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28/03/2013 | FRANCE | N°12LY02738

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 28 mars 2013, 12LY02738


Vu 1°) la requête, enregistrée le 5 novembre 2012 sous le n° 12LY02738, présentée pour la commune de Vizille, domiciliée Hôtel de Ville à Vizille (38220), représentée par son maire en exercice ;

La commune de Vizille demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1105679 du 23 octobre 2012 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser une provision de 281 415,94 euros au syndicat intercommunal d'assainissement du Drac inférieur (SIADI) ;

2°) de rejeter la demande de provision du SIADI ;

3°) d

e mettre à la charge du SIADI la somme de 3 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code ...

Vu 1°) la requête, enregistrée le 5 novembre 2012 sous le n° 12LY02738, présentée pour la commune de Vizille, domiciliée Hôtel de Ville à Vizille (38220), représentée par son maire en exercice ;

La commune de Vizille demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1105679 du 23 octobre 2012 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser une provision de 281 415,94 euros au syndicat intercommunal d'assainissement du Drac inférieur (SIADI) ;

2°) de rejeter la demande de provision du SIADI ;

3°) de mettre à la charge du SIADI la somme de 3 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Vizille soutient que :

- le SIADI, qui avait procédé au recouvrement de la créance par état exécutoire, ne pouvait demander une provision au juge administratif, cette demande étant inutile ;

- aucune obligation non contestable n'existe, dès lors qu'elle a régulièrement contesté la créance, ce qui a amené la chambre régionale des comptes et le ministre du budget à considérer que la créance était contestable ;

- en application de l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), une commune ne peut, sauf exceptions, prendre à sa charge le financement d'un service public industriel et commercial (SPIC) ;

- il est constant que la commune de Vizille n'a jamais autorisé par délibération la prise en charge du SPIC assainissement sur le budget communal, ce qui lui interdit de verser une participation au syndicat intercommunal, même si les travaux ont été décidés en 1994, car ce principe était également prescrit par les anciennes dispositions applicables avant 2006 ;

- si le SIADI se prévaut des dispositions de l'article L. 2224-2 du CGCT, il ne démontre pas que les investissements pouvaient être financés sans hausse excessive des tarifs, et le conseil municipal n'a jamais autorisé une telle dépense par délibération motivée fixant les règles de calcul, les modalités de versement et les exercices des dépenses ;

- la délibération autorisant le maire à signer la convention tripartite, par ailleurs illégale, ne satisfait pas à ces exigences, et un accord informel de la commune ne peut pallier l'absence de délibération ;

- elle conteste l'existence et les bases de liquidation de la créance ;

- les communes, qui ont transféré au SIADI la compétence assainissement, ne peuvent plus l'exercer, et le SIADI doit facturer les redevances aux usagers, ce qu'il a fait par délibération du 8 juin 2011 ;

- l'article 7 des statuts du syndicat ne prévoit pas de participation des communes membres aux travaux d'investissement ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2012, par lequel le SIADI, représenté par son président en exercice, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui payer une somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- sa demande de provision est recevable, comme l'a jugé à bon droit le premier juge, car elle porte sur des sommes différentes de celles réclamées par les quatre titres de recettes exécutoires ;

- la créance étant contractuelle, le syndicat peut soit délivrer un titre exécutoire, soit s'adresser au juge ;

- les titres exécutoires se fondent sur la part de contribution de la commune de 87,03 %, telle qu'actée par la convention tripartite de 1994, alors que la demande de provision se fonde sur l'accord de la commune et son courrier du 17 avril 2009 pour financer 42,5 % des travaux ;

- l'objet est différent, les titres exécutoires portant notamment et non exclusivement sur les travaux d'assainissement liés à la traversée de Vizille ;

- la créance est non sérieusement contestable, car les titres exécutoires, qui n'ont fait l'objet d'aucune contestation dans un délai de deux mois, sont définitifs, ainsi que l'a jugé l'ordonnance attaquée ;

- la créance de 576 406,08 euros d'impayés est fondée, et la commune ne conteste pas la réalité des travaux dont elle a bénéficié, et l'avis de la chambre régionale des comptes, qui s'inscrit dans la procédure de prescription d'office de la créance par le préfet, ne rend pas la créance inexigible ;

- le syndicat s'est inscrit dans le cadre de l'article L. 2224-2 du CGCT, l'investissement est important car le budget du syndicat, du fait des impayés de la commune, est en déséquilibre pour 298 845,86 euros, et cela pourrait amener des surtaxes pour ses usagers ;

- il avait à bon droit prévu le financement de l'opération par une contribution des communes, dont la clé de répartition, 87,03 % pour la commune de Vizille, était chiffrée par les services de l'Etat le 28 mars 1996, et approuvée par les communes lors du vote annuel du budget du syndicat ;

- la commune, qui ne conteste ni la réalité des travaux ni l'existence d'un accord pour le financement, conteste en réalité la clé de répartition fixée en 1996, approuvée par délibération du comité syndical du 27 juin 1996 et appliquée ;

- il résulte du courrier de la commune du 17 avril 2009, et de la note de synthèse de la municipalité de décembre 2011, que la commune, en application de l'article 3 de la convention tripartite de 1994, évalue sa participation à 42,5 % du montant des travaux, ce qui correspond à une somme de 281 415,94 euros, part non contestée de la créance pour le projet de traversée de Vizille, et montant de la provision accordée en première instance ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 mars 2013, présenté pour la commune de Vizille, concluant aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu 2°) la requête, enregistrée le 3 décembre 2012 sous le n° 12LY02955, par laquelle la commune de Vizille demande le sursis à l'exécution de l'ordonnance susmentionnée n° 1105679 du 23 octobre 2012 du juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble ;

Elle invoque les mêmes moyens que dans la requête précédente, et soutient en outre que les titres exécutoires 2008-11-37, 2009-28-9, 2010-17-5, et 2011-24-3 ont fait l'objet de recours devant la juridiction administrative, ce qui suspend leur caractère exécutoire, et prive l'ordonnance de fondement ; que l'exécution de l'ordonnance attaquée aura des conséquences difficilement réparables pour le syndicat ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 janvier 2013, par lequel le SIADI conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il invoque les mêmes motifs que dans la requête précédente et soutient, en outre, que sa demande de provision était recevable, la commune n'ayant contesté les titres exécutoires que par des instances tardives, enregistrées les 30 novembre et 3 décembre 2012 ; que l'exécution de l'ordonnance ne comporte aucune conséquence difficilement réparable ;

Vu l'ordonnance dont l'annulation et le sursis à exécution sont demandés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des communes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mars 2013 :

- le rapport de M. Rabaté, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- et les observations de Me Zenou, avocat pour la commune de Vizille et de Me Tissot substituant Me Fiat pour le SIADI ;

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que pour recouvrer, notamment, les contributions qu'il estime lui être dûes au titre du financement des travaux du collecteur des eaux usées reliant le versant de Chamrousse à la station d'épuration d'Aquapole, le syndicat intercommunal d'assainissement du Drac inférieur (SIADI) a émis quatre titres de recettes n° 2008-11-37, 2009-9-28, 2010-5-17 et 2011-3-24, rendus exécutoires respectivement les 29 octobre 2008, 7 septembre 2009, 6 juillet 2010 et 20 avril 2011, à l'encontre de ladite commune de Vizille, pour un montant global de 583 263, 25 euros ; que par ordonnance du 23 octobre 2012, le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a condamné ladite commune à verser au SIADI une provision de 281 415,94 euros ; que par les deux requêtes susvisées, la commune de Vizille demande l'annulation et le sursis à exécution de l'ordonnance susmentionnée du 23 octobre 2012 ; que ces requêtes, dirigées contre la même ordonnance, présentent à juger les mêmes questions, et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;

Sur la recevabilité de la demande de provision :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable " ; qu'aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " (...) 1° En l'absence de contestation, le titre de recettes (...) émis par (...) l'établissement public local permet l'exécution forcée contre le débiteur. / Toutefois, l'introduction devant une juridiction de l'instance ayant pour objet de contester le bien fondé d'une créance assise et liquidée par (...) un établissement public local suspend la force exécutoire du titre (...) 2° L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par (...) un établissement public local pour contester devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire... " ;

3. Considérant que les dispositions précitées de l'article R. 541-1 du code de justice administrative n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre à un établissement public de faire échec au caractère suspensif de l'opposition formée par un débiteur à l'encontre d'un état exécutoire qu'il aurait émis ou d'un acte de poursuite qu'il aurait engagé, en présentant une demande de provision par la voie du référé ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que si la commune de Vizille a contesté ces quatre titres exécutoires devant le tribunal administratif, ces oppositions ont été enregistrées les 30 novembre et 3 décembre 2012, soit plus de deux mois après la notification des titres, laquelle est intervenue au plus tard le 23 décembre 2011, lors de l'instance en référé devant le Tribunal, et après l'expiration du délai prescrit par les dispositions précitées de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, alors que la notification des titres mentionnait les voies et délais de recours ; que la circonstance que la commune ait contesté le caractère obligatoire de la dépense devant la chambre régionale des comptes est sans incidence sur la recevabilité de la demande de provision ; qu'ainsi celle-ci, présentée par le SIADI devant le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble est recevable ; que la circonstance que cette demande soit " inutile " est sans influence, l'utilité n'étant pas une condition d'octroi du référé provision ;

Sur le bien-fondé de la provision :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 322-5 du code des communes, applicable en 1994, et dont les dispositions ont été reprises par l'article L. 2224-2 du code général des collectivités territoriales : " Les budgets des services publics à caractère industriel ou commercial doivent être équilibrés. Il est interdit aux communes de prendre en charge dans leur budget propre des dépenses au titre de ces services publics. Toutefois le conseil municipal peut décider une telle prise en charge lorsque celle-ci est justifiée par l'une des raisons suivantes : (...) 2° Lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d'investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d'usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs... " ; " La décision du conseil municipal fait l'objet, à peine de nullité, d'une délibération motivée. Cette délibération fixe les règles de calcul et les modalités de versement des dépenses du service prises en charge par la commune ainsi que le ou les exercices auxquels elles se rapportent... " ; qu'aux termes du 1er alinéa de l'article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales : " Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par délibération en date du 20 septembre 1994 le conseil municipal de la commune de Vizille a approuvé le projet de collecteur susmentionné, et a autorisé le maire à signer une convention tripartite du même jour, laquelle en son article 3, stipulait que la commune devait financer 47,5 % du montant des travaux ; qu'en 1996 la maitrise d'ouvrage du projet a été transférée au SIADI, dont l'article 9-2 des statuts permettait aux communes membres, dont la commune de Vizille, de participer au cofinancement de travaux ; que le coût des travaux, initialement évalué à 8 300 000 francs hors taxe, ne pouvait être financé sans forte augmentation des tarifs ; que la délibération du 20 septembre 1994, contrairement aux allégations de la requérante, comprenait toutes les mentions prévues par le dernier alinéa précité de l'article L. 322-5 du code des communes alors en vigueur ; que, dès lors, elle ne méconnaissait pas ledit article ; que la commune ne peut utilement invoquer la modification des statuts du syndicat et la suppression de la clause prévue à l'article 9-2, approuvée par délibération du 8 juin 2011, et la circonstance qu'elle n'exerçait plus la compétence d'assainissement, transférée à un syndicat intercommunal ; qu'il est constant que la somme de 281 415,94 euros, montant de la provision accordée, correspond à 47,5 % du coût des travaux de construction du collecteur ; que dans ces conditions, et comme l'a jugé à bon droit le premier juge, l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable à concurrence dudit montant ; que la circonstance que la chambre régionale des comptes de Rhône-Alpes, par avis du 20 avril 2011, ait considéré qu'une somme de 324 456,56 euros, incluant les travaux du collecteur, ne constituait pas une dépense obligatoire pour la commune de Vizille, et que cette position ait été approuvé par le ministre du budget, ne saurait remettre en cause l'appréciation du juge des référés ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vizille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser une provision de 281 415,94 euros au SIADI ;

Sur la demande de sursis à exécution de l'ordonnance :

7. Considérant que la Cour ayant statué sur les conclusions à fins d'annulation de l'ordonnance attaquée, les conclusions à fin de sursis à exécution de cette ordonnance sont devenues sans objet ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu d'y statuer ;

Sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à la condamnation du SIADI, qui n'est pas partie perdante à l'instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la requérante à payer au syndicat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de l'ordonnance attaquée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 3: La commune de Vizille versera au SIADI une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Vizille et au SIADI.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2013, à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mars 2013.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY02738
Date de la décision : 28/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé-provision.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : CABINET ALVAREZ AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-03-28;12ly02738 ?
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