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11/12/2012 | FRANCE | N°12LY01089

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2012, 12LY01089


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 mai 2012, présentée par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106278 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 19 octobre 2011 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2°) de rejeter la demande présentée par M.

A devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Il soutient que M. A ne peut être c...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 3 mai 2012, présentée par le préfet de la Haute-Savoie, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106278 du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 19 octobre 2011 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a désigné le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

Il soutient que M. A ne peut être considéré comme établi de manière stable et définitive sur le sol français, dès lors qu'il n'est en mesure de justifier ni de la date de son entrée en France ni de la continuité de son séjour sur le territoire national, ne produisant aucun justificatif de sa présence entre mai 2000 et mai 2011 ; qu'ainsi M. A ne remplit pas les conditions d'octroi d'un titre de séjour des articles 6-1 et 7 bis de l'accord franco-algérien ; que M. A ne rapporte pas la preuve de l'existence d'une vie commune avec son épouse antérieure au mariage ; que la seule circonstance que M. A ait épousé une ressortissante française le 21 mai 2011 à Douvaine, soit cinq mois avant la date des décisions attaquées, n'est pas de nature à porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au vu du caractère récent du mariage et de la courte durée de vie commune du couple ; que rien n'empêche M. A de regagner provisoirement son pays d'origine, d'y solliciter un visa en qualité de conjoint de Français auprès des autorités françaises en Algérie, et de rejoindre par la suite son épouse ; qu'eu égard aux conditions et à la durée du séjour de M. A le refus de séjour ne porte pas d'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et n'est entaché d'aucune illégalité ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 novembre 2012, par lequel M. A conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l' article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient être entré régulièrement en France en 1998, et remplir les conditions des articles 6-1 et 6-2 de l'accord franco-algérien ; qu'il vit avec son épouse depuis 2008, comme l'attestent les témoignages produits ; qu'ainsi le préfet a méconnu les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6-5 de l'accord franco-algérien ; que le préfet devait consulter la commission du titre de séjour ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président-assesseur ;

1. Considérant que le préfet de la Haute-Savoie relève appel du jugement du 5 avril 2012 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 19 octobre 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois, et désignant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

2. Considérant qu'aux termes du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ledit certificat de résidence est également délivré : " Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant que si M. A, né en juillet 1966, soutient résider en France depuis septembre 1998, il ne le démontre pas, aucun justificatif de sa présence sur le territoire n'étant apporté entre mai 2000 et mai 2011, date de son mariage avec une ressortissante française ; que ses allégations relatives à un concubinage datant de juillet 2008 ne sont pas davantage établies par les seules attestations produites en ce sens et rédigées par son épouse, deux membres de sa belle-famille, et une voisine ; que M. A ne justifie ni d'une ancienneté de séjour sur le territoire français à la date de la décision attaquée, ni de son insertion dans la société française ; que l'intéressé n'allègue pas disposer d'autres attaches familiales sur le territoire français et ne plus en avoir en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et en particulier du caractère récent de son mariage, la décision contestée du 19 octobre 2011 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapports aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'il suit de là que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle avait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A à l'encontre des décisions préfectorales en date du 19 octobre 2011 ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le refus de séjour n'a pas méconnu les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du même accord : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / 1° Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; 2° au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...). " ;

7. Considérant que si M. A soutient résider habituellement en France après y être arrivé via l'Espagne, en septembre 1998, il n'établit pas, ainsi qu'il a été dit, sa présence en France pour la période allant de mai 2000 à mai 2011 ; que, dès lors, l'intéressé, qui ne justifie ni résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date du refus de titre de séjour attaqué, ni d'une entrée régulière sur le sol français, n'est pas fondé à soutenir que le refus du préfet méconnait les stipulations précitées de l'article 6-1° et 2° de l'accord franco-algérien ;

8. Considérant que la commission du titre de séjour, aux termes du 1er alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ; que M. A ne remplissant pas les conditions prévues par les articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code, le préfet n'était pas tenu de saisir de son cas la commission du titre de séjour ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions en date du 19 octobre 2011 portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. A, faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français, et désignant le pays de destination ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation de l'Etat, qui n'est pas partie perdante à l'instance ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1106278 du 5 avril 2012 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : La demande de M. A et ses conclusions relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. Djamel Eddine A. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2012.

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N° 12LY01089


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01089
Date de la décision : 11/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-11;12ly01089 ?
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