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16/04/2013 | FRANCE | N°12LY02331

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 16 avril 2013, 12LY02331


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme A..., domiciliée ...;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100626 du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007, ainsi que des pénalités et intérêts de retard y afférents ;

2°) de la décharger desdites impositions ;

3°) de condamner l

'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'a...

Vu la requête, enregistrée le 29 août 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme A..., domiciliée ...;

Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100626 du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007, ainsi que des pénalités et intérêts de retard y afférents ;

2°) de la décharger desdites impositions ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les motifs avancés par l'administration pour rejeter sa comptabilité sont imprécis et ne sont pas d'une gravité suffisante, au regard de la doctrine administrative 4 G-3341 du 25 juin 1998 ; que ni l'enregistrement global des recettes en fin de journée ni l'établissement d'un procès-verbal de non présentation de la comptabilité ne peuvent suffire à écarter une comptabilité comme non probante ; que la reconstitution du chiffre d'affaires faite par l'administration est excessivement sommaire et radicalement viciée dans son principe ; qu'elle présente en effet de nombreuses erreurs et incohérences ; qu'elle est en tous cas exagérée, le chiffre d'affaires reconstitué étant largement supérieur aux encaissements bruts imposables retrouvés sur leurs comptes bancaires ; que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Haute-Loire était irrégulier, au regard des prescriptions de l'article R.*60-3 du livre des procédures fiscales, comme insuffisamment motivé et comme n'ayant pas porté sur la reconstitution de recettes ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 décembre 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Haute-Loire, qui n'était saisie que du rejet de la comptabilité de Mme A..., était suffisamment motivé ; que la comptabilité de Mme A...a pu être écartée comme non probante dès lors notamment que seul un livre de caisse retraçait de manière générale les recettes sans présentation d'aucune pièce justificative ; que la doctrine invoquée par la requérante ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale ; que la reconstitution des recettes s'appuyait sur des données propres à l'entreprise ; que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires proposée par les requérants ne présente aucune garantie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2013 :

- le rapport de M. Besse, rapporteur,

- et les conclusions de M. Lévy Ben-Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que MmeA..., exerçant une activité de boulangerie, pâtisserie et épicerie, sur deux points de vente situés à Brioude et Lamothe (Haute-Loire) et un véhicule utilisé pour des tournées foraines, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2007 ; qu'à l'issue de cette vérification, l'administration l'a informée qu'elle entendait procéder à des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, selon la procédure de taxation d'office, pour les deux exercices ; que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis en recouvrement le 15 mars 2010, conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires qui s'était réunie le 3 décembre 2009 ; que, par décision du 24 janvier 2011, antérieure à la demande présentée par Mme A...devant le Tribunal administratif, le directeur départemental des finances publiques de la Haute-Loire a prononcé un dégrèvement en droits de 10 337 euros au titre de l'année 2006 et de 10 874 euros au titre de l'année 2007, et en pénalités à hauteur de 6 676 euros et 7 132 euros respectivement ; que, par jugement du 29 juin 2012, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de Mme A...tendant à la décharge des impositions restant en litige ; qu'elle relève appel de ce jugement ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscale : " Sont taxés d'office : (...) / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 193 de ce livre : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. " ;

3. Considérant que l'imposition litigieuse a été établie selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, au motif que Mme A...n'avait pas déposé ses déclarations dans le délai légal ; que Mme A..., qui ne conteste pas que l'administration pouvait recourir régulièrement à cette procédure, supporte la charge de la preuve du caractère exagéré de ladite imposition, en application des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, sans qu'elle puisse utilement faire valoir que l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires était irrégulier ni que sa comptabilité ne pouvait être écartée comme non probante ;

En ce qui concerne la reconstitution de recettes :

4. Considérant que Mme A...soutient que sa comptabilité ne pouvait être écartée comme comportant de graves irrégularités ;

6. Considérant, d'une part, qu'il résulte du procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité en date du 11 février 2009 établi par l'agent vérificateur et signé par Mme A..., que les recettes de l'activité, en espèces et en chèques, étaient inscrites de manière globale en fin de journée sur un cahier de caisse, en fonction des encaissements constatés, que l'intéressée ne conservait aucun justificatif de recettes et qu'aucune ventilation du chiffre d'affaires par rapport au taux de taxe sur la valeur ajoutée n'avait été présentée, les recettes étant inscrites toutes taxes comprises ; que ces éléments, dont la matérialité n'est pas contestée, étaient suffisants pour permettre à l'administration fiscale d'écarter comme affectée de graves irrégularités la comptabilité de MmeA..., indépendamment des autres éléments relevés dans la proposition de rectification en date du 19 juin 2009 ;

7. Considérant, d'autre part, que Mme A...se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 7 à 10 de la documentation administrative de base 4 G-3341 du 25 juin 1998 qui donnent des recommandations générales sur les conditions dans lesquelles une comptabilité peut être écartée comme non probante, " lorsqu'il existe des motifs précis et sérieux " ; que, toutefois, cette doctrine ne fait pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ;

8. Considérant que, par suite, l'administration pouvait substituer au chiffre d'affaires résultant de la comptabilité de Mme A...un chiffre d'affaires déterminé selon une méthode extracomptable ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour reconstituer les recettes de l'activité de MmeA..., le vérificateur s'est fondé, s'agissant de l'activité d'épicerie, sur les achats reconstitués à partir des informations fournies suite au droit de communication auprès de tiers et sur les coefficients multiplicateurs indiqués lors du débat oral et contradictoire ; que, s'agissant de l'activité de boulangerie, le vérificateur a pris en compte les volumes de farine achetés, les quantités de farine communément admises pour la fabrication des différents pains, les données figurant dans le cahier de fabrication de Mme A...ainsi que les tarifs qu'elle avait elle-même indiqués ; que, pour la pâtisserie, le vérificateur a déterminé le chiffre d'affaires à partir du nombre de produits vendus et des tarifs indiqués par l'intéressée lors du contrôle, ainsi que des quantités de farine communément admises ; qu'enfin, le vérificateur, qui a tenu compte de pertes et d'invendus, a considéré que l'écart entre les achats consommés de farine et le volume reconstitué servait à la fabrication de différents pains au sujet desquels Mme A... n'avait fourni aucune explication ; que, si le chiffre d'affaires reconstitué pour l'année 2007 de l'activité d'épicerie est légèrement inférieur à celui déclaré, cette circonstance s'explique par l'hypothèse retenue de stocks constants, en l'absence d'inventaire, et ne révèle pas une incohérence de la méthode ; que, contrairement à ce que prétend MmeA..., cette méthode, qui repose sur des données propres à son activité et les pratiques habituelles du secteur d'activité, n'est pas radicalement viciée dans son principe ;

10. Considérant que Mme A...soutient que la méthode repose sur des hypothèses erronées ; que l'intéressée, à qui incombe la charge de la preuve, n'établit pas que le taux de perte de 2 % sur la farine pour le florage est insuffisant, alors que celle-ci est également utilisée pour la pâtisserie, ni que le taux d'invendus serait supérieur à 5 %, hypothèse retenue par l'administration ; que, si MmeA..., qui s'était refusée en cours de contrôle à fournir des indications sur ses recettes de fabrication, ainsi qu'il ressort de la proposition de rectification, conteste le volume de farine pris en compte pour différents produits, notamment les pains au chocolat, les chaussons aux pommes et les pains spéciaux, elle n'apporte aucune précision à l'appui de ses allégations ; que, si elle conteste les prix retenus par l'administration pour la vente de certains produits, à savoir les tropéziennes, les pains au son, les pains complets et les baguettes de seigle, il résulte de l'instruction que ces derniers ont été déterminés lors du débat oral et contradictoire, sans que l'intéressée ne fournisse d'explication sur ces contradictions ; que, par ailleurs, elle n'établit pas que la période de 19 jours à partir de laquelle le vérificateur a fondé les éléments retenus pour les ventes de pain ordinaire ne serait pas représentative de l'activité des boulangeries ; que ce dernier a pu déterminer le nombre de pizzas et quiches vendues dans l'année, à partir des données fournies par Mme A... sur les ventes quotidiennes, en tenant compte d'une ouverture des magasins de six jours par semaine ; qu'enfin, si Mme A...fait valoir que la méthode retenue aboutit à un chiffre d'affaires supérieur de 6% en 2006 et de 10% en 2007 au montant total de ses encaissements bancaires, cette seule circonstance ne suffit pas à établir que l'imposition serait exagérée, alors au demeurant que les recettes de l'activité proviennent majoritairement de versements en espèces, qui n'ont pas nécessairement été déposés sur les comptes des requérants ; que, par suite, Mme A... n'établit ni que la méthode retenue était excessivement sommaire ni que l'imposition qui en résulterait serait excessive ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ;

Sur les dépens :

12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser la charge des dépens à MmeA..., partie perdante ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de Mme A...doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2013 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 avril 2013.

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N° 12LY02331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02331
Date de la décision : 16/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-07-04 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Procédure de taxation. Taxation, évaluation ou rectification d'office.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : CESIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-16;12ly02331 ?
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