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29/11/2012 | FRANCE | N°11LY01657

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2012, 11LY01657


Vu I, sous le n° 11LY01657, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 17 août 2011, présentés pour la commune de Val d'Isère, représentée par son maire en exercice ;

La commune de Val d'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003971 du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Savoie, annulé la décision du 6 juillet 2010 de son maire refusant d'abroger l'arrêté municipal du 6 juillet 1983 réglementant la circulation des véhicules à moteur en dehors des v

oies publiques revêtues de la commune et lui a enjoint de procéder à l'abrogation de ...

Vu I, sous le n° 11LY01657, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 17 août 2011, présentés pour la commune de Val d'Isère, représentée par son maire en exercice ;

La commune de Val d'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003971 du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Savoie, annulé la décision du 6 juillet 2010 de son maire refusant d'abroger l'arrêté municipal du 6 juillet 1983 réglementant la circulation des véhicules à moteur en dehors des voies publiques revêtues de la commune et lui a enjoint de procéder à l'abrogation de cet arrêté ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de la Savoie devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Val d'Isère soutient que le jugement attaqué est irrégulier ; qu'en effet, la lettre du 6 juillet 2010 n'étant pas une décision de refus explicite d'abrogation, le déféré du préfet était prématuré dès lors que c'est la décision implicite de rejet de son recours, intervenue le 12 septembre 2010, qui aurait dû être annulée ; qu'elle n'a pas été à même de prendre connaissance en temps utile du sens des conclusions du rapporteur public ; que l'information donnée était insuffisante ; que le Tribunal administratif a estimé à tort que l'arrêté du 6 juillet 1983 était dans son intégralité une mesure de police administrative, alors que, dès lors que les terrains qui ont été mis à la disposition temporaire de deux clubs sportifs appartiennent au domaine privé de la commune, l'article 2 de cet arrêté a créé une situation contractuelle et des droits acquis pour ces clubs ; qu'un accord de volontés s'était légalement réalisé à l'époque ; qu'à l'époque, le maire, qui ne disposait d'aucun service juridique, a cru bien faire en concrétisant cet accord par lesdits articles ; que, selon la jurisprudence, une situation contractuelle peut résulter d'un acte administratif unilatéral ; que l'obligation d'abrogation résultant de l'article 16-1 de la loi du 12 avril 2000 ne s'applique pas puisqu'elle est limitée aux règlements ; que le jugement attaqué doit être annulé au moins en ce qui concerne l'injonction faite à son maire d'abroger les articles 2 et 3, lesquels ne relèvent pas du domaine de la police et ne sont pas réglementaires ; que s'agissant des autres articles, de nature réglementaire, elle s'en rapporte à la décision de la Cour ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure, adressée le 6 avril 2012 au préfet de la Savoie, en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu l'ordonnance du 10 octobre 2012 portant clôture de l'instruction au 25 octobre 2012 ;

Vu, enregistré le 24 octobre 2012, le nouveau mémoire présenté pour la commune de Val d'Isère, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par le moyen que le préfet de la Savoie, qui n'a pas présenté de mémoire en défense malgré la mise en demeure dont il a été l'objet, doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits en vertu de l'article R. 612-6 du code de justice administrative ;

Vu II, sous le numéro 11LY01858, la requête, enregistrée le 19 juillet 2011, présentée pour l'association " Le club des aigles ", représentée par son président en exercice et dont le siège social est situé Hôtel le relais du ski, BP 63, Val d'Isère Cedex (73152) ;

L'association " Le club des aigles " demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003971 du 17 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Savoie, annulé la décision du maire de la commune de Val d'Isère du 6 juillet 2010 refusant d'abroger son arrêté du 6 juillet 1983, réglementant la circulation des véhicules à moteur en dehors des voies publiques revêtues de la commune et a enjoint au maire de procéder à l'abrogation de cet arrêté ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de la Savoie devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

L'association " Le club des aigles " soutient que le jugement attaqué est entaché d'un vice de procédure dès lors que le sens des conclusions du rapporteur public a été renseigné tardivement sur le site Sagace, soit le 18 avril 2011 à 16 heures, pour une audience le lendemain à 10 heures ; que le sens indiqué était imprécis et incomplet ; que le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit car, la lettre du maire de Val d'Isère du 6 juillet 2010 n'étant pas une décision expresse d'abroger l'arrêté du 6 juillet 1983, elle ne constitue pas une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir ; que c'est à tort que le tribunal administratif n'a pas considéré les articles 2, 3 et suivants de l'arrêté du 6 juillet 1983 comme des décisions individuelles au maintien desquelles les bénéficiaires avaient droit, malgré un changement dans les circonstances de droit ; que les dispositions dudit arrêté ne sont pas toutes des mesures de police présentant un caractère réglementaire ; que le maire n'était pas tenu d'abroger l'ensemble de ses dispositions ; que la demande d'abrogation du préfet était excessive et entachée d'erreur de droit dès lors qu'elle portait sur des dispositions demeurées légales ; que le maire n'avait pas l'obligation d'y répondre ; qu'en adressant son courrier du 23 juillet 2009 directement au président du club des aigles et à ses membres, la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture a reconnu et confirmé l'autorisation accordée par l'arrêté du 6 juillet 1983 ; que les prescriptions imposées par cet arrêté aux bénéficiaires des autorisations démontrent que le droit d'utilisation n'était pas sans limite dans le temps ni respect de prescriptions particulières ; que les terrains concernés appartenant au domaine privé de la commune, ne s'appliquent pas les règles relatives aux autorisations d'occupation du domaine public, lesquelles ne confèrent que des droits dits " précaires " ; que l'autorité administrative n'a l'obligation d'abroger une autorisation de police créatrice de droit que lorsque son bénéficiaire cesse de remplir les conditions requises ; que seules les autorisations de police " conditionnelles " sont créatrices de droits précaires ; que la protection du droit acquis varie en fonction de la portée de l'acte, notamment lorsque le droit conféré se renouvelle constamment par l'usage de l'autorisation ; que l'abrogation de décisions créatrices de droit exige une décision motivée et le respect des procédures contradictoires résultant de la loi n° 2000-231 du 12 avril 2000 ; que l'autorisation qui lui a été accordée, créatrice de droits à effet continu, ne peut être abrogée puisqu'elle remplit toujours les conditions requises ; que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré de ce que l'autorité administrative ne peut abroger une décision administrative non réglementaire devenue illégale à la suite d'un changement de droit lorsque la décision a créé des droits au profit de son bénéficiaire et est devenue définitive et en l'absence de demande en ce sens du titulaire des droits, que dans les cas prévus par les lois et règlements ; qu'en intervenant en matière d'autorisation de pratique de sports ou loisirs motorisés le préfet de la Savoie a exercé des compétences du préfet coordonnateur de massif, dont il n'est pas établi qu'il les ait déléguées ; que, si l'arrêté n'est pas considéré comme illégal dans son ensemble, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au maire d'abroger l'intégralité de l'arrêté devront être rejetées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure, adressée le 6 avril 2012 au préfet de la Savoie, en application des dispositions de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu l'ordonnance du 10 octobre 2012 portant clôture de l'instruction au 25 octobre 2012 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2012 :

- le rapport de M. du Besset, président de chambre ;

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Soulier, représentant la commune de Val d'Isère, et de Me Raynaud, représentant l'association " Le club des aigles " ;

1. Considérant que les requêtes susvisées de la commune de Val d'Isère et de l'association " Le club des aigles " sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

2. Considérant que, par l'article 1er de l'arrêté municipal du 6 juillet 1983, le maire de Val d'Isère a interdit l'utilisation des véhicules à moteur, à usage civil en dehors des voies publiques revêtues de la commune à l'exclusion des véhicules de chantier, des véhicules et appareils agricoles, des matériels d'exploitation et de travaux forestiers ; que, par dérogation à la règle ainsi posée à l'article 1er, l'article 2 du même arrêté autorise les associations " Moto club de l'Iseran " et " Club 4x4 de Val d'Isère ", à utiliser, pour les véhicules de leurs membres, un terrain communal sis " Derrière Bellevarde " (côté Daille) ; que, par le jugement susvisé en date du 17 mai 2011, le Tribunal administratif de Grenoble a, sur déféré du préfet de la Savoie, annulé la décision du 6 juillet 2010 par laquelle le maire de Val d'Isère a refusé d'abroger cet arrêté et a enjoint à celui-ci de l'abroger ; que la commune de Val d'Isère et l'association " Le club des aigles ", également dénommée, selon l'article 1er de ses statuts, " Club 4x4 de Val d'Isère ", font appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant, en premier lieu, que la lettre du maire de Val d'Isère en date du 6 juillet 2010 comportait refus d'abroger l'arrêté du 6 juillet 1983 et avait ainsi le caractère d'une décision susceptible de recours, alors même que, par ailleurs, le maire proposait également au préfet l'organisation d'une rencontre ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si l'article 2 de l'arrêté municipal du 6 juillet 1983 autorise les associations " Moto club de l'Iseran " et " Club 4x4 de Val d'Isère " à utiliser un terrain compris dans le domaine privé de la commune, cette autorisation, donnée par dérogation à l'article 1er, n'est relative qu'à la circulation sur ce terrain des véhicules à moteur des membres de ces associations ; qu'ainsi les autorisations d'utiliser le terrain et d'y faire circuler des véhicules ne peuvent être regardées comme divisibles ; que, dès lors, le tribunal administratif était compétent pour apprécier la légalité de cet article 2 et le préfet était recevable à demander l'annulation de la décision du 6 juillet 2010 en tant qu'elle portait refus de l'abroger ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le sens des conclusions du rapporteur public, à savoir " annulation totale ou partielle ", était disponible sur le site Sagace le 18 avril 2011 à 16 heures, l'audience devant être tenue le lendemain ; que cette mention était suffisamment précise ; que, donnée avant la tenue de l'audience conformément aux dispositions précitées, elle doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme l'ayant été en temps utile ; que les requérantes ne peuvent faire valoir utilement que, selon les avis d'audience, elle devait être disponible environ deux jours avant l'audience ; qu'ainsi les premiers juges n'ont pas méconnu les dispositions précitées ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait irrégulier doivent être écartés ;

Sur la légalité de la décision du 6 juillet 2010 :

8. Considérant, en premier lieu, que si la commune de Val d'Isère fait valoir qu'en vertu de l'article R. 612-6 du code de justice administrative le préfet de la Savoie, qui n'a pas présenté de mémoire en défense malgré la mise en demeure dont il a été l'objet, doit être regardé comme ayant acquiescé aux faits, cette circonstance est sans influence sur la légalité de la décision du 6 juillet 2010, déférée par le préfet au tribunal administratif ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 362-1 du code de l'environnement, issu de la loi n° 91-2 du 3 janvier 1991 : " En vue d'assurer la protection des espaces naturels, la circulation des véhicules à moteur est interdite en dehors des voies classées dans le domaine public routier de l'Etat, des départements et des communes, des chemins ruraux et des voies privées ouvertes à la circulation publique des véhicules à moteur " ;

10. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 362-1 du code de l'environnement prohibant la circulation des véhicules à moteur en dehors du domaine public routier, des chemins ruraux et des voies privées ouvertes à la circulation publique, l'article 2 de l'arrêté du 6 juillet 1983, qui autorise une telle circulation en dehors de toute voirie, est devenu illégal lors de la promulgation de la loi n° 91-2 du 3 janvier 1991 dont sont issues ces dispositions ; que les associations " Moto club de l'Iseran " et " Club 4x4 de Val d'Isère " n'avaient aucun droit à son maintien ; qu'ainsi le maire de Val d'Isère était tenu de l'abroger ; que, dès lors, la décision du 6 juillet 2010, par laquelle le maire de Val d'Isère a refusé de l'abroger, est entachée d'illégalité ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Val d'Isère et l'association " Le club des aigles " ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du maire de Val d'Isère en date du 6 juillet 2010 et a enjoint au maire d'abroger l'arrêté du 6 juillet 1983 ; que les conclusions qu'elles présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de la commune de Val d'Isère et de l'association " Le club des aigles " sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Val d'Isère, à l'association " Le club des aigles ", au préfet de la Savoie et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2012, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Dursapt, premier conseiller,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 novembre 2012.

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