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16/05/2013 | FRANCE | N°12LY01767

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 16 mai 2013, 12LY01767


Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2012, présentée pour la société Encore Productions, dont le siège est 6 rue du Mont Thabor à Paris (75011), représentée par son président en exercice ; la société Encore Productions demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004995 du 9 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 19 septembre 2008 par l'établissement public Voies Navigables de France (VNF), pour un montant de 46 985,58 euros et, à tit

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Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2012, présentée pour la société Encore Productions, dont le siège est 6 rue du Mont Thabor à Paris (75011), représentée par son président en exercice ; la société Encore Productions demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004995 du 9 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 19 septembre 2008 par l'établissement public Voies Navigables de France (VNF), pour un montant de 46 985,58 euros et, à titre subsidiaire, à sa condamnation à lui verser la même somme en réparation du préjudice subi du fait de l'impossibilité de pouvoir disposer du bâtiment qu'elle avait loué, et à ordonner la compensation de sa dette avec cette créance ;

2°) d'annuler l'état exécutoire attaqué, ou, à défaut, de condamner VNF à lui verser une somme de 46 985,58 euros et d'ordonner la compensation de sa dette avec cette créance ;

3°) de mettre à la charge de VNF la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que le Tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire comme tardives, en absence de preuve apportée par VNF d'une notification comportant les voies et délais de recours ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le contrat n'était pas administratif, alors qu'il comportait des clauses exorbitantes du droit commun ;

- VNF ne pouvait émettre un titre exécutoire au titre de loyers non payés dès lors qu'il n'existait pas d'accord entre les parties à la nouvelle convention du 17 juillet 2008 sur le point de départ du paiement du loyer, qu'à titre subsidiaire VNF a manqué à son obligation de délivrance pendant la période au cours de laquelle elle n'a pu jouir du bâtiment, qu'à titre infiniment subsidiaire elle a droit à une indemnisation de son préjudice ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2012, présenté pour l'établissement public Voies Navigables de France, représenté par son directeur général en exercice ; l'établissement public VNF conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société Encore Productions une somme de 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens ;

Il fait valoir que :

- c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu la tardiveté, en raison de la connaissance acquise exprimée par le courrier du 14 décembre 2009 ;

- à titre subsidiaire, le contrat en litige ne relève pas de la compétence du juge administratif ;

- c'est à tort que la société requérante invoque l'existence d'un nouveau contrat, alors que l'avenant en cause s'est borné à substituer VNF au bailleur dans un contrat précédent et à en prolonger l'application, sans modifier le loyer journalier ; la juridiction administrative n'est pas compétente pour appliquer l'article 1719 du code civil ; les travaux ayant généré le dommage allégué ne sont pas imputables au bailleur, qui n'a commis aucune faute, mais à la SPLA Lyon Confluence ; le montant du préjudice allégué n'est pas justifié ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 16 novembre 2012, présenté pour la société Encore Production, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle fait valoir en outre qu'elle n'avait pas à former de recours administratif préalable obligatoire ;

Vu le courrier adressé aux parties le 5 avril 2013, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 avril 2013, présenté pour la société Encore Production, par lequel elle présente ses observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office ;

Elle soutient que la juridiction administrative est compétente pour statuer sur sa demande dès lors que le contrat en cause est administratif ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 avril 2013, présenté pour l'établissement public VNF, par lequel il présente ses observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office ;

Il fait valoir que la requête doit être rejetée dès lors que le litige a été porté devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 portant dispositions diverses en matière de transports ;

Vu le décret n° 91-796 du 20 août 1991, modifié, relatif au domaine confié à Voies navigables de France par l'article 124 de la loi de finances pour 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 avril 2013 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

- les observations de Me B..., représentant l'établissement public Voies Navigables de France ;

1. Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté, pour tardiveté, les conclusions de la société Encore Productions tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 19 septembre 2008 par l'établissement public Voies Navigables de France (ci après VNF) et, comme présentées devant une juridiction incompétente pour en connaître, ses conclusions subsidiaires aux fins d'indemnisation et de compensation ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la société civile immobilière " La Sucrière ", gestionnaire d'un bâtiment situé à Lyon en vertu d'une convention d'occupation temporaire obtenue auprès de VNF, valide jusqu'au 7 août 2008, a conclu un contrat de location précaire dudit bâtiment pour une période allant du 14 avril 2008 au 30 septembre 2008 avec la société Encore Productions ; que par avenant, entré en vigueur le 7 août 2008, il a été convenu que l'établissement VNF, propriétaire du bâtiment occupé, se substituait à la SCI " La Sucrière " en qualité de bailleur et que la durée de la location était prolongée jusqu'au 2 novembre 2008 ; que le titre exécutoire en litige porte sur la créance que VNF estime due par la société Encore Productions, en vertu de ce contrat, au titre de loyers non payés correspondant à la période allant du 8 au 31 août 2008 ;

3. Considérant que la contestation par une personne privée de l'acte par lequel un établissement public initie avec elle, conduit ou termine une relation contractuelle, quelle qu'en soit la forme, dont l'objet est la valorisation ou la protection de ce domaine privé, qui n'affecte ni son périmètre ni sa consistance et ne comporte pas de clauses exorbitantes de droit commun, ne met en cause que des rapports de droit privé et relève, à ce titre, de la compétence du juge judiciaire ;

4. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que l'immeuble en litige relève du domaine privé de VNF ;

5. Considérant, d'autre part, que la société Encore Productions fait valoir que le contrat, auquel VNF est devenu partie, stipule que " (...) si la locataire n'utilise pas la totalité de la Sucrière, [le propriétaire] se réserve le droit de louer une autre partie des locaux à un autre ou plusieurs utilisateurs, sous les réserves suivantes : non concurrence directe entre les manifestants, absence de nuisances rendant les manifestations incompatibles ", que " toute activité, notamment de vente, de location ou prestation pour le compte du locataire devra faire l'objet d'un accord préalable écrit [du bailleur] " et que " (...) les prestataires commandités par le locataire devront être agréés par [le bailleur] " ;

6. Considérant toutefois que le contrat en cause porte sur la location précaire d'un espace de 2 000 mètres carrés inclus dans un bâtiment plus vaste, destiné à accueillir, notamment, des expositions ; que, compte tenu de la spécificité de cet objet, les clauses précitées, qui ne sont pas étrangères par leur nature à celles qui sont susceptibles d'être prévues dans un cadre de droit privé, ne sont pas exorbitantes du droit commun ;

7. Considérant qu'ainsi, le contrat en litige qui ne comporte pas occupation du domaine public et ne contient pas de clauses exorbitantes du droit commun, est un contrat de droit privé ; que, par suite, le litige né de son application relève de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que ses conclusions indemnitaires et aux fins de compensation ont été rejetées par le Tribunal administratif de Lyon comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

9. Considérant par ailleurs qu'il n'appartenait, pour les mêmes motifs, qu'aux juridictions judiciaires de connaître des conclusions dirigées contre l'état exécutoire fondé sur le contrat dont il s'agit ; que, dès lors, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué, en tant qu'il rejette ces conclusions comme tardives et, statuant par voie d'évocation, de rejeter ces conclusions de la demande comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés non compris dans les dépens :

10. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la société Encore Productions doivent être rejetées ;

11. Considérant, en second lieu, que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par VNF ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1004995 du Tribunal administratif de Lyon en date du 9 mai 2012 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande de la société Encore Productions tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 19 septembre 2008 par l'établissement public Voies Navigables de France.

Article 2 : Les conclusions de la demande de la société Encore Productions tendant à l'annulation de l'état exécutoire émis à son encontre le 19 septembre 2008 par l'établissement public Voies Navigables de France sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Encore Productions, à l'établissement public Voies Navigables de France et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2013, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. A...et Mme Samson-Dye, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 16 mai 2013.

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N° 12LY01767

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01767
Date de la décision : 16/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

17-03-02-03-01-02 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel. Contrats. Contrats de droit privé. Contrats dépourvus de clauses exorbitantes du droit commun et de participation au service public.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-05-16;12ly01767 ?
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