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04/12/2012 | FRANCE | N°12LY01562

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2012, 12LY01562


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 juin 2012, présentée pour M. Yves , domicilié ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1103207-1107822 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet de la Loire rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour reçue le 9 août 2010 et de l'arrêté dudit préfet en date du 14 octobre 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français

et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de f...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 juin 2012, présentée pour M. Yves , domicilié ... ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1103207-1107822 du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet de la Loire rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour reçue le 9 août 2010 et de l'arrêté dudit préfet en date du 14 octobre 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de faire injonction au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour lui de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

M. soutient que :

- le refus de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur de droit en raison de l'absence d'examen particulier de sa situation et de ce que le préfet s'est estimé en situation de compétence liée, cette erreur de droit étant révélée par l'absence totale de motivation de cette décision ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations des articles 8 et 12 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 19 septembre 2012 fixant la clôture d'instruction au 12 octobre 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signé à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;

Vu la décision du 25 avril 2012 accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 2012 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller,

- les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;

1. Considérant que M. , ressortissant ivoirien né le 8 avril 1977, a déclaré être entré en France en 2006 ; qu'il a bénéficié d'une carte de séjour " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français en 2006 et les deux années suivantes ; qu'il a sollicité le 28 mai 2008 le renouvellement de ce titre de séjour ou la délivrance d'un tel titre " vie privée et familiale " au regard de ses liens personnels et familiaux en France ; qu'il a ensuite sollicité le 14 juillet 2010 la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ; qu'il a demandé au Tribunal administratif de Lyon l'annulation de la décision née du silence gardé par le préfet de la Loire sur cette dernière demande de titre de séjour ; que le préfet a ensuite, par un arrêté en date du 14 octobre 2011, refusé de lui accorder le renouvellement de son titre de séjour " parent d'enfant français " au motif qu'il ne justifiait pas de la résidence en France de son enfant français, et a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de sa seconde demande et au regard de ses liens personnels et familiaux, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que le requérant a également demandé au tribunal l'annulation de cet arrêté ; que M. relève appel du jugement du 13 mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, après avoir estimé que cette décision expresse de refus s'était substituée à la décision implicite de rejet, que ces deux demandes avaient le même objet et qu'il y avait lieu à statuer par un seul jugement, a rejeté ces demandes d'annulation ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que M. soutient qu'il réside en France depuis 2006, qu'il s'est marié avec une ressortissante kenyane le 3 mai 2008 avec laquelle il a eu une enfant née le 23 septembre 2008, qu'ils sont bien intégrés dans la société française, qu'il a travaillé en 2009 et payé ses impôts, et qu'il est titulaire d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée en qualité de plongeur ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que le requérant a vécu en Côte d'Ivoire jusqu'à son arrivée en France et qu'il s'est vu refuser le renouvellement de son titre de séjour en qualité de parent d'enfant français qui lui avait été délivré en 2006 et pendant deux années en raison du départ de France de son enfant et de la mère de ce dernier ; que son mariage avec Mme , qui a aussi fait l'objet d'un refus de titre assorti d'une obligation de territoire, est relativement récent ; que le requérant n'apporte aucun élément concernant l'emploi qu'il allègue avoir occupé en 2009 ; que les pièces produites par l'intéressé, notamment deux attestations de proches, des attestations de formation civique et de compétence linguistique qui lui ont été délivrées, des attestations concernant l'implication de son épouse pour apprendre le français ainsi que dans des actions caritatives religieuses, ne suffisent à établir l'existence de liens d'une intensité telle que le centre de ses intérêts privés et familiaux devrait être regardé comme situé en France ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le refus de séjour ne porte pas au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des mentions portées sur l'arrêté litigieux, que le préfet se serait estimé tenu d'assortir son refus de titre d'une obligation de quitter le territoire ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu des circonstances de l'espèce sus-décrites, et alors que la circonstance que le requérant et son épouse sont de deux nationalités distinctes est sans incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, seules les décisions fixant le pays de destination pouvant être contestées au motif qu'il existerait, du fait de la différence de nationalité, un risque de séparation du couple dans deux pays distincts, et qu'il n'est pas établi qu'il serait dans l'impossibilité de reconstituer le centre de sa vie privée et familiale avec son épouse et leur enfant en dehors de la France et notamment en Côte d'Ivoire, cette décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'obligation de quitter le territoire n'a pu méconnaître les stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dont il résulte que l'homme et la femme d'âge nubile ont le droit de se marier et de fonder une famille, alors que cette décision n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire aux requérants, qui sont déjà mariés, de fonder une famille et que, comme il a été dit ci-dessus, il n'est pas établi que sa famille ne pourrait vivre ensemble hors de France ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'exécution de la décision attaquée aurait pour effet de priver la fille du requérant de ses parents ou de l'un d'entre eux alors qu'il n'est pas établi, comme il a été dit ci-dessus, que la famille serait dans l'impossibilité de reconstituer le centre de leur vie privée et familiale en dehors de la France et notamment en Côte d'Ivoire ; que, eu égard aux circonstances de l'espèce énoncées ci-dessus, et au très jeune âge de l'enfant, l'obligation de quitter le territoire n'a pas porté une atteinte à l'intérêt supérieur de cette enfant et n'a pas ainsi méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces décisions ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Yves et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Bourrachot, président assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 décembre 2012.

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N° 12LY01562


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01562
Date de la décision : 04/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : VALENTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-12-04;12ly01562 ?
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