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28/05/2013 | FRANCE | N°12LY01947

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 28 mai 2013, 12LY01947


Vu la requête, enregistrée le 17 juillet 2012, présentée pour la commune d'Aubière, représentée par son maire en exercice ;

La commune d'Aubière demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102054 en date du 22 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du 13 septembre 2011 par lequel son maire a retiré à Mme A...B...la délégation qui lui avait été consentie par arrêté du 14 avril 2008 dans les domaines de l'enfance, la jeunesse, l'éducation et la vie scolaire ;

2°) de rejeter la demande de Mme A...B...;



3°) de condamner Mme A...B...à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des disposit...

Vu la requête, enregistrée le 17 juillet 2012, présentée pour la commune d'Aubière, représentée par son maire en exercice ;

La commune d'Aubière demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102054 en date du 22 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du 13 septembre 2011 par lequel son maire a retiré à Mme A...B...la délégation qui lui avait été consentie par arrêté du 14 avril 2008 dans les domaines de l'enfance, la jeunesse, l'éducation et la vie scolaire ;

2°) de rejeter la demande de Mme A...B...;

3°) de condamner Mme A...B...à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur d'appréciation et d'erreur de droit ; que le motif tiré de la nécessité de respecter un accord politique n'a pas été déterminant dans la décision qui aurait également été prise si Mme B...n'avait pas rejoint le groupe " PS et apparentés " ; qu'à supposer que ce motif ait été considéré comme déterminant, il n'est pas étranger à la bonne marche de l'administration communale ;

- le retrait de délégation est un pouvoir discrétionnaire ; que le maire n'est pas obligé de motiver sa décision ;

- les relations entre le maire et Mme B...se sont fortement dégradées un an après les élections municipales ; que des courriers attestent de cette dégradation ; que Mme B... a fait part de ses désaccords avec les méthodes du maire à l'ensemble de la majorité municipale ; que des désaccords sont apparus sur le fonctionnement de la cantine et qu'ils ont fait l'objet d'une publication dans la presse ; que Mme B...a demandé aux agents municipaux d'étudier la légalité du règlement de la cantine sans en informer ni le maire ni le directeur général des services ; qu'elle a interrogé à ce sujet les services de la préfecture ;

- le maire et Mme B...ne pouvaient plus travailler correctement ensemble du fait de la perte de confiance réciproque ; que le changement de groupe de Mme B... résulte de ses dissensions avec le maire ;

- si le retrait de délégation ne peut être motivé par un rééquilibrage de la répartition des délégations en fonction de l'appartenance aux divers courants constituant la majorité municipale, la jurisprudence admet une nouvelle désignation pour la représentation de commune dans les organismes extérieurs ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2012, pour Mme A...B...qui conclut au rejet de la requête, à la condamnation de la commune d'Aubière à lui verser 7 911 euros en réparation du préjudice financier qu'elle a subi du fait du retrait de sa délégation et 1 euro au titre du préjudice moral et à la condamnation de la commune d'Aubière à lui verser 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a manifesté son opposition sur la gouvernance et les méthodes utilisées par le maire depuis 2009 ; que ces dissensions résultent du fonctionnement peu démocratique du débat au sein de la majorité municipale ; que ces dissensions se sont traduites par la démission de trois adjoints et un conseiller délégué lors de la séance du conseil municipal du 15 décembre 2011 ;

- une charte de management a été rédigée lors de l'arrivée de la nouvelle équipe municipale ; qu'elle a appliqué les principes de cette charte pour l'élaboration du règlement de la cantine ; que ces principes ont été violés par le maire ; que le courrier adressé à la préfecture porte uniquement sur des questions juridiques et ne fait pas état de différend avec le maire ;

- le retrait de délégation est intervenu uniquement à partir du moment où elle a rejoint le groupe " PS et apparentés " alors que de l'aveu même du maire les dissensions existaient depuis 2009 ; qu'elle est restée dans la majorité municipale ; que jamais elle ne s'est opposée au maire ni n'a voté contre une de ses propositions ; qu'elle est restée solidaire avec l'exécutif ; que le conseil municipal a continué de lui accorder sa confiance puisqu'il l'a maintenue au poste d'adjointe ; que le maire lui a confié le soin de représenter la commune dans des réunions et des conseils d'administration d'associations ; qu'il n'y a jamais eu d'incidences sur la bonne marche de l'administration justifiant le retrait de délégation ;

- le mail du 13 septembre 2011 informant le groupe de la majorité municipale motive la décision de retrait de délégation uniquement par le respect de l'accord conclu entre les deux tours de l'élection ;

- l'indemnité d'un montant de 879 euros mensuels n'a été rétablie que depuis le 22 mai 2012 ; qu'elle justifie donc d'un préjudice financier correspondant à la perte de 9 mois d'indemnité soit 7 911 euros ; que les propos du maire dans le journal " La Montagne " lui ont porté un préjudice moral et qu'elle requiert la condamnation symbolique de la commune à lui verser 1 euro ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 novembre 2012, présenté pour la commune d'Aubière qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que les conclusions indemnitaires sont des conclusions nouvelles en appel donc irrecevables ; qu'elles n'ont pas fait l'objet de demande préalable ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 décembre 2012, présenté pour Mme A...B...qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens, elle conclut, en outre, à ce que son préjudice financier s'élève à 10 548 euros ;

Vu les ordonnances en dates des 8 octobre 2012 et 3 décembre 2012, par lesquelles la date de la clôture de l'instruction a été fixée au 30 novembre 2012 et reportée au 31 décembre 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2013, présenté pour la commune d'Aubière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mai 2013 :

- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- et les observations de Me Teillot, avocat de la commune d'Aubière, et celles de MmeB... ;

1. Considérant que la commune d'Aubière fait appel du jugement n° 1102054 du 22 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du 13 septembre 2011 par lequel son maire a retiré à Mme A...B...la délégation qui lui avait été consentie par arrêté du 14 avril 2008 dans les domaines de l'enfance, la jeunesse, l'éducation et la vie scolaire ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation à des membres du conseil municipal. Le membre du conseil municipal ayant démissionné de la fonction de maire en application des articles LO141 du code électoral, L. 3122-3 ou L. 4133-3 du présent code ne peut recevoir de délégation jusqu'au terme de son mandat de conseiller municipal ou jusqu'à la cessation du mandat ou de la fonction l'ayant placé en situation d'incompatibilité. Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le maire peut, à tout moment, mettre fin aux délégations qu'il a consenties, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale ;

3. Considérant que si le maire de la commune d'Aubière a indiqué dans un courriel du 13 septembre 2011 aux élus de la liste " Un souffle nouveau " qu'il avait retiré les délégations de Mme B...au motif que celle-ci avait rejoint le groupe " PS et apparentés " et que ce départ déséquilibrait l'accord conclu en ce qui concernait le nombre d'adjoints issus des deux listes, il ressort des pièces du dossier que les relations entre Mme B...et le maire d'Aubière s'étaient détériorées depuis 2009, comme l'atteste notamment un courrier du 25 mai 2009 de Mme B...au maire ; qu'il résulte également d'un message électronique de Mme B...du 9 juin 2011 que celle-ci contestait les méthodes de travail du maire et constatait son isolement depuis la fin 2010 estimant que le rapport de confiance était ébranlé ; qu'à propos de l'élaboration du projet de règlement de la cantine, Mme B... a saisi directement les services de la préfecture sans concertation avec le maire et le directeur-général des services ; que dès lors, eu égard à l'altération des liens de confiance entre le maire et son adjoint, nécessaires à la bonne marche de l'administration communale, la décision en litige ne peut être regardée comme ayant été prise pour un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale ;

4. Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Aubière est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision en litige au motif que la décision avait été prise pour un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale ; que, toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme A...B...devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

5. Considérant que si Mme A...B...soutenait en première instance que le droit de priorité des adjoints avait été méconnu, le maire, à la date à laquelle il a procédé au retrait des délégations qu'il lui avait données, n'était pas tenu de remettre en cause celles qu'il avait pu attribuer à des conseillers municipaux ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune d'Aubière est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision en litige ; que, par suite, en tout état de cause, les conclusions incidentes indemnitaires de Mme A...B...doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation de la commune d'Aubière, qui n'est pas partie perdante à l'instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...B...une somme quelconque au titre des frais exposés par la requérante et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand n° 1102054 du 22 mai 2012 est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Aubière et à Mme A...B....

Délibéré après l'audience du 7 mai 2013 à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mai 2013.

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N° 12LY01947

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01947
Date de la décision : 28/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-01-02-02-03-04 Collectivités territoriales. Commune. Organisation de la commune. Organes de la commune. Maire et adjoints. Pouvoirs du maire. Délégation des pouvoirs du maire.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Marc CLEMENT
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : TEILLOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-05-28;12ly01947 ?
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