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12/03/2013 | FRANCE | N°12LY01436

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 12 mars 2013, 12LY01436


Vu la décision n° 325738 du 7 mai 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'un montant de 58 180 euros, au titre des pénalités mises en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1995, a annulé l'arrêt n° 04LY01444 de la Cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008, puis a renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon dans la limite des conclusions du recours d'appel du min

istre de l'économie, des finances et de l'industrie sur lesquelle...

Vu la décision n° 325738 du 7 mai 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'un montant de 58 180 euros, au titre des pénalités mises en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1995, a annulé l'arrêt n° 04LY01444 de la Cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008, puis a renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon dans la limite des conclusions du recours d'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur lesquelles il y a lieu de statuer ;

Vu le recours, enregistré le 27 septembre 2004 au greffe de la Cour, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

A titre principal :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0300952 du Tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2004 déchargeant la S.A. Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 1993 au 31 décembre 1996 par l'avis de mise en recouvrement n° 980105080 du 5 mars 1998 à concurrence de 339 077, 41 euros ;

2°) de remettre à la charge de la S.A. Stilson la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges, soit 241 843 euros en principal et 97 234 euros en pénalités dont le paiement a été réclamé à M. A...B...au titre de sa solidarité avec cette société ;

A titre subsidiaire :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0300952 du Tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2004 en ce qu'il a accordé à la S.A. Stilson la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée relative à la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1996, qui avait été mise à sa charge par voie de taxation d'office ;

2°) de remettre à la charge de la S.A. Stilson la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges soit 96 392 euros en principal et 16 145 euros en pénalités, dont le paiement a été réclamé à M. A...B...au titre de sa solidarité avec cette société ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont fait droit au moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mis en recouvrement alors qu'un tel moyen ne pouvait être retenu en vertu de l'article R.*256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue du décret du 20 avril 2000 et des dispositions du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 ; que pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 les dispositions de l'article R.* 256-1-2° du livre des procédures fiscales, qui prévoient que les éléments du calcul qui constituent la créance n'ont pas à être portés à la connaissance du contribuable lorsque ce dernier n'a pas fait la déclaration nécessaire au calcul de ses droits, sont applicables en raison de la situation de taxation d'office de la société en vertu des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'aucun des autres moyens soulevés par M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon n'est fondé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2008, présenté pour M. A... B..., demeurant... ; M. A... B... demande la confirmation du jugement attaqué, le rejet du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et la mise à la charge de l'Etat à son profit de la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que le recours est irrecevable, la société Stilson n'étant ni partie, ni bénéficiaire en première instance et en raison d'une décision de dégrèvement du 12 juillet 2004 d'un montant de 339 077 euros ; que les moyens du recours sont inopérants ;

Vu le mémoire enregistré le 2 décembre 2008, intitulé note en délibéré, présenté pour M. B... tendant aux même fins que le mémoire en défense susvisé par les mêmes moyens et faisant valoir en outre que la requête est irrecevable comme ne comportant aucune demande visant à remettre à la charge de M. B...les impositions dégrevées par l'administration ; qu'aucun titre exécutoire n'a été émis à l'encontre de M. B...lui permettant de connaître le mode de détermination des sommes mises à sa charge ; que la procédure d'imposition d'office est irrégulière ; qu'il n'y a eu aucune fraude mais seulement des difficultés financières qui ont abouti au prononcé de la liquidation judiciaire de la société Stilson ;

Vu l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon n° 10LY02177 du 5 janvier 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 juillet 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, tendant aux mêmes fins que le recours susvisé par les mêmes moyens mais en limitant la remise à la charge de la S.A. Stilson de la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges, à titre principal, à la somme de 241 843 euros en droits et à la somme de 39 055 euros en pénalités et, à titre subsidiaire, à la somme de 96 392 euros en droits et 16 145 euros en pénalités ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2012, présenté pour M. B..., tendant aux mêmes fins que le mémoire en défense susvisé par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que la requête est tardive, les dispositions de l'article R.*200-18 du livre des procédures fiscales étant contraires au principe d'égalité, à l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à l'article 1er du protocole additionnel n° 12 à cette convention, à l'article 14 de cette convention ;

Vu l'arrêt n° 12LY01706 du 16 octobre 2012 par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon a décidé que jusqu'à ce qu'il soit statué sur le recours du ministre de l'économie et des finances, il est sursis à l'exécution du jugement n° 0300952 du 6 juillet 2004 du Tribunal administratif de Lyon en tant que celui-ci a déchargé la société anonyme Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard dont il a été assorti, mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, tendant aux mêmes fins que le recours et le mémoire susvisé par les mêmes moyens et soutenant en outre que le moyen tiré de l'inconventionnalité de l'article R.*200-18 du livre des procédures fiscales est inopérant ; qu'en tout état de cause, il n'est pas fondé, le recours introduit le 2 juillet 2012 ne pouvant qu'être irrecevable en vertu de l'autorité de la chose jugée ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 décembre 2012, présenté pour M. B..., demeurant...), tendant aux mêmes fins que les mémoires susvisés par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que l'administration n'a pas respecté les prévisions du 2° de la doctrine administrative 12 C-1221 du 1er décembre 1984 relative aux mentions des avis de recouvrement ;

Vu l'ordonnance en date du 21 décembre 2012 fixant la clôture d'instruction au 30 janvier 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et son premier protocole additionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 et notamment le B du II de son article 25 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un arrêt de la Cour d'appel de Lyon en date du 29 mai 2002, M. A... B...a été condamné au paiement solidaire des droits et pénalités de taxe sur la valeur ajoutée dus par la S.A. Stilson au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ; que les sommes mises à la charge de M. B...en conséquence de cet arrêt sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts s'élèvent à 1 586 387 francs (241 843,14 euros) en droits et à 637 815 francs (97 234,27 euros) en pénalités, montants restant dus sur les sommes figurant sur l'avis de mise en recouvrement n° 980105080 du 5 mars 1998 adressé à la société redevable ; qu'après avoir vainement contesté ces impositions par une réclamation formée le 4 septembre 2002 devant le directeur des services fiscaux compétent, qui a pris, le 26 décembre 2002, une décision de rejet, M. B... a porté le litige devant le Tribunal administratif de Lyon ; que le ministre a relevé appel du jugement du 6 juillet 2004 par lequel ce Tribunal, motif pris de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement du 5 mars 1998, a déchargé la société Stilson du montant des droits et pénalités dont M. B...était solidairement tenu au paiement ; que, par décision du 7 mai 2012, le Conseil d'Etat, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'un montant de 58 180 euros, au titre des pénalités mises en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1995, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008, puis a renvoyé l'affaire à la Cour dans la limite des conclusions du recours d'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur lesquelles il y a lieu de statuer ; que le ministre demande l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant que celui-ci a déchargé la société anonyme Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ... par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) " ; qu'aux termes de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts ou de l'administration des douanes et droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. / Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre. " ; qu'il résulte des stipulations précitées du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'un juste équilibre doit être ménagé entre les parties au procès, de telle sorte que chacune d'entre elles ait une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que si les dispositions précitées de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales ménagent au ministre chargé du budget un délai d'appel qui peut excéder celui dont le contribuable dispose, en application de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, pour saisir la cour administrative d'appel territorialement compétente d'une requête tendant à l'annulation d'un jugement de tribunal administratif, même lorsque le Tribunal en cause a statué sur des pénalités fiscales ayant le caractère d'accusations en matière pénale, le contribuable conserve néanmoins la faculté, y compris lorsque le ministre a saisi la Cour après l'expiration du délai de deux mois prévu par l'article R. 811-2 du code de justice administrative, outre de présenter des observations en défense, de former un appel incident en vue de contester les pénalités qui étaient en litige devant le Tribunal, quand bien même le ministre ne contesterait que les impositions dont ce Tribunal aurait déchargé le contribuable ; que, par ailleurs, le contribuable est en mesure d'écourter le délai ouvert à l'administration, en application de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales, en signifiant directement au ministre, seul compétent pour faire appel, le jugement dont il a lui -même reçu notification ; que, dans ces conditions, les dispositions de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales ne placent pas le contribuable dans une situation de net désavantage par rapport au ministre chargé du budget et laissent à chaque partie une possibilité raisonnable de contester les pénalités fiscales qui, ayant le caractère d'accusations en matière pénale, seraient en litige ; qu'ainsi, les dispositions de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales doivent être regardées comme compatibles avec le principe de l'égalité des armes découlant des stipulations précitées de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles ne méconnaissent pas davantage le principe d'égalité devant la loi ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ; que, selon l'article 14 de la même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus par la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions publiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. " ;

4. Considérant que si les stipulations combinées des articles précités de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son premier protocole additionnel peuvent être utilement invoquées pour soutenir que la loi fiscale serait à l'origine de discriminations injustifiées entre contribuables, elles sont en revanche sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable ; que, par suite, le moyen invoqué par l'intimé, tiré de ce qu'en vertu des dispositions de l'article R. *200-18 du livre des procédures fiscales, le ministre peut disposer d'un délai d'appel qui peut excéder de deux mois celui dont dispose le contribuable sur le fondement de l'article R. 811-2 du code de justice administrative ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant que M. B...ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article 1er du protocole n° 12 à cette convention, ce protocole n'ayant été ni signé, ni ratifié par la France ;

6. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier de première instance que le jugement du Tribunal administratif de Lyon a été notifié au directeur du contrôle fiscal le 8 juillet 2004 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. B...aurait fait usage de la faculté de notifier le jugement au ministre par voie d'huissier ; que, par suite, le recours enregistré le 27 septembre 2004 a été introduit dans le délai prévu par l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales et n'est pas tardif ;

7. Considérant que la décision de dégrèvement du 22 juillet 2004, dont fait état M.B..., n'est intervenue que pour assurer l'exécution du jugement dont le ministre a entendu ensuite relever appel ; qu'elle ne privait pas d'objet le recours du ministre qui restait recevable à contester un jugement qu'il lui appartenait d'exécuter dès lors qu'il n'en avait pas été décidé autrement par le juge d'appel ;

8. Considérant qu'à raison de la solidarité existant entre M. B...et la société Stilson, M. B... était recevable à contester devant le tribunal administratif l'assiette de la taxe mise au nom de cette société, tout comme le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est recevable à déférer au juge d'appel le jugement déchargeant la société du montant de la taxe réclamée à M. B... ;

9. Considérant que les fins de non-recevoir opposées par M. B...doivent, dès lors, être écartées ;

10. Considérant qu'aux termes du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 : " Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressement effectuées avant le 1er janvier 2000 en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressement " ; qu'aux termes de l'article R.* 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction antérieure au décret du 20 avril 2000 : " L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement... " ; que l'avis de mise en recouvrement adressé le 5 mars 1998 à la S.A. Stilson par la recette des impôts compétente comportait la nature de l'imposition, en l'occurrence la taxe sur la valeur ajoutée, les taux applicables, les articles du code général des impôts fondant l'imposition, le montant des droits, ainsi que le fondement légal des intérêts de retard applicables ; que le montant des droits qui y figurait était bien celui définitivement arrêté dans la réponse aux observations du contribuable ; que, dès lors, en raison de l'entrée en vigueur de l'article 25 précité de la loi de finances rectificative pour 1999, qui a une portée rétroactive, il ne pouvait être fait grief à ce document de renvoyer à une notification de redressements en date du 19 septembre 1997, alors que la notification de redressements dont procédait le rappel contesté avait été en réalité adressée à la société le 19 septembre 1997, ni d'avoir indiqué un montant différent de celui notifié ; que si, en outre, l'avis de mise en recouvrement litigieux mentionnait comme période d'imposition celle du 1er décembre 1993 au 31 décembre 1996, au lieu de celle du 1er juillet 1993 au 31 décembre 1996, cette simple erreur matérielle n'a pu constituer un vice substantiel de la procédure d'imposition ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, pour décharger M. B...du rappel mis au nom de la S.A. Stilson, le Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur la circonstance que le cumul des trois erreurs signalées " ne permettait pas au contribuable de connaître les éléments de calcul des droits et pénalités constituant la créance " du Trésor et sur le fait, qui doit être reconnu inopérant en l'absence d'erreur ou d'omission substantielle dans l'avis de mise en recouvrement, que " l'administration ne contestait pas qu'à l'exception de la période du 1er janvier au 31 décembre 1996, la S.A. Stilson avait déposé les déclarations nécessaires au calcul des droits " ;

11. Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon et devant la Cour ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " sont taxés d'office / ... 3° aux taxe sur le chiffre d'affaire (...) les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevable des taxes ... " ; qu'il résulte de l'instruction que la S.A. Stilson s'est abstenue de déposer les déclarations de chiffre d'affaires qu'elle était tenue de souscrire pour la période du 1er décembre au 31 décembre 1996 ; que si M. B...fait valoir que cette société avait été "mise en sommeil" à compter du 1er décembre 1995 et n'avait plus réalisé d'opérations imposables à partir de cette date, cette circonstance demeure sans incidence sur ses obligations déclaratives dès lors qu'en vertu du c du 2 de l'article 269 du code général des impôts, elle devait, en tant que prestataire de services, déclarer la taxe à l'occasion des encaissements et qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'elle n'ait pas réalisé d'encaissements au cours de la période en litige ; que si M. B... soutient que la société était devenue un assujetti occasionnel, il ne l'établit pas, alors qu'il est constant que l'entreprise était jusqu'au 30 novembre 1995 un assujetti ordinaire et qu'il ne ressort pas de l'instruction que les encaissements postérieurs aient été sans lien avec son activité habituelle ; que, par conséquent il ne peut être reproché au service des impôts de n'avoir pas distingué, au sein de la période vérifiée, deux périodes différentes, ni de ne pas avoir exposé dans la notification de redressements les motifs ayant amené, malgré la prétendue cessation d'activité, à appliquer la procédure de taxation d'office pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 ;

13. Considérant que M.B..., n'établissant nullement "une mise en sommeil" de la société Stilson au 1er décembre 1995, il n'est pas fondé à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine exposée dans la réponse ministérielle Herment (déb sen 27 avril 1989, p. 673, n° 595) selon laquelle la cessation d'activité " n'a pas pour conséquence de soumettre l'ex-redevable de la taxe sur la valeur ajoutée à des obligations déclaratives autres que celles qui incombent aux redevables occasionnels " ;

14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé l'avis de mise en recouvrement en date du 5 mars 1998 au lieu du siège social et principal établissement de la société Stilson, tel qu'il figurait sur le registre du commerce et des sociétés, à savoir " 324/326 rue Francis de Préssencé à Villeurbanne (69100) ", et qu'aucune déclaration modificative n'est ultérieurement intervenue ; que, dans ces conditions, il ne peut être soutenu par M. B...qu'en ne mentionnant que le seul numéro 324 de la rue Francis de Préssensé à Villeurbanne (69100), l'administration aurait notifié à une adresse erronée l'avis de mise en recouvrement à la société Stilson, qui, du reste, ainsi que le souligne le ministre, en a accusé réception ; que si M. B...affirme que la personne qui a signé l'avis de réception du pli contenant l'avis de mise en recouvrement en cause n'était pas habilitée à recevoir un tel courrier, il ne l'établit pas ; que cet avis n'avait pas à être notifié à M. B...personnellement, le rappel de taxe sur la valeur ajoutée en cause n'ayant pas été mis à son nom ;

15. Considérant que si M. B...fait valoir que l'absence de ventilation des rappels par période d'imposition interdit tout recouvrement partiel auprès d'un tiers, ce moyen ne peut qu'être écarté, l'exigence d'une telle mention n'étant prévue par aucune disposition du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales, alors d'ailleurs que la période vérifiée constitue une seule et même période d'imposition ; qu'aucune disposition du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales ne prévoit que les avis de mise en recouvrement doivent comporter les conséquences financières des rehaussements ; que la circonstance que l'avis de mise en recouvrement litigieux n'indiquait pas le montant des intérêts de retard, et se bornait sur ce point à une référence au 2 de l'article 1731 du code général des impôts et à la mention selon laquelle l'intérêt de retard prévu à cet article du code général des impôts serait liquidé après paiement des droits n'est pas de nature à entacher d'irrégularité ce document ;

16. Considérant que M. B...ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les prévisions du 2° de la doctrine administrative 12 C-1221 du 1er décembre 1984 relative aux mentions des avis de recouvrement dès lors que de telles prévisions sont relatives à la procédure d'imposition ;

17. Considérant que si M. B...soutient également qu'aucun titre exécutoire n'a été émis à son nom propre lui permettant de connaître le mode de détermination des sommes mises à sa charge, un tel moyen qui se rattache au contentieux du recouvrement ne peut être utilement invoqué dans la présente instance qui se rattache au contentieux de l'assiette de l'impôt ; que, d'ailleurs, la requête de M. B...tendant à la décharge de son obligation de payer été rejetée par l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon n° 10LY02177 du 5 janvier 2012 ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a déchargé la S.A. Stilson, à hauteur de 241 843 euros en droits et à la somme de 39 055 euros en pénalités, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mises à son nom sous l'avis de mise en recouvrement du 5 mars 1998 et à demander que cette somme, dont le paiement a été réclamé à M. B...au titre de sa responsabilité solidaire, soit remise à la charge de la S.A. Stilson ;

19. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0300952 du 6 juillet 2004 du Tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il a déchargé la S.A. Stilson à hauteur de la somme de 241 843 euros en principal et de 39 055 euros en pénalités, le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis au nom de la S.A. Stilson par l'avis de mise en recouvrement n° 980105080 du 5 mars 1998.

Article 2 : A hauteur de la somme de 241 843 euros en principal et de 39 055 euros en pénalités, le rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis au nom de la S.A. Stilson sous l'avis de mise en recouvrement du 5 mars 1998, et dont le paiement a été réclamé à M. B... au titre de sa responsabilité solidaire, est remis à la charge de la S.A. Stilson.

Article 3 : La demande de M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 19 février 2013 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 mars 2013.

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N° 12LY01436


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01436
Date de la décision : 12/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : SEIGLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-03-12;12ly01436 ?
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