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29/01/2013 | FRANCE | N°12LY01922

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2013, 12LY01922


Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. C... B..., domicilié...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201618, du 6 juin 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 9 février 2012, lui refusant le renouvellement d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de po

uvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivr...

Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 2012 au greffe de la Cour, présentée pour M. C... B..., domicilié...;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201618, du 6 juin 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 9 février 2012, lui refusant le renouvellement d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision lui refusant le renouvellement d'un titre de séjour est insuffisamment motivée ; qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français viole les stipulations du b et du c de l'article 5 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; que les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays de sa destination sont illégales du fait de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ; que la décision fixant le délai de départ volontaire méconnaît les stipulations de l'article 7-2 de la directive 2008/115/CE ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2012, présenté par le préfet du Rhône ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés ;

Vu la décision du 20 août 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :

- le rapport de Reynoird, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

- et les observations de MeD..., avocate de M.B... ;

Sur la légalité de la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ;

2. Considérant que la décision contestée vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, notamment, le 4° de l'article L. 313-11 dudit code ; qu'elle mentionne qu'en raison de la rupture de sa communauté de vie avec son épouse, de nationalité française, l'intéressé ne peut pas prétendre au renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français ; qu'elle mentionne également que M. B...n'est pas démuni d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a toujours vécu jusqu'à son entrée récente en France ; que si l'intéressé se prévaut de l'absence d'indication dans la décision litigieuse de ce qu'il est le père d'un enfant né en France le 13 décembre 2011, il n'établit pas, en se bornant à produire une copie du titre d'identité républicain de l'enfant, délivré par le préfet du Rhône le 17 février 2012, soit postérieurement à la date de la décision contestée, que cette information avait été portée à cette même date à la connaissance de ce préfet ; que, dès lors, la décision contestée énonce clairement les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 3 de la loi de 1979 susvisée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que M.B..., ressortissant marocain né le 4 octobre 1983, est entré en France le 14 juillet 2009 muni d'un passeport revêtu d'un visa long séjour en qualité de conjoint de français ; qu'il a bénéficié d'un visa long séjour valant titre de séjour mention " conjoint de français " valable du 13 juillet 2009 au 13 juillet 2010 ; que le préfet du Rhône lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour en raison de la rupture de la vie commune avec son épouse, dont cette dernière l'avait informée par courrier du 21 juillet 2009 ; que M. B...se prévaut de sa relation de couple avec une ressortissante algérienne, titulaire d'un certificat de résidence algérien, avec laquelle il a eu un enfant, né le 13 décembre 2011, et dont il s'occuperait, notamment en raison de l'état de santé de sa concubine nécessitant des hospitalisations périodiques ; qu'en outre, l'intéressé soutient que sa cellule familiale ne peut pas se reconstituer en dehors du territoire français compte tenu de la différence de nationalité entre lui-même et sa concubine ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M.B..., séjournant en France depuis moins de trois ans à la date de la décision contestée, n'établit pas l'ancienneté, la stabilité et l'intensité de son concubinage à la date de la décision contestée dès lors qu'il ressort de ses propres indications retranscrites sur l'acte de naissance de son enfant qu'à la date du 16 décembre 2011, il résidait à une adresse différente de celle de sa concubine ; que, par ailleurs, les certificats médicaux, dont il ressort que l'intéressé a soutenu la mère de son enfant durant son accouchement, ainsi que les attestations de tiers, tous postérieurs à la décision contestée, sont insuffisants pour corroborer tant la réalité que, le cas échéant, le caractère indispensable de l'assistance que M. B...apporterait à sa concubine en raison de son état de santé ; qu'enfin, M. B...n'établit pas l'ancienneté, l'intensité et la stabilité des liens privés et familiaux noués en France alors qu'il ressort de ses propres dires qu'il n'est pas dépourvu d'attaches de cette nature dans son pays d'origine où il n'établit pas être dans l'impossibilité de reconstituer sa vie familiale en se bornant à avancer la circonstance que sa concubine n'en est pas ressortissante ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée de séjour du requérant en France, et nonobstant ses efforts d'intégration professionnelle, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a pas, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant, enfin, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

6. Considérant que M. B...ne peut pas utilement se prévaloir de la circonstance que l'exécution de la décision litigieuse aurait pour effet de séparer son enfant de l'un de ses parents en raison de leurs nationalités différentes dès lors qu'une décision de cette nature n'a ni pour objet ni pour effet d'obliger son destinataire à quitter le territoire français ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que M. B...n'établit ni sa contribution à l'entretien et à l'éducation de son enfant, ni son impossibilité de reconstituer sa vie familiale en dehors du territoire français, notamment dans son pays d'origine ou dans celui de sa compagne ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, le préfet du Rhône a méconnu les stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., de nationalité marocaine, s'est vu refuser le renouvellement d'un titre de séjour par décision du 9 février 2012 ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 9 février 2012, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de renouvellement de titre de séjour, le moyen tiré, par la voie de l'exception d'illégalité, de ce que la décision litigieuse portant obligation de quitter le territoire français est illégale, en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour sur laquelle elle se fonde, doit être écarté ;

10. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la directive 2008/115/CE : " Lorsqu'ils mettent en oeuvre la présente directive, les Etats membres tiennent dûment compte : (...) b) de la vie familiale, c) de l'état de santé du ressortissant concerné d'un pays tiers (...) " ; que M. B...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 5 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, laquelle a été transposée en droit français par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

Sur la légalité de la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE : " (...) 2. Si nécessaire, les Etats prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telle que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux " ; que M. B... ne peut utilement invoquer les stipulations du 2. de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, qui ont été transposées en droit français par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 ;

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

12. Considérant que le moyen tiré, par voie d'exception d'illégalité, de ce que la décision fixant le pays de destination est illégale, en conséquence de l'illégalité des décisions refusant le renouvellement d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français sur lesquelles elle se fonde, doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2013 à laquelle siégeaient :

MmeA..., présidente,

M. Reynoird, premier conseiller,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 janvier 2013.

Le rapporteur,

C. REYNOIRDLa présidente,

J. A...

Le greffier,

F. PROUTEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

Le greffier,

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N° 12LY01922

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01922
Date de la décision : 29/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEAR
Rapporteur ?: M. Claude REYNOIRD
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-01-29;12ly01922 ?
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