La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/11/2012 | FRANCE | N°12LY00024

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2012, 12LY00024


Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2012, présentée pour l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants, domiciliée chez M. , ...;

Elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100899 en date du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 mars 2011 autorisant provisoirement la société Travaux Publics Ardoisiens à poursuivre l'exploitation d'une carrière de basalte sur la comm

une de Rentières ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date d...

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2012, présentée pour l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants, domiciliée chez M. , ...;

Elle demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100899 en date du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 mars 2011 autorisant provisoirement la société Travaux Publics Ardoisiens à poursuivre l'exploitation d'une carrière de basalte sur la commune de Rentières ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 mars 2011 autorisant provisoirement la société Travaux Publics Ardoisiens à poursuivre l'exploitation d'une carrière de basalte sur la commune de Rentières ;

3°) d'enjoindre à la société de Travaux Publics Ardoisiens de cesser toute exploitation de la carrière dans un délai d'une semaine sous peine d'une astreinte de 2 000 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'elle a intérêt à agir et que son président est habilité par l'association à la représenter ;

- que le jugement ne vise pas la note en délibéré produite par l'association ;

- qu'elle n'a pas déposé de question prioritaire de constitutionnalité en première instance mais entendait faire valoir que l'article L. 514-2 du code de l'environnement ne pouvait être mis en oeuvre par l'autorité administrative en violation des dispositions de la Charte de l'environnement ; qu'elle soumet en appel une question prioritaire de constitutionnalité ;

- que la jurisprudence relative à l'article L. 514-2 du code de l'environnement conditionne la légalité d'une autorisation provisoire d'exploitation à une demande d'autorisation en cours d'instruction et au fait que l'arrêt de l'exploitation est susceptible d'avoir des conséquences économiques ou sociales ;

- que la charge de la preuve du caractère insuffisant des prescriptions administratives ne peut reposer seulement sur l'association ; qu'il appartenait au juge de demander à l'administration la preuve de l'absence d'impacts environnementaux de l'exploitation de la carrière ; que la commune de Rentières étant en zone Natura 2000, il convenait de faire une étude d'incidences à ce titre ; que cette étude devait être spécifique à l'autorisation provisoire ; que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il n'a pas tenu compte des enjeux environnementaux dans sa décision ; que les enjeux économiques doivent inclure la protection des intérêts agricoles ; que le département dispose de nombreux sites d'extraction qui permettent de satisfaire les besoins des communes et particuliers ; que sur le secteur une autre carrière, située à 10 kms, fournit les granulats ; qu'il n'est pas démontré que la société Travaux Publics Ardoisiens éprouve des difficultés à se fournir en matériaux ; que la société n'a pas pu préciser ses activités hors carrière ; que ses employés travaillent principalement à l'entretien des routes ; que la société ne démontre pas devoir faire face à des difficultés économiques en cas d'interruption de l'exploitation de la carrière ; que près de trois années d'exploitation sont intervenues dans l'illégalité ; que la situation économique de la société est fragile ; que l'exploitation illégale de la carrière aurait dû justifier le rejet d'une autorisation provisoire ; que les habitants auraient dû être consultés ;

- que les prescriptions administratives sont insuffisantes ; que la décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- qu'il convient d'assortir l'injonction de cesser l'exploitation d'une astreinte dissuasive ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 janvier 2012, présenté pour la requérante qui conclut à l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ;

Elle soutient que ces dispositions sont contraires aux articles 3, 5 et 7 de la Charte de l'environnement ; que le Conseil constitutionnel a déjà jugé que des articles du code de l'environnement n'étaient pas conformes à la Charte ; que l'article L. 514-2 du code de l'environnement résulte de l'ordonnance du 11 juin 2009 ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 février 2012, présenté pour la société Travaux Publics Ardoisiens, qui conclut à la constitutionnalité de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ;

Elle soutient que la portée constitutionnelle de la Charte de l'environnement n'est pas établie ; que l'argumentation de la requérante ne relève pas de la constitutionnalité de l'article L. 514-2 du code de l'environnement mais de son application jurisprudentielle ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 février 2012, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement qui conclut à la constitutionnalité de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ;

Il soutient que le régime des autorisations provisoires est jurisprudentiel ; que l'absence de violation de l'article 3 de la Charte de l'environnement résulte des prescriptions prises par le préfet pour accorder l'autorisation provisoire ; que le principe de précaution ne s'applique pas au cas d'espèce ; que les dispositions en cause sont antérieures à la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 et donc une éventuelle incompétence négative du législateur ne peut être invoquée ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 mai 2012, présenté pour la requérante qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, qu'en absence de question prioritaire, la Cour devrait admettre l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ; que le texte de l'article L. 514-2 du code de l'environnement ouvre une faculté discrétionnaire au préfet d'accorder une autorisation ; que les dispositions des articles L. 514-2 et L. 514-9 du code de l'environnement sont incompatibles ; que l'article L. 514-2 dudit code est contraire à l'objectif constitutionnel de clarté et d'intelligibilité de la loi ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 juin 2012, présenté pour la société Travaux Publics Ardoisiens, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui verser 2 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient que :

- s'agissant d'une autorisation provisoire, il n'y a pas lieu d'organiser une étude d'impact et une procédure d'information et de participation du public ;

- seuls les projets figurant sur une liste nationale ou locale doivent faire l'objet d'une étude d'impact, les carrières n'y figurant pas ;

- la charge de la preuve appartient à la requérante ; que le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions n'est pas assorti de précisions ; que les nuisances de l'exploitation de la carrière ne relèvent pas de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- l'exploitation de la carrière permet à la société Travaux Publics Ardoisiens d'être plus réactive que ses concurrents et de pratiquer des coûts modérés ; que l'arrêt de l'exploitation compromettrait l'existence de l'entreprise ; que l'atteinte à l'environnement est très modérée ; que la requérante ne précise pas le trafic que représente l'exploitation ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2012, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- il convient de se reporter aux mémoires du préfet produits en première instance ;

- la note en délibéré ne devait pas être visée dès lors que l'exemplaire authentifiant la télécopie a été produit le jour où le jugement a été prononcé ;

- il n'y a pas lieu de produire une étude d'impact pour une autorisation provisoire d'exploitation ;

- la jurisprudence permet au préfet de délivrer une autorisation provisoire ; que l'impact environnemental de l'exploitation de la carrière n'est pas important ; que l'absence d'autorisation exposerait la société à des difficultés financières ; que les investissements réalisés sont importants au regard de la taille de l'entreprise ;

- les prescriptions de l'arrêté prévoient de limiter l'impact visuel et environnemental de l'exploitation ; que le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2012, présenté pour la requérante qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que le juge administratif doit écarter les règles internes non-conformes au droit de l'Union européenne ; qu'il conviendrait si une difficulté d'interprétation du droit de l'Union se posait que la Cour pose une question préjudicielle sur la compatibilité du maintien d'une mesure contraire au droit de l'Union à titre provisoire ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 juillet 2012, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, qu'il n'existe pas de contradiction entre les dispositions de l'article L. 514-2 et l'article L. 514-9 du code de l'environnement ; que l'instruction d'une demande d'autorisation ne peut être faite que si le dossier est complet ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 août 2012, présenté pour la requérante qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 août 2012, présenté pour la requérante qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre, que le mémoire en défense du ministre est irrecevable car signé par une personne ne disposant pas de délégation de signature ; que la société ne disposait toujours pas de capacité financière suffisante ; que les autorisations d'installations classées nécessitent une étude d'impact ; que le ministre ne conteste pas que le droit de l'Union n'a pas été correctement appliqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 22 août 2012, présenté pour la requérante qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 octobre 2012, présenté pour la société Travaux Publics Ardoisiens, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que l'arrêté n° 12/0617 du préfet du Puy-de-Dôme autorisant la carrière a abrogé l'arrêté en litige ; qu'il n'y a plus lieu à statuer ;

Vu la note en délibéré, présentée pour l'association requérante, enregistrée le 12 novembre 2012 et non communiquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2012 :

- le rapport de M. Clément, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

1. Considérant que l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants fait appel du jugement du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 mars 2011 autorisant provisoirement la société Travaux Publics Ardoisiens à poursuivre l'exploitation d'une carrière de basalte sur la commune de Rentières ;

2. Considérant qu'il appartient au juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement de se prononcer sur l'étendue des obligations mises à la charge des exploitants par l'autorité compétente au regard des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue ; qu'il en résulte que si l'acte attaqué, pris pour l'application de la législation relative aux installations classées, a été abrogé par l'autorité compétente avant que le juge ait statué, il n'y a pas lieu pour celui-ci, que cette abrogation ait ou non acquis un caractère définitif, de se prononcer sur le mérite de la demande dont il est saisi ;

3. Considérant que par un arrêté du 6 avril 2012, le préfet du Puy-de-Dôme a délivré une autorisation d'exploitation définitive à la société Travaux Publics Ardoisiens et a abrogé l'arrêté du 25 mars 2011 en litige ; que par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête aux fins d'annulation de l'arrêté susmentionné ; que, dès lors, les conclusions de la requérante aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

4. Considérant, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants soit mise à la charge de l'Etat et de la société Travaux Publics Ardoisiens, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'association requérante à verser à la société Travaux Publics Ardoisiens la somme qu'elle demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 12LY00024 de l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants aux fins d'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme en date du 25 mars 2011 autorisant provisoirement la société Travaux Publics Ardoisiens à poursuivre l'exploitation d'une carrière de basalte sur la commune de Rentières.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association pour la sauvegarde de l'environnement et pour l'avenir des villages de Fromental et avoisinants, au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à la société Travaux Publics Ardoisiens.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Tallec, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 novembre 2012.

''

''

''

''

1

6

N° 12LY00024

id


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

40-02-02 Mines et carrières. Carrières. Autorisation d'exploitation.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Marc CLEMENT
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : LE BRIERO

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 27/11/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12LY00024
Numéro NOR : CETATEXT000026705972 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-27;12ly00024 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award