Vu la requête, enregistrée le 16 février 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme D...B..., domiciliée...,;
Mme B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1105777 du 23 janvier 2012, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juin 2011 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ;
2°) d'annuler l'arrêté susmentionné ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
Elle soutient :
- que les dispositions de l'article L. 313-11-11° et de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues, dès lors qu'elle présente un syndrome anxio-dépressif depuis 1994 ; qu'elle ne pourrait pas suivre un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'elle peut se prévaloir de circonstances humanitaires exceptionnelles ;
- que son concubin, père de ses deux enfants, présente également un état dépressif important, bénéficie d'une autorisation provisoire de séjour et a contesté le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;
- que la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en France et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car elle est de nature à porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- que les dispositions de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme ont été méconnues car ayant fait l'objet d'une menace de mort, elle ne peut envisager sans crainte sérieuse un retour dans son pays d'origine ;
Vu les pièces dont il résulte que la requête de Mme B...a été communiquée au préfet de la Haute-Savoie qui n'a pas produit de mémoire en défense ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) près le Tribunal de grande instance de Lyon, en date du 8 mars 2012, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
1. Considérant que MmeB..., ressortissante kosovare née le 20 août 1979, est entrée irrégulièrement en France selon ses déclarations le 12 août 2009 pour rejoindre son concubin, père de ses deux enfants, qu'elle a sollicité le statut de réfugié qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 22 décembre 2009, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 1er avril 2011 ; qu'elle a, également sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 7 juin 2011, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ; que Mme B...relève appel du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 23 janvier 2012 qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 7 juin 2011 ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...souffre d'un syndrome anxio-dépressif depuis février 1994 ; que le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué, dans son avis du 13 octobre 2010, que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier des certificats médicaux produits, qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un accès effectif aux soins appropriés à sa pathologie au Kosovo, pays dans lequel elle a séjourné durant quinze ans alors qu'elle souffrait de la même pathologie ; qu'elle ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que le médecin de l'agence régionale de santé a émis pour son concubin M. C...qui souffre également d'un état dépressif, des avis concluant à l'absence de traitement approprié pour sa pathologie dans son pays d'origine ; que si Mme B...fait valoir qu'elle est en droit de se prévaloir de circonstances humanitaires exceptionnelles, de telles circonstances sont, en tout état de cause, sans incidence sur les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Savoie a méconnu les dispositions des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...fait valoir que son concubin et père de ses deux enfants bénéficie d'une autorisation provisoire de séjour et qu'il a contesté le refus de séjour qui lui a été opposé par arrêté du 12 janvier 2012, alors que le médecin de l'agence régionale de santé avait estimé que l'interruption des soins pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait suivre un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, toutefois, l'introduction d'une requête devant le tribunal administratif n'a pas de caractère suspensif ; que son concubin bénéficiait d'une simple autorisation provisoire de séjour ; que Mme B...n'allègue ni n'établit que sa présence serait, en tout état de cause, nécessaire auprès de son concubin ; qu'il est constant que Mme B...n'était présente en France que depuis un an et dix mois à la date de l'arrêté attaqué, qu'elle n'est pas dépourvue de tous liens familiaux dans son pays d'origine où résident son père, son frère et l'une de ses soeurs et où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente ans ; que sa cellule familiale peut se reconstituer dans leur pays d'origine ; qu'en outre, la circonstance que ses enfants soient scolarisés et bien intégrés ne saurait, par elle-même, suffire à établir que le préfet de la Haute-Savoie a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en refusant son admission au séjour ; que, dès lors, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, en troisième lieu, que si Mme B...allègue qu'elle ne peut retourner au Kosovo compte tenu des menaces de mort qui pèsent sur elle en raison de la convocation de son mari en qualité de témoin au Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant dès lors que l'arrêté du 7 juin 2011 ne fixe pas de pays de destination ;
6. Considérant que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2013 à laquelle siégeaient :
MmeA..., présidente,
M. Reynoird, premier conseiller,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 janvier 2013.
Le rapporteur,
V. CHEVALIER-AUBERTLa présidente,
J. A...
Le greffier,
F. PROUTEAU La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 12LY00478
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