Vu la requête, enregistrée le 10 février 2012 au greffe de la Cour, présentée pour Mme C... A...et M. D...B...domiciliés à La Relève 8 rue de l'Octant à Echirolles (38130) ;
Mme A...et M. B...demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 11004066-1104070 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés, en date du 25 mars 2011, par lesquels le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler les arrêtés susmentionnés ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation dans un délai d'un mois et, dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de l'arrêt à intervenir et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 050 euros à verser à leur conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 moyennant renonciation de celui-ci à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;
Ils soutiennent :
- que le préfet a commis une erreur de droit en refusant de leur délivrer un titre de séjour en l'absence de présentation de demandes de titres de séjour ; que le préfet s'était déjà prononcé sur leurs demandes d'admission au séjour ; que le Conseil d'Etat doit être saisi pour trancher la question en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;
- que les décisions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 33 paragraphe 1 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et les dispositions des articles L. 513-2 et L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- que le préfet ne pouvait leur refuser un titre de séjour ni les éloigner du territoire français dès lors qu'il n'avait pas encore été statué sur leurs demandes ; qu'ils doivent pouvoir être entendus devant la Cour nationale du droit d'asile ;
- que l'obligation de quitter le territoire méconnaît le principe constitutionnel du droit d'asile ; qu'ils sont privés de recours effectif contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- que les décisions fixant le pays de destination méconnaissent l'article 13 combiné à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ces décisions sont également entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2012, du préfet de l'Isère ; il conclut au rejet de la requête et demande à la Cour administrative d'appel de se reporter à son mémoire de première instance ;
Vu les décisions du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) près le Tribunal de grande instance de Lyon, en date du 26 décembre 2011, admettant M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et rejetant la demande de Mme A... ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;
1. Considérant que M. B...et MmeA..., ressortissants macédoniens, nés respectivement le 2 juillet 1963 et le 3 juillet 1967, font appel du jugement nos 1104066-1104070 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère, en date du 25 mars 2011, leur refusant un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de leur renvoi ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code ainsi qu'à son conjoint et à ses enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du même code : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, la reconnaissance du statut de réfugié impliquant la délivrance immédiate d'une carte de résident, le préfet doit être regardé comme saisi d'une demande de carte de résident en même temps que l'étranger sollicite son admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que lorsque l'étranger n'a pas été admis en France en qualité de demandeur d'asile, le préfet peut se prononcer sur le droit au séjour d'un demandeur d'asile ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...et Mme A..., ont déclaré être entrés en France, le 5 décembre 2010 ; que, par décisions du 16 décembre 2010, le préfet de l'Isère a refusé de délivrer à M. B...et à Mme A... des autorisations provisoires de séjour et les a informés que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statuera par la procédure prioritaire sur leurs demandes en application des dispositions de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ces décisions ne constituent pas une réponse à leurs demandes d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que, dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit, en prenant suite au rejet de leurs demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 21 février 2011, des décisions de refus de titre de séjour, le 25 mars 2011, alors même qu'ils n'avaient pas présenté d'autres demandes de titre de séjour que celles présentées au titre de l'asile ;
4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. " ; que l'article L. 513-2 du même code dispose que : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 742-6 dudit code : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) " ;
5. Considérant, que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, si ce droit implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui autorisent le maintien sur le sol national d'un demandeur d'asile jusqu'à ce que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ait statué sur sa demande après un examen individuel de celle-ci, ne méconnaissent pas dès lors le principe de non refoulement posé par le 1° de l'article 33 de la convention relative aux réfugiés, aux termes duquel : " aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques " ; que les demandes des époux A...et B...ressortissants d'un pays d'origine sûr, ont été examinées dans le cadre de la procédure prioritaire, ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorisaient le préfet à statuer sur leur droit au séjour et à décider de leur éloignement forcé avant que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur leurs recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que M. B...et Mme A...peuvent faire valoir leurs droits dans la procédure écrite et se faire représenter devant la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, ni l'article 33 de la convention relative aux réfugiés, ni les articles L. 513-2 et L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni le principe constitutionnel du droit d'asile n'ont été méconnus ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles " ; qu'aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; que M. B... et Mme A...font valoir qu'ils ont quitté leur pays d'origine en raison des graves persécutions dont ils ont fait l'objet en raison de leur appartenance à la communauté rom ; que toutefois, les requérants, dont les demandes tendant à ce que leur soit reconnue la qualité de réfugié ont été rejetées, n'apportent aucun élément probant à même d'établir qu'ils encourraient des risques personnels et réels pour leur sécurité en cas de retour en Macédoine ; que le droit à un recours effectif n'implique pas que l'étranger qui fait l'objet de la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dispose du droit de contester la décision de rejet qui lui est opposée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile, puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant cette juridiction ; qu'au demeurant, les requérants sont à même de faire valoir utilement l'ensemble de leurs arguments dans le cadre d'une procédure écrite et de se faire représenter à l'audience par un conseil ou par toute autre personne ; que, par suite, les stipulations des articles 13 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues et les décisions litigieuses ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir le Conseil d'Etat d'une demande d'avis, que M. B...et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions à fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et Mme C...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2013 à laquelle siégeaient :
Mme Mear, présidente,
M. Reynoird, premier conseiller,
Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 janvier 2013.
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N° 12LY00449
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