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13/12/2012 | FRANCE | N°12LY00735

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 13 décembre 2012, 12LY00735


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2012, présentée pour la société Réalisations France Industries (RFI), représentée par la SELARL MJ Synergie, dont le siège est 9 place Georges Clémenceau à Roanne (42300), prise en la personne de Me Chretien, mandataire judiciaire ; la société RFI demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1106175 du 24 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté le recours du directeur départemental des finances publiques de la Loire tendant à l'interprétation des contrats qu'elle avait conclus avec l'Etat ;
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Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2012, présentée pour la société Réalisations France Industries (RFI), représentée par la SELARL MJ Synergie, dont le siège est 9 place Georges Clémenceau à Roanne (42300), prise en la personne de Me Chretien, mandataire judiciaire ; la société RFI demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1106175 du 24 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté le recours du directeur départemental des finances publiques de la Loire tendant à l'interprétation des contrats qu'elle avait conclus avec l'Etat ;

2°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'appel interjeté contre le jugement du juge commissaire du 30 août 2011 ;

3°) subsidiairement, de retenir la qualification de subventions pour les contrats litigieux ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ;

Elle soutient :

- qu'il y a litispendance ; qu'il convient de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article 378 du code de procédure civile, dans l'attente de l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, saisie de la décision du juge commissaire et dans l'attente du recours pour excès de pouvoir formé à l'encontre des prétendus titres exécutoires dont se prévaut l'administration ;

- que les titres de recette émis, après la liquidation judiciaire, sont dépourvus de caractère exécutoire, et sont irréguliers, car ils n'ont pas été notifiés au mandataire liquidateur, ne précisent pas les voies et délais de recours et ne mentionnent pas les bases de liquidation ; que le délai de réclamation n'a pas commencé à courir ;

- que les contrats, présentés comme relatifs à des prêts participatifs, ont en réalité la nature de subventions ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2012, présenté par le directeur départemental des finances publiques de la Loire, qui conclut, à titre principal, au rejet de la requête, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon, et demande, à titre subsidiaire à la Cour, de juger que l'administration a pu émettre les titres exécutoires et que les fonds alloués à l'entreprise RFI sont constitutifs de prêts bancaires et non de subventions ;

Il soutient :

- à titre principal, que l'appel de la société RFI est irrecevable, à défaut d'intérêt pour agir ;

- à titre subsidiaire, qu'il n'y a pas litispendance ;

- que le titre exécutoire ne fait pas encore l'objet d'un recours contentieux ;

- que les moyens contestant la légalité des titres exécutoires, tirés du défaut de déclaration provisionnelle de créance et du défaut d'admission au passif sont inopérants devant le juge administratif ; qu'il appartient à l'ordonnateur de justifier de la régularité des titres, s'agissant des autres vices allégués ;

- que les contrats doivent être qualifiés de prêts ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juin 2012, présenté pour la société RFI, qui renonce à demander qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour d'appel de Lyon ait statué, et maintient le surplus de ses conclusions ;

Elle fait valoir qu'elle justifie d'un intérêt pour contester le jugement attaqué, qui ne lui donne pas entière satisfaction et lui fait grief ;

Vu l'ordonnance en date du 10 juillet 2012 par laquelle le magistrat rapporteur délégué a, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, prononcé la clôture de l'instruction au 10 août 2012 ;

Vu les mémoires, enregistrés les 26 et 31 juillet 2012, par lequel le directeur général des finances publiques de la Loire conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code monétaire et financier, et notamment ses articles L. 313-13 à L. 313-20, ensemble la loi n° 78-741 du 13 juillet 1978, modifiée, relative à l'orientation de l'épargne vers le financement des entreprises ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

- les observations de Me Perret, représentant la société RFI ;

1. Considérant que, par un jugement du 20 mars 2009, le Tribunal de commerce de Roanne a ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la société Réalisations France Industries (RFI) ; que le trésorier payeur général de la Loire a adressé le 19 mai 2009 une déclaration de créances au mandataire liquidateur, pour un montant de 15 905 046, 44 euros, au titre des sommes qu'il estimait demeurer dues à l'Etat par cette société en exécution de contrats de prêt ; que, le 30 décembre 2009, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a émis deux titres de perception à l'encontre de la SA RFI, sur ce fondement ; que le trésorier-payeur général de la Loire, chargé du recouvrement de ces titres de perception a, par courrier du 5 janvier 2010, confirmé la déclaration de créance ; que, par ordonnance en date du 30 août 2011, le juge commissaire du Tribunal de commerce de Roanne, estimant qu'un litige opposait l'Etat à la SA RFI sur la nature juridique des contrats conclus et, dès lors, sur l'étendue de leurs obligations contractuelles, a décliné sa compétence pour statuer sur l'admissibilité de ces créances ; que le directeur départemental des finances publiques de la Loire a saisi le Tribunal administratif de Lyon d'une requête tendant à l'interprétation des contrats litigieux, afin de confirmer qu'il s'agissait de prêts participatifs, et non de subventions comme l'avait soutenu la SA RFI devant le juge commissaire ; que, par jugement du 24 janvier 2012, attaqué par la SA RFI, le Tribunal a rejeté ce recours en interprétation ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le directeur départemental des finances publiques de la Loire :

2. Considérant que le jugement du 24 janvier 2012, par lequel le Tribunal a rejeté le recours en interprétation formé par l'administration, a implicitement mais nécessairement, refusé également d'interpréter les contrats en cause dans le sens demandé par la société RFI ; qu'il lui fait donc grief ; qu'elle est par suite, recevable à en relever appel ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que le juge administratif peut être saisi d'un recours direct tendant à l'interprétation d'un acte administratif, notamment un contrat administratif, dès lors que la question d'interprétation posée se rattache à un litige né et actuel, relevant de sa compétence et dont la résolution est subordonnée à l'interprétation demandée ;

4. Considérant que les premiers juges ont rejeté la demande d'interprétation de l'Etat comme irrecevable, au motif que l'interprétation des contrats n'était pas nécessaire à la résolution du litige, dès lors que le recouvrement de la créance avait été engagé par l'Etat du fait de l'émission de titres exécutoires, non contestés ;

5. Considérant cependant que la circonstance que des titres exécutoires avaient été émis ne suffisait pas à priver de pertinence la demande d'interprétation adressée par l'administration, qui portait sur l'existence de la créance ayant donné lieu à l'établissement de ces titres ; qu'au demeurant, la société RFI fait valoir que les titres exécutoires en question ne sont pas devenus définitifs, et ont fait l'objet, postérieurement au jugement, d'un recours administratif préalable obligatoire ; que, par suite, la société RFI est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté le recours en interprétation du directeur départemental des finances publiques de la Loire comme irrecevable ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé ; qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée au Tribunal ;

Sur la demande d'interprétation :

7. Considérant que l'Etat, représenté par le Crédit national, a conclu des contrats de prêt, le 12 juillet 1982, avec la SA Compagnie française pour le développement des entreprises / Grand Sud-Ouest Industrie (CFDE/GSOI), le 3 décembre 1982 avec la SA Henri Robin, le 10 mai 1983 avec la SA RFI ; que les documents annexés à ce dernier contrat précisent que la SA RFI vient aux droits de la SA CFDE/GSOI et de la SA Henri Robin ; que, le 20 décembre 1984, l'Etat, représenté par le Crédit national, a conclu un nouveau contrat avec la SA RFI, visant à la reprise par elle du contrat de prêt susmentionné en date du 12 juillet 1982 et à l'" aménagement " de ce dernier contrat ; qu'enfin, le 2 juillet 1985, l'Etat, représenté par le Crédit national, a conclu un dernier contrat de prêt avec la SA RFI ;

8. Considérant que la légalité des titres exécutoires émis pour le recouvrement des sommes découlant de ces contrats, contestée par la société RFI, est sans incidence sur la réponse à apporter à la question posée par l'administration, tenant à la qualification des contrats ;

9. Considérant que, compte tenu de leurs termes sans équivoque et de leur économie générale, ces conventions constituent des contrats de prêts participatifs et ne sauraient être regardées comme portant sur l'octroi de subventions ;

Sur les dépens :

14. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de la société RFI la contribution pour l'aide juridique qu'elle a acquittée lors de l'introduction de sa requête ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1106175 du Tribunal administratif de Lyon en date du 24 janvier 2012 est annulé.

Article 2 : Il est déclaré que les conventions mentionnées au paragraphe 7 doivent être qualifiées de contrats de prêt participatif et ne portent pas sur l'octroi de subventions.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société RFI est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au mandataire de la société Réalisations France Industries, au ministre de l'économie et des finances, et à la direction générale des finances publiques de la Loire.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2012, où siégeaient :

- M. du Besset , président de chambre,

- M. Dursapt et Mme Samson-Dye, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2012.

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N° 12LY00735

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00735
Date de la décision : 13/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-02-03 Procédure. Diverses sortes de recours. Recours en interprétation.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : SELARL ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-13;12ly00735 ?
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