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12/02/2013 | FRANCE | N°12LY01400

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 12 février 2013, 12LY01400


Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. A... B..., domicilié ... à Chagny (71150) ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200236 du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 janvier 2012 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêt

;

3°) de faire injonction au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour...

Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. A... B..., domicilié ... à Chagny (71150) ;

M. B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200236 du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 janvier 2012 par lequel le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté ;

3°) de faire injonction au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour provisoire l'autorisant à travailler dans l'attente du réexamen de sa situation ;

Il soutient que les décisions lui refusant un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et un titre de séjour mention " salarié " sont entachées d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ; que le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le fait que ce soit le requérant et non l'employeur qui ait déposé la demande de titre de séjour " salarié " ne constitue pas une cause de rejet puisque le requérant vit en France depuis 2007 ; que le préfet aurait dû demander l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), ce qu'il n'a pas fait ; que le préfet aurait dû prendre en compte les spécificités requises pour le poste de travail ; que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale en ce qu'elle se fonde sur un refus de séjour illégal ; que la décision fixant le pays de destination est illégale en ce qu'elle se fonde sur un refus de séjour et une obligation de quitter le territoire français illégaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2012, présenté par le préfet de Saône-et-Loire, qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que la requête est irrecevable comme non motivée ;

Vu la lettre en date du 22 novembre 2012 adressée aux parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire enregistré le 3 décembre 2012, présenté pour M. B...tendant aux mêmes fins que la requête susvisée par les mêmes moyens ; il soutient en outre que l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui est pas applicable ;

Vu le mémoire enregistré le 4 décembre 2012, présenté par le préfet de Saône-et-Loire, qui conclut aux mêmes fins que le mémoire en défense susvisé par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain sont équivalentes aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et peuvent leur être substituées ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne fait pas obstacle à l'exercice du pouvoir discrétionnaire de régularisation ;

Vu le mémoire enregistré le 13 décembre 2012, présenté par le préfet de Saône-et-Loire, qui conclut aux mêmes fins que les mémoires susvisés par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que le requérant a fait obstruction à la mesure d'éloignement prise à son encontre ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) en date du 12 juin 2012 refusant le bénéfice de l'aide juridictionnelle à M.B... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu l'arrêté du 11 août 2011 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que M. B..., ressortissant marocain, né en 1974, est entré régulièrement en France en mars 2007 ; que, le 18 mai 2007, il a épousé une ressortissante française ; que, titulaire d'un visa long séjour, il a, à trois reprises, obtenu une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français ; que, le 22 décembre 2010, il a demandé une carte de résident, mais a modifié sa demande le 3 mars 2011, en vue de se voir délivrer une carte de séjour temporaire mention " salarié " ; que, par arrêté en date du 20 mai 2011, le préfet de Saône-et-Loire a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et fixé le pays dont il a la nationalité ou tout pays pour lequel il établit être légalement admissible comme pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ; que le requérant a interjeté appel du jugement du 4 août 2011 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ; que, par un arrêt du 26 avril 2012, la Cour administrative d'appel de Lyon a rejeté cet appel ; que, saisi d'une demande de titre de séjour formée le 25 août 2011, le préfet de Saône-et-Loire a, par un arrêté du 3 janvier 2012, de nouveau refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. B...fait appel du jugement du 24 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation de la requête d'appel ;

Sur la carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " :

2. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a pas fondé sa demande de titre de séjour sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, contrairement à ce qu'il persiste à soutenir en appel, le préfet de Saône-et-Loire n'était pas tenu d'examiner sa demande de titre de séjour sur ce fondement et ne l'a pas fait ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu l'étendue de ses obligations en n'examinant pas sa demande sur un tel fondement et ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions ;

Sur le refus de séjour en qualité de salarié :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention "salarié " éventuellement assorti de restrictions géographiques ou professionnelles. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) " ; que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants marocains un titre de séjour en qualité de salarié et font dès lors obstacle à l'application à ces mêmes ressortissants des dispositions précitées des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'une carte de séjour " salarié " ; que, dès lors, si M. B...ne peut utilement faire valoir " qu'il justifiait de motifs exceptionnels permettant la délivrance d'un titre de séjour " salarié " " en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Saône-et-Loire ne pouvait davantage légalement fonder un refus de titre de séjour en qualité de salarié sur les dispositions de l'article L. 313-10 du même code ;

5. Considérant que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

6. Considérant que le préfet de Saône-et-Loire doit être regardé comme demandant, par un mémoire enregistré le 4 décembre 2012, que les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-marocain susvisé soient substituées aux dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision contestée aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement de ces stipulations ; qu'il y a lieu de procéder à cette substitution de base légale qui ne prive M. B... d'aucune garantie ;

7. Considérant que les stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain, qui subordonnent l'octroi d'un titre de séjour mention " salarié " à la présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes n'ont ni pour objet ni pour effet d'exclure l'application des dispositions du code du travail relatives à l'emploi d'un salarié étranger ;

8. Considérant qu'il ne résulte, ni des stipulations de l'accord franco-marocain, ni des dispositions du code du travail que le préfet serait tenu de consulter la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi avant de statuer sur une demande de titre de séjour mention " salarié " ;

9. Considérant qu'en rejetant la demande de titre de séjour salarié formée par M. B... pour un emploi d'agent de sécurité ne présentant aucune spécificité, au motif que le métier d'agent de prévention et de sécurité ne figure pas sur la liste des métiers caractérisés par des difficultés de recrutements annexé à l'arrêté du 11 août 2011 susvisé pris en application de l'article R. 5221-21 du code du travail, que l'entreprise n'a pas fourni la preuve de sa recherche infructueuse de candidats sur le marché du travail et qu'en tout état de cause le demandeur ne présentait ni contrat de travail visé en application de l'article L. 5221-2 du code du travail, ni demande d'autorisation de travail formée par l'employeur en application de l'article R. 5221-11 du même code, le préfet de Saône-et-Loire n'a commis ni erreur de droit, ni erreur d'appréciation ;

Sur le refus de régularisation :

10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré régulièrement en France le 3 mai 2007 et y a épousé une ressortissante française ; qu'après s'être vu opposer un refus de titre de séjour en cette qualité au motif qu'il était dépourvu de visa de long séjour, il est retourné au Maroc pour obtenir ce visa ; qu'après l'avoir obtenu, il est revenu en France le 24 octobre 2007 avec un visa de longue durée ; qu'il a ensuite obtenu une carte de séjour temporaire en qualité de conjoint de français renouvelée à deux reprises ; qu'après que la vie commune eut été rompue du fait de son épouse, son titre de séjour n'a pas été renouvelé ; qu'un changement de statut lui a été refusé par les décisions susmentionnées puis par les décisions attaquées dans la présente affaire ; que si M. B...a développé en France, où il séjourne depuis plus de cinq ans à la date de la décision attaquée, des liens personnels et professionnels et une vie privée, il est sans enfant et non dépourvu de toute attache avec le Maroc ; qu'eu égard aux conditions du séjour de M. B...depuis la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet, le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant de régulariser sa situation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

11. Considérant que pour les motifs ci-dessus énoncés le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire serait fondée sur un refus de séjour illégal ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que pour les motifs énoncés ci-dessus le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait fondée sur un refus de séjour et une obligation de quitter le territoire français illégaux ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 22 janvier 2013 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 février 2013.

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N° 12LY01400

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01400
Date de la décision : 12/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : FYOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-02-12;12ly01400 ?
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