requête des sociétés Hyparlo et Carrefour Insurance Limited est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Hyparlo, à la société Carrefour Insurance Limited et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2013, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Rabaté, président assesseur,

- et Mme Samson-Dye, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

''

''

''

''

2

N° 12LY01250

el


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award