Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2012, présentée pour la commune de Challuy, représentée par son maire en exercice ;
Elle demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101205 du 12 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 1er avril 2011, par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération de Nevers a adopté un taux différent de taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour chacune des communes membres pour l'année 2011 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Nevers une somme de 35 euros au titre des dispositions combinées de l'article 1635 bis Q du code général des impôts et des articles R. 411-2 et R. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Nevers une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le jugement du Tribunal administratif de Dijon du 12 mars 2012 est entaché d'irrégularité, en l'absence de communication du sens des conclusions du rapporteur public, en violation des dispositions de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ; que l'application de l'article 1636 B undecies du code général des impôts est entachée d'erreur de droit, dès lors que dans la mesure où le service rendu étant identique sur tout le territoire communautaire, il ne pouvait y avoir de zonage distinguant les taux de taxe d'enlèvement des ordures ménagères, afin de limiter les hausses de cotisation liées à l'harmonisation du mode de financement du service ; qu'en tout état de cause la mise en oeuvre du lissage des taux entre les communes, en application des dispositions du 2ème alinéa de l'article 1636 B undecies 2) du code général des impôts, implique que le taux de taxe d'enlèvement des ordures ménagères augmente progressivement pour les communes les moins taxées et diminue progressivement pour les communes les plus taxées ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2012, présenté pour la communauté d'agglomération de Nevers, représentée par son président, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation la commune de Challuy à lui verser une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La communauté d'agglomération de Nevers fait valoir que le jugement du Tribunal administratif de Dijon en date du 12 mars 2012 est régulier, l'article R. 711-3 du code de justice administrative ne prescrivant que la communication du sens des conclusions du rapporteur public avant une audience ; qu'elle pouvait édicter des taux différents afin de limiter les hausses des cotisations de certaines communes, comme l'y autorisent les dispositions du 2ème alinéa de l'article 1636 B undecies 2) du code général des impôts, dispositions qui ne sont pas subordonnées à l'existence de zones de perception de la taxe différentes en fonction du service rendu ; qu'enfin les dispositions du 2ème alinéa de l'article 1636 B undecies 2) du code général des impôts n'ont pas nécessairement pour objet ni même pour effet de faire obstacle à toute hausse de cotisation dans les communes qui ont un taux supérieur à la moyenne des communes relevant d'un périmètre d'un même établissement public de coopération intercommunale ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 novembre 2012, présenté pour la commune de Challuy qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance en date du 27 novembre 2012 par laquelle, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, le président de la 3ème chambre de la Cour a fixé la clôture de l'instruction au 27 décembre 2012 ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 février 2013, présentée pour la communauté d'agglomération de Nevers ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2013 :
- le rapport de M. Clément, rapporteur ;
- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;
- et les observations de Me Ciaudo pour la commune de Challuy et de Me Supplisson pour la communauté d'agglomération de Nevers ;
1. Considérant que la commune de Challuy demande à la Cour d'annuler le jugement du 12 mars 2012, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 1er avril 2011, par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération de Nevers a adopté un taux différent de taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour chacune des communes membres pour l'année 2011 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'application Sagace a été renseignée sur le sens des conclusions du rapporteur public sur l'affaire litigieuse une première fois le 1er février 2012 ; que le 7 février 2012, la commune de Challuy a produit un nouveau mémoire, immédiatement communiqué à la communauté d'agglomération de Nevers, laquelle y a répondu par mémoire enregistré le 10 février 2012 ; que si l'application Sagace a été une nouvelle fois renseignée sur les conclusions du rapporteur public le 15 février 2012, aucune des pièces visées au dossier ne permet d'établir l'heure de cette nouvelle mise en ligne, alors que la commune de Challuy se plaint de n'avoir obtenu aucune réponse à sa demande de communication du sens des conclusions du rapporteur public adressée par télécopie au greffe du Tribunal le 15 février 2012 à 11 h 33 ; que compte tenu de ces éléments, la commune de Challuy ne peut être regardée comme ayant été valablement mise en mesure de connaître le sens des conclusions du rapporteur public avant l'audience qui s'est tenue le 16 février 2012 à 9 h 00 ; que par suite, elle est fondée à soutenir que le jugement attaqué a été rendu au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions précitées du code de justice administrative et doit, dès lors, être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la commune de Challuy devant le Tribunal administratif de Dijon ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1636 B undecies du code général des impôts : " 1. Les communes et leurs établissements publics de coopération intercommunale ayant institué la taxe d'enlèvement des ordures ménagères conformément aux articles 1379-0 bis, 1520 et 1609 quater votent le taux de cette taxe dans les conditions fixées à l'article 1639 A. / 2. Ils peuvent définir, dans les conditions prévues au 1 du II de l'article 1639 A bis, des zones de perception de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur lesquelles ils votent des taux différents en vue de proportionner le montant de la taxe à l'importance du service rendu apprécié en fonction des conditions de réalisation du service et de son coût. Les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale sur le territoire desquels est située une installation de transfert ou d'élimination des déchets prévue par un plan départemental d'élimination des déchets ménagers peuvent également définir une zone, d'un rayon d'un kilomètre au maximum, sur laquelle ils votent un taux différent ; dans ce cas, la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale ne peut définir sur ce périmètre des zones en fonction de l'importance du service rendu. Toutefois, à titre dérogatoire, l'établissement public de coopération intercommunale ayant institué la taxe peut, pour une période qui ne peut excéder dix ans, voter des taux différents sur son périmètre, afin de limiter les hausses de cotisations liées à l'harmonisation du mode de financement. Cette dérogation peut également être mise en oeuvre en cas de rattachement d'une ou plusieurs communes (...) " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier, et notamment de la délibération attaquée ainsi que du rapport de la Chambre régionale des comptes du 21 septembre 2010, que la communauté d'agglomération de Nevers a défini des zones de perception de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères sur la base des onze territoires communaux qui la constituent et qu'elle a appliqué à ces territoires des taux de taxe différents ; que selon le rapport de la Chambre régionale des comptes, ces territoires ne correspondent pas à des différences de services rendus, les conditions de collecte étant uniformisées ; qu'en tout état de cause, la délibération attaquée ne prévoit pas l'application du mécanisme de lissage prévu à l'article 1636 B undecies précité ; que par suite, la délibération prévoyant des taux différents pour les communes composant la communauté d'agglomération de Nevers sans que ces taux correspondent à des différences de services rendus ou de coûts, est illégale ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Challuy est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération en date du 1er avril 2011, par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération de Nevers a adopté un taux différent de taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour chacune des communes membres pour l'année 2011 ; que par suite, il y a lieu d'annuler cette délibération ;
Sur les dépens :
8. Considérant qu'aux termes de l'article 1635 bis Q du code général des impôts : " I. Par dérogation aux articles 1089 A et 1089 B, une contribution pour l'aide juridique de 35 € est perçue par instance introduite en matière civile, commerciale, prud'homale, sociale ou rurale devant une juridiction judiciaire ou par instance introduite devant une juridiction administrative. II. La contribution pour l'aide juridique est exigible lors de l'introduction de l'instance. Elle est due par la partie qui introduit une instance (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative dans sa rédaction issue du décret n° 2011-1202 du 28 septembre 2011 : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts, ainsi que les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat./ Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties./L'Etat peut être condamné aux dépens " ;
9. Considérant qu'il y a lieu de mettre les dépens à la charge de la communauté d'agglomération de Nevers, partie perdante ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Challuy, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à la communauté d'agglomération de Nevers une quelconque somme à ce titre ;
11. Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Nevers la somme de 1 000 euros à ce titre ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1101205 du 12 mars 2012 du Tribunal administratif de Dijon est annulé.
Article 2 : La délibération en date du 1er avril 2011, par laquelle le conseil de la communauté d'agglomération de Nevers a adopté un taux différent de taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour chacune des communes membres pour l'année 2011 est annulée.
Article 3: Les dépens, d'un montant de 35 euros, sont mis à la charge de la communauté d'agglomération de Nevers.
Article 4 : La communauté d'agglomération de Nevers versera à la commune de Challuy une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la communauté d'agglomération de Nevers présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Challuy, à la communauté d'agglomération de Nevers et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.
Délibéré après l'audience du 31 janvier 2013, à laquelle siégeaient :
M. Tallec, président de chambre,
M. Rabaté, président-assesseur,
M. Clément, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 février 2013.
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N° 12LY01341
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