Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2012, présentée pour le syndicat mixte du lac d'Annecy, représenté par son président, dont le siège est 7 rue des Terrasses à Cran-Gevrier (74962) ;
Le syndicat mixte du lac d'Annecy demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0805955 du tribunal administratif de Grenoble
du 25 juillet 2012 qui a annulé le titre exécutoire émis le 27 juin 2008 à l'encontre de la SCI le Domaine Médicis en tant que ce titre met à la charge de cette société le paiement d'une somme de 13 024,57 euros à son profit, au titre d'une participation aux travaux de réalisation d'un collecteur d'égout, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par cette société ;
2°) de rejeter la demande de la SCI le Domaine Médicis devant le tribunal administratif ;
3°) de condamner cette société à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Le syndicat mixte du lac d'Annecy soutient, en premier lieu, que le titre exécutoire mentionne qu'il constitue la collectivité destinataire du paiement et que la somme due sera imputée sur le budget annexe assainissement ; que la facture jointe au titre motivant ce dernier comporte les mentions exigées par l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; qu'en application du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, seul le bordereau de titres de recettes doit être signé ; qu'ainsi, le titre litigieux est formellement légal au regard des dispositions de l'article 12 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; qu'en second lieu, le collecteur d'égout a été réalisé dans le seul intérêt de l'immeuble construit par la SCI le Domaine Médicis ; que, toutefois, ce collecteur étant éventuellement susceptible, ultérieurement, de bénéficier à d'autres propriétaires, il a été décidé de prendre en charge une partie de son financement ; que la convention qui a été signée avec ladite société est très favorable à cette dernière, dès lors qu'il s'est engagé au plan financier sans y être tenu ; que la somme en litige constitue le complément de la participation pour raccordement à l'égout qui a été réclamée à la SCI le Domaine Médicis ; qu'en application de l'article 1134 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ;
Vu le jugement attaqué ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 31 janvier 2013, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 février 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 12 février 2013, présenté pour la SCI le Domaine Médicis, qui demande à la cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner le syndicat mixte du lac d'Annecy à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La SCI le Domaine Médicis soutient, en premier lieu, que le titre exécutoire litigieux ne comporte aucune des mentions exigées par l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; que le bordereau de titres de recettes ne respecte pas davantage les dispositions de cet article ; que l'irrégularité affectant ainsi le titre en litige ne peut être couverte par le fait que la facture annexée à celui-ci comporterait les mentions requises, dès lors que le signataire de cette facture n'a pas la qualité d'ordonnateur du syndicat mixte du lac d'Annecy ; qu'en second lieu, la participation litigieuse ne s'appuie sur aucun texte ; que la somme en cause, qui correspond en réalité au financement d'un réseau public d'assainissement, ne peut être exigée d'un constructeur ; que cette somme n'est pas visée par le permis de construire qui lui a été accordé, lequel constitue le fait générateur des taxes et participations d'urbanisme ; qu'elle a été assujettie au paiement de la taxe locale d'équipement et de la participation pour raccordement à l'égout ; que la canalisation, qui a été réalisée sous maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre du syndicat mixte du lac d'Annecy, dont les caractéristiques excédent les besoins de son projet et qui dessert d'autres constructions ne constitue pas un équipement propre ; que la convention qu'elle a signée est entachée de nullité et ne saurait dès lors la lier ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 18 février 2013, la clôture de l'instruction a été reportée au 15 mars 2013 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 avril 2013 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de Me Couderc, représentant CDMF-avocats affaires publiques, avocat de la SCI le Domaine Médicis ;
1. Considérant que, par un jugement du 25 juillet 2012, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le titre exécutoire émis le 27 juin 2008 à l'encontre de la SCI le Domaine Médicis en tant que ce titre met à la charge de cette société le paiement d'une somme de 13 024,57 euros au profit du syndicat mixte du lac d'Annecy, au titre d'une participation aux travaux de réalisation d'un collecteur d'égout, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par cette société ; que le syndicat mixte du lac d'Annecy relève appel de ce jugement ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ;
3. Considérant que le titre exécutoire litigieux ne comporte aucune des mentions requises par la loi du 12 avril 2000 ; que, si en appel, le syndicat mixte du lac d'Annecy produit le bordereau des titres de recettes, celui-ci comporte seulement une signature, illisible, et l'indication que le signataire est l'ordonnateur du syndicat mixte du lac d'Annecy ; que, si ce dernier se prévaut du fait qu'une facture comportant toutes les mentions exigées par les dispositions précitées a été annexée au titre qui a été notifié à la SCI le Domaine Médicis, il ne résulte pas de l'instruction que le signataire de cette facture, en l'occurrence le directeur général des services techniques, dont la signature ne correspond pas à celle qui est portée sur ledit bordereau, serait l'auteur du titre contesté ; que la circonstance ainsi invoquée est donc inopérante, et ceci à supposer même que, comme le soutient le syndicat mixte requérant, le directeur général des services techniques aurait bénéficié d'une délégation lui permettant de prendre la décision attaquée ; que, si le syndicat mixte du lac d'Annecy fait valoir que les dispositions du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, introduites par la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, prévoient que seul le bordereau de titre de recettes est signé pour être produit en cas de contestation, ces dispositions n'étaient pas en vigueur à la date du titre de perception en litige ; que le syndicat mixte du lac d'Annecy ne peut utilement invoquer les règles de nature comptable, et notamment l'article D. 1617-23 du code général des collectivités territoriales, qui sont sans incidence sur l'application des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; qu'enfin, la circonstance que le titre mentionne la collectivité destinataire du paiement et que la somme due sera imputée sur le budget assainissement est également sans incidence sur l'application de ces dispositions ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que l'article 4 précité de la loi du 12 avril 2000 a été méconnu en l'espèce ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme : " Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : / (...) 2° Le versement des contributions aux dépenses d'équipements publics mentionnées à l'article L. 332-6-1 (...). / 3° La réalisation des équipements propres mentionnées à l'article L. 332-15 (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 332-6-1 du même code : " Les contributions aux dépenses d'équipements publics prévues au 2° de l'article
L. 332-6 sont les suivantes : / (...) 2° a) La participation pour raccordement à l'égout prévue à l'article L. 1331-7 du code de la santé publique (...) " ; qu'aux termes des dispositions alors applicables de ce dernier article : " Les propriétaires des immeubles édifiés postérieurement à la mise en service de l'égout auquel ces immeubles doivent être raccordés peuvent être astreints par la commune, pour tenir compte de l'économie par eux réalisée en évitant une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire, à verser une participation s'élevant au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose d'une telle installation. / Une délibération du conseil municipal détermine les conditions de perception de cette participation " ; qu'enfin, aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 332-28 du code de l'urbanisme : " Les contributions mentionnées ou prévues au 2° de l'article L. 332-6-1 (...) sont prescrites (...) par l'autorisation de construire (...). Cette autorisation (...) en constitue le fait générateur. (Elle) en fixe le montant (...) " ;
5. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme fixent de façon limitative les contributions qui peuvent être mises à la charge des constructeurs à l'occasion de la délivrance d'une autorisation de construire ; qu'il en résulte qu'aucune autre participation ne peut leur être demandée ; qu'eu égard au caractère d'ordre public des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, toute stipulation contractuelle qui y dérogerait serait entachée de nullité ;
6. Considérant que la SCI le Domaine Médicis a obtenu le 16 décembre 2004 du maire de la commune de Faverges un permis de construire et le 31 mars 2005 un permis modificatif en vue de l'édification d'un ensemble de 44 logements ; que le permis de construire du
16 décembre 2004 met à la charge de la société une somme de 40 629,60 euros au titre d'une participation pour raccordement à l'égout, en application de l'article L. 332-6-1 2° a) du code de l'urbanisme ; qu'au cours de l'année 2006, la SCI le Domaine Médicis a accepté de signer une convention de financement, prévoyant notamment une contribution supplémentaire de 19 409, 64 euros, au titre d'une " participation aux travaux de construction du collecteur R 1 à R 11 " ; qu'après exécution des travaux, ce montant a été ramené à la somme de 13 024,57 euros, dont le paiement a été demandé par le titre exécutoire litigieux ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le collecteur d'égout pour lequel une contribution a été demandée à la SCI le domaine Médicis présente des caractéristiques excédant les seuls besoins du projet en vue duquel cette société a obtenu les permis de construire précités et est destiné à la desserte d'autres constructions ; que ce collecteur ne constitue donc pas un équipement propre, dont le financement pouvait être imposé à ladite société ; que cette dernière a déjà acquitté une participation pour raccordement à l'égout, du montant précité de 40 629,60 euros ; que la somme de 13 024,57 euros réclamée à la SCI le Domaine Médicis par le titre exécutoire contesté ne correspond pas à une participation mentionnée par les permis de construire du 16 décembre 2004 et du 31 mars 2005 ; que le syndicat mixte du lac d'Annecy ne peut utilement se prévaloir de la convention précitée qui a été signée par cette société, cette convention étant en effet entachée de nullité, dès lors qu'aucune autre contribution que celles mentionnées à l'article L. 332-6 précité du code de l'urbanisme ne peut être demandée aux constructeurs ; que, par suite, c'est également à juste titre que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que la contribution de 13 024,57 euros ne pouvait être légalement réclamée à la SCI le Domaine Médicis et, en conséquence, que le titre exécutoire litigieux est entaché d'illégalité en tant qu'il met cette somme à la charge de cette société ;
8. Considérant que le régime de contribution aux dépenses d'équipements publics institué par les dispositions précitées des articles L. 332-6 et L. 332-6.1 du code de l'urbanisme exclut, par lui-même, l'application du principe de l'enrichissement sans cause que le syndicat mixte requérant ne peut donc utilement invoquer ;
9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le syndicat mixte du lac d'Annecy n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le titre exécutoire émis le 27 juin 2008 à l'encontre de la SCI le Domaine Médicis, en tant que ce titre met à la charge de cette société le paiement d'une somme de 13 024,57 euros, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par cette société ;
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SCI le Domaine Médicis, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer au syndicat mixte du lac d'Annecy la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de ce syndicat mixte le versement d'une somme de 1 500 euros au bénéfice de cette société sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du syndicat mixte du lac d'Annecy est rejetée.
Article 2 : Le syndicat mixte du lac d'Annecy versera à la SCI le Domaine Médicis une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat mixte du lac d'Annecy et à la SCI le Domaine Médicis.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2013, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2013.
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N° 12LY02537
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